3.4

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trentaquattro

Le sommeil lui échappait et le fuyait en tout point.
Pourtant, tout le poussait à rejoindre les songes profonds qui l'attendaient avec impatience.

La fatigue l'écrasait, ses yeux lui brûlaient, et la chaleur du corps qu'il embrassait ne faisaient que l'attirer.

Il voulait dormir.

Non, il ne voulait pas dormir.

Il ne voulait pas se laisser glisser avec insouciance dans les bras envoûtant de Morphée.
Il avait peur de se perdre. De faire le mauvais choix. De tout détruire.

Yugyeom tourna la tête afin de regarder son réveil. Il affichait en lettre grossière "4:36".

Un ricanement discret lui échappa. Comment pouvait-il se montrer si égoïste avec lui-même ?

Il se privait de sommeil afin de se priver d'espoirs futiles.
Il se privait de cette paix rédemptrice, mais à quel prix ?

Pourquoi ?
Pourquoi faisait-il ça ?

Le plus jeune n'en savait rien. Mais au fond de lui, il sentait que c'était impératif. Il ne pouvait pas se laisser aveugler par l'éclat de ses sentiments idylliques.

Et c'est le regard voilé qu'il observa une ultime fois son visage fin et endormi.
Il passa de longues minutes à y retenir chacune de ses rides radieuses, chacun de ses traits ensorcelants. Puis il ferma les yeux violemment.

Il n'y arrivera jamais.

L'âme déchirée, le coeur ravagé, il creusa une distance inéluctable entre lui et l'insouciance apaisante de Jinyoung.

Il abandonnait la main qu'il avait tendue. Il abandonnait l'homme qu'il aimait. L'homme qui avait finit par l'aimer.

Il abandonnait toutes ces brisures. Il abandonnait leur désespoir.

Yugyeom s'extirpa des bras de son aîné, se laissa glisser en dehors des draps chauds, et le froid glaçant de la solitude le rattrapa.

Il savait. Il en était persuadé. Il devait le faire.
Il devait finir ce champ de bataille où leur passion les avait consumés.

Le coeur lourd, l'esprit tiraillé, il posa sa main sur la poignée de la porte,
l'abaissa,
et le quitta
avec un dernier regard, empli de peine et de désolation.

Il abaissa alors la poignée, et referma la porte craintivement.
Il n'était sûr de rien. Il hésitait encore. Son corps n'était pas en adéquation avec ses envies. Et pourtant c'était ce même corps qui faisait les bons choix.


- Hyung...

Mark ne dormait pas. Il était là, assit sur le canapé, une mine indéchiffrable collée au visage.

Ce dernier lui fit signe de le rejoindre en tapotant sur la place vide à ses côtés, un sourire compatissant sur les lèvres.

Yugyeom avança, le pas chargé et les épaules lourdes de conséquences, puis s'installa contre son aîné.

- Tout ça va s'arrêter, maintenant, déclara le rougeaud, la gorge nouée.

Le rictus rassurant qu'il lui adressait n'effaçait pourtant pas la douleur qui régnait dans ses prunelles embuées.

Il le trahit. Car un sanglot étouffé et capricieux descella ses lèvres pincées.

- Tu crois que c'est le bon choix ? murmura Mark, tout aussi atteint par les sentiments de son cadet.

puéril - jinyeomOù les histoires vivent. Découvrez maintenant