Little Angel

Chapitre 16 : Un drôle de secret

Il me fallut beaucoup d'efforts pour ne pas arrêter mes gestes dans leur course et la regarder avec les yeux arrondis.

Un secret ? Je ne savais pas si ce que je venais de lui avais dit était réellement un secret, mais elle semblait y croire. Et en un sens, elle n'avait pas tort, je n'avais jamais dit à qui que ce soit ce que je venais de lui révéler. Mais c'était plus par manque d'ami que par réelle volonté de le cacher. Et puis, ça n'avançait pas à grand-chose, ça ne changeait rien à ma vie ni à la sienne. Quoique son sourire me laissait penser le contraire. Elle semblait heureuse que je me sois confiée à elle, comme une amie.

Et à vrai dire, je ne savais pas si je la voulais sincèrement comme amie. J'étais clairement sa prisonnière mais elle ne semblait pas avoir la même notion d'amitié que les autres. Je me sentis rougir en me rendant compte que finalement, j'étais moi-même incapable de définir ce qu'était un ami. Je me retins de secouer la tête. J'étais au moins sûre d'une chose, les amis avaient des centres d'intérêts ou des points communs. Je n'en avais aucun avec elle. C'était même plutôt le contraire, presque tout nous opposait.

En revanche, j'étais certaine de vouloir son secret. Même s'il s'agissait d'une pacotille, cela pouvait m'apporter beaucoup. Dont une chose essentielle : sa confiance. Si je voulais sincèrement m'échapper d'ici de manière sûre, il fallait déjà que je puisse me soustraire à ses griffes. Et pour cela, il fallait qu'elle baisse sa garde au moins un instant.

Je ne me faisais pas d'idée, même lorsque j'avais pu déambuler seule dans ce qui était son appartement, je la savais aux aguets. Elle n'était pas prête de me lâcher, c'était une évidence. Et le fait qu'elle m'ai achetée me confortait dans cette idée. Elle avait dû donner quelque chose en échange de ma personne, et quoi que ce soit, cela rajoutait à ma valeur. Alors même si je ne savais pas ce qui l'avait motivée à m'acheter, j'étais certaine qu'elle ne me laisserait pas m'échapper de sitôt.

Je hochais la tête pour lui signifier mon accord et un sourire plus grand encore vint se plaquer sur son visage. Puis elle reprit son sérieux et commença à faire les cent pas derrière moi. Je continuais de me brosser les cheveux sans rien lui dire, regardant simplement ses allers et venus à travers le miroir. Ses petits sourcils froncés se voyaient à peine tant ils étaient clairs et sa moue boudeuse ressemblait plus à celle d'un enfant qu'à celle d'un membre de gang. Un sourire léger vint se dessiner sur mon visage alors qu'elle attrapait une de ses mèches de cheveux pour la mâchonner.

Elle s'arrêta net et me fixa. Mon sang se glaça dès lors et je crus que mon cœur ne tiendrait pas lorsqu'elle se précipita sur moi comme une furie. Mais elle se contenta de s'assoir sur la petite table à côté de moi sans cesser de me fixer.

- C'est la première fois que je dis un secret à quelqu'un. J'imagine qu'il doit être à peu près équivalent, non ?

Je hochai la tête après un instant. Je ne savais pas s'il y avait des règles pour les secrets mais cela me paraissait être un bon début. Je savais pertinemment qu'elle ne me donnerait pas le lieu où était caché l'armement aujourd'hui mais ça avait au moins le mérite de faire avancer les choses. Et puis, si j'étais condamnée à rester enfermée, autant que ce soit avec quelqu'un de bonne humeur.

Ayano réfléchit encore un instant, puis déclara, sûre d'elle :

- Avant qu'on ne m'attrape, je voulais être adoptée.

Je clignais des yeux sans comprendre. « Avant qu'on ne m'attrape » ? Il était clair qu'elle ne faisait pas parti de la famille de Ren, et l'adoption me paraissait plausible mais... « Attraper » n'était pas vraiment un verbe qui rappelait la joie d'avoir une nouvelle famille aimante. Ayano dû interpréter mon silence en désapprobation puisqu'elle secoua la tête d'un air désolé.