Prologue

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L'avion était tout confort. Ça avait du bon de pouvoir voyager en première classe. Je regardais ma mère dormir à côté de moi. Elle était épuisée ses derniers temps, sa nouvelle campagne de sensibilisation l'avait terrassée. Et comme elle disait toujours : « Une lutte n'est jamais finie ». J'aurais préféré que la lutte ait des heures de sommeil fixe mais bon. Je tentais de remettre sa tête droite, mais elle retomba lourdement de l'autre côté. Je gloussais malgré moi. Mon père me fusilla du regard. Cela m'amusa d'autant plus. Mais je me retins d'exploser de rire. Il détestait attirer l'attention. J'étais d'ailleurs certaine qu'il prenait sur lui pour ne pas réveiller sa femme, histoire qu'elle se tienne bien droite. Je l'imaginais la secouer comme un prunier, lui expliquant les principes de bienséance.

Je reportais mon attention sur le hublot, essayant tant bien que mal de contrôler un fou rire. Je ne vis que des nuages immaculés. Je souris. Bientôt, la pollution ne serait qu'un mauvais souvenir. Tout ça grâce aux inventions de mon père. J'exagérais peut-être un peu, il n'avait pas été seul, mais j'étais si fière de lui. Grâce à son entreprise et aux avancées technologiques de cette dernière, l'air, les eaux, le sol ou bien encore l'atmosphère avaient été dépollués. Bien sûr, il faudrait encore quelques années avant que la Terre ne retrouve son éclat originel, sans compter que personne n'avait encore trouvé le moyen de « réparer » l'atmosphère endommagée. Mais si chaque pays continuait ses démarches vers un avenir plus propre, on pouvait espérer une nette amélioration des conditions d'ici une dizaine d'années.

C'était d'ailleurs la raison de notre voyage au Japon. Le pays étant resté très conservateur même après les nouveaux accords, il fallait s'assurer qu'il respecte bien les normes. Mon père, étant originaire du pays, avait été choisi par le conseil pour vérifier tout cela. Je soupirais. Le pays avait beau être assez secret, je ne doutais pas un seul instant qu'il respecte les nouvelles normes. Il serait bien trop risqué pour eux de ne pas dépolluer leur zone. Lors de l'épisode de grande pollution, il avait l'un des pays les plus touché. Presque trente pourcents de la population avait péri. Bien sûr, ça n'était rien en comparaison de la Chine ou des Etats-Unis, mais cela avait suffit pour que le gouvernement soit réceptif à la démarche.

Non, ce qui m'inquiétait avec ce pays, c'était plutôt leur position dans la guerre qui se profilait. Les tensions étaient bien trop importantes pour qu'un pays tel que celui-ci ne laisse aucune information filtrer. Si la guerre éclatait, il fallait être sûr de pouvoir compter sur eux. Bien sûr, l'empereur actuel était en très bon terme avec le conseil, et siégeait parmi ses plus hauts membres, sans compter que son fils semblait vouloir suivre l'exemple de son père. Mais ça ne suffisait pas à me rassurer. Même si l'empereur était écouté car respecté, il n'avait presque plus de pouvoir. Les décisions finales ne lui revenaient pas. Et la partie du gouvernement qui prenait ces décisions ne semblaient pas résolue à choisir un camp, ce qui créait beaucoup de tension politique. Comme s'il n'y en avait pas déjà assez avec le nouveau gouvernement international.

Le Japon avait vu revenir en force leur mafia. Leurs membres s'étaient servis de l'épisode de panique pour réaffirmer leur pouvoir. Ils s'étaient servis de la peur et de la faiblesse des plus démunis. Ils me dégoutaient. Et le gouvernement était sous leur coupe. Ils avaient sous contrôle la moitié des quartiers du pays, ce qui était une arme de négociation très efficace. Personne, ou presque, ne pouvait s'opposer à eux. Pour la guerre, c'était avec eux qu'il fallait négocier. Et ça, notre nouveau gouvernement n'est pas prêt à l'entendre.

C'était ce qui m'inquiétait le plus dans cette visite protocolaire. Qu'est-ce que mon père avait bien pu accepter comme mission diplomatique.

Je fus tirée de mes pensées par le commandant de bord qui annonçait le début de la descente. Je vis ma mère, que mon père avait dû réveiller, bailler à s'en décrocher la mâchoire. Mon père la regardait, visiblement outré de son comportement. J'en aurait bien ri, mais tous mes muscles venaient de se crisper. Nous allions atterrir dans l'un des pays les moins sécurisé de la planète. Ma mère et moi étions de parfaites étrangères. Si le malheur nous faisait nous éloigner ne serait-ce qu'un peu des quartiers touristiques, nous allions en baver.

Little AngelOù les histoires vivent. Découvrez maintenant