Chapitre 28 : Mot d'amour

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Je me réveillais en sursaut, ramenant mes mains contre mon cou dans un geste de panique. De grandes goulées d'air entraient et sortaient de mes poumons dans un rythme effréné de terreur. Je sentais encore sa prise brûlante contre ma chair et ses yeux de braises me transpercer de part en part. Tout mon corps tremblait et semblait sur le point de défaillir. Autour de moi, la pièce se mit à tourner, transformant tout ce sur quoi mon regard se posait en spectre virevoltant.

Deux mains gelées écartèrent mes bras et se posèrent de part et d'autre de mon visage. Deux yeux bleus s'encrèrent à mon regard et me maintinrent à flot. J'avais beau tenter d'échapper à ses yeux, ses mains me ramenaient systématiquement vers eux. Cela finit par me calmer, après de longues minutes perdues dans le temps. Je compris que la seule chaleur qui inondait mon cou ne venait que des larmes salées que je versais et que c'était l'excès d'air et non pas le manque qui faisait tourner le monde.

D'autres minutes s'écoulèrent encore avant que la voix douce d'Ayano ne me parvienne, comme une mélodie qu'on chantonnerait pour bercer un enfant. Les larmes se tarirent et ma poitrine se souleva régulièrement, aussi stable que la pièce qui m'entourait. Ayano se mit à sourire doucement avant de lâcher mon visage. Ses doigts gardèrent les miens entrelacés, comme de peur qu'ils ne finissent en poussière si elle les lâchait.

- J'ai cru que tu ne te réveillerais jamais...

Le soulagement dans sa voix était palpable. Je regardai par la fenêtre d'un air absent et remarquai que le soleil déclinait. J'avais dû dormir presqu'une journée entière. Ces dernières semaines avaient été éprouvantes et les événements de la soirée n'avaient rien arrangé. Je baissais le regard alors que les souvenirs refaisaient surface.

- Qu'est-ce qu'il s'est passé là-bas ?

Je relevais le regard surpris. Alors Ren ne lui avait rien dit. Je fronçais les sourcils. Elle soupira et m'expliqua :

- Je t'ai retrouvée ici ce matin. Tu étais fiévreuse et tu semblais habitée par de sombres cauchemars. Je ne voulais pas te laisser seule ici alors j'ai renoncé à trouver Ren. J'avais espoir que tu puisses m'éclairer sur le déroulement de la soirée.

Je fixais mes mains, gênée. Cette soirée avait été un désastre du début à la fin. Les doigts d'Ayano relevèrent doucement mon menton pour que je la regarde dans les yeux.

- Tu sais que tu peux tout me dire.

Je soupirai et tentai de reprendre les fils de ma pensée.

- Lorsque nous sommes arrivés, nous nous sommes aperçu qu'un autre gang était sur les lieux...

Je réfléchis un instant sans pouvoir mettre de nom sur leur tatouage. Ça avait un rapport avec les tigres mais...

- Tora no chi, me coupa Ayano, le gang de Keiko.

Un long soupir s'échappa de sa bouche mais elle n'ajouta rien de plus. Le cas de Keiko m'intriguait de plus en plus, mais Ayano ne me laissa pas le temps de la questionner :

- Vous avez réussi à récupérer la cible ?

Sa question me prit au dépourvu pour la seule et unique raison que je n'en savais rien. Je clignai des yeux avant de hausser les épaules comme une enfant. Ayano parut perplexe et m'inonda de questions. Combien étaient-ils ? avaient-ils des armes apparentes ? Ren m'avait-il laissé toute seule ? Était-ce pour cela que j'étais blessée ?

- J'ai vu ma mère, dis-je dans un souffle.

Ayano cessa de parler et pencha la tête sur le côté. Elle n'avait visiblement pas entendu. Je me mordis la lèvre sans trouver le courage de répéter. J'avais vu ma mère et je l'avais serrée dans mes bras mais elle était partie sans moi. Elle m'avait laissée seule et sans défense. Elle avait laissé Ren me récupérer, m'étrangler et Dieu sais-je quoi encore. Des larmes se rematérialisèrent au creux de mes paupières alors que je me remémorais le sentiment de sécurité que j'avais pu ressentir dans ses bras.

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