Elle ne bougeait pas. Elle avait une arme braquée sur la tête et son regard n'exprimait ni peur, ni surprise. Il exprimait une sorte de franchise que j'avais trop rarement vu. Et bien que je n'ai aucune intention de la tuer, elle semblait prête à accueillir la mort comme si elle la connaissait depuis toujours. Mais le plus étrange était que, malgré ça, son regard était animé de plus de vie que je ne lui en avais vu jusqu'alors. J'aurais aimé l'effrayer, mais je n'avais réussi qu'à la réveiller d'un long sommeil.
Tant mieux, j'avais besoin d'elle.
Dire que j'apparaissais rarement en public était un doux euphémisme. Et les rares personnes qui m'avaient croisé en dehors d'ici ne savaient même pas que j'étais le chef des Jûsan Hiryuu. En même temps, j'avais tendance à ne pas le crier sur tous les toits. Depuis la mort du gan'so, je n'avais pas vraiment fait d'annonce officielle. Il faut dire aussi que me mettre une cible sur la tête n'était pas trop dans mon intérêt. Même le père de Keiko ne savait pas à quoi je ressemblais.
Mais là, c'était différent. J'avais vraiment besoin de sortir d'ici. Et si mes tatouages ne posaient pas trop de problème dans les quartiers dévastés, j'étais sûr et certain de faire tâche dans le bâtiment blanc. C'était l'un des bâtiments les plus sécurisés du Japon et il n'était pas sous mon influence. Le nouvel ordre mondial avait mis la main dessus il y a plus d'un an maintenant. Et ces enfoirés avaient aussi pris ce qui se trouvait sous le bâtiment. Je ne doutais pas un seul instant qu'ils l'aient fait exprès. Et dans une semaine, j'allais le récupérer.
Mais pour ça, j'avais besoin de la petite brunette qui se trouvait en face de moi. Vu la notoriété de son père, elle devait forcément savoir passer inaperçu dans le genre de soirée où j'allais. Remarquez, vu sa taille, elle devait passer inaperçu à peu près partout. Et elle allait m'aider. Parce qu'elle n'allait pas avoir le choix. Et vu la tête qu'elle avait tirée en me détaillant, je n'étais clairement pas prêt.
Je baissai mon arme, replaçai le cran de sécurité et la rangeai. Aucune trace de soulagement ne passa sur son visage, j'y vis même une pointe de regret. Cette fille est terriblement... intéressante. Je passais la langue sur mes lèvres dans un vieux réflexe avant de la détailler davantage. La première chose qui me sauta aux yeux fut son regard sévère. Il semblait donner de l'importance à chaque petite chose sur laquelle il se posait. Je remarquais ensuite la froideur qui se dégageait d'elle. Et à vrai dire, ce n'était pas désagréable. Finalement c'était ça qui la définissait le mieux. Là où elle aurait pu être austère, elle semblait simplement honorée d'une grâce encore incertaine. Elle avait le port noble des impératrices mais également la pudeur de leur fille.
- Rin.
Elle me regarda comme si je venais de lui annoncer que le monde lui tombait sur la tête : avec la plus totale incompréhension. Je levais les yeux au ciel avant de compléter :
- C'est ton nom. Tu t'appelles Rin.
Ses yeux s'agrandirent quand elle comprit puis ils s'obstinèrent à regarder le sol. Je serrai la mâchoire et avant d'attraper son menton du bout des doigts. Je voulais qu'elle me regarde. Je ne savais pas pourquoi mais je le voulais. Et ce que je voulais, je l'obtenais. Quand elle releva la tête, je vis les blessures que ma sœur venait de lui infliger. Elles étaient assez nettes mais je ne doutais pas un seul instant qu'elles étaient involontaires. Si ma sœur collectionnait les poupées c'était uniquement pour avoir de l'attention. Elle s'y prenait mal, je ne comptais plus le nombre de cadavre dont j'avais dû me débarrasser, mais ça n'était pas méchant.
- Tu viens avec moi.
Elle ouvrit grand les yeux avant d'ouvrir grand la bouche :
- Mais Ayano...
Je la coupais d'un geste. Je détestais qu'on discute mes ordres. Je n'étais pas le chef pour rien. Tout le monde était sous mon commandement. Même Ayano. Ma sœur avait beau l'oublier souvent, elle ne dérogeait pas à cette règle. Alors quand je disais que Rin venait avec moi, elle venait. Point. Pas de discussion possible. Sauf que vu la tête de la brunette, elle n'avait pas l'air particulièrement encline à me suivre. J'aurais pu la menacer pour qu'elle me suive sans histoire, pour qu'elle apprenne à me craindre, mais au lieu de ça, je me mis à me justifier.
- Elle est au courant. Ou du moins, elle sait que je ne t'ai pas donné un prénom pour repartir sans toi après.
Les yeux de Rin se tintèrent de tristesse. Peut-être qu'elle tenait plus à ces anciens prénoms que ce que je pensais. Tant pis. Si elle voulait garder sa petite vie bien rangée, elle n'avait qu'à pas atterrir ici. Elle ne se levait toujours pas. J'attrapais son bras, agacé. Je l'entendis étouffer un gémissement. Tant pis. Elle m'agaçait à ne pas comprendre que mes ordres étaient à effet immédiat. Et si elle n'était pas sous la protection de ma petite sœur, je lui aurais fait bien pire depuis bien longtemps. Ce serait agréable qu'elle ne l'oublie pas.
Je l'emmenais en dehors de la chambre et la jetais dans l'ascenseur. Je ne croisais pas Ayano, elle avait dû partir s'entrainer. Elle le faisait de plus en plus ces temps-ci. J'espérais simplement qu'elle ne casse personne cette fois. Je soupirai en voyant que la brunette était tombée et qu'elle semblait sur le point de s'évanouir. Je n'avais pas d'eau sur moi à lui jeter. Peut-être que si...
Elle se releva sans me laisser le temps de trouver un moyen convaincant de la réveiller. Elle était mal en point. Mais bon, ma sœur avait raison, Keiko ne pouvait pas être punie d'avantage. Elle était certes moins amochée que Rin, mais elle n'avait peut-être pas mérité mon traitement. Surtout que j'ai envoyé au diable son foutu homme de main par la suite. Mais bon, elle savait à quoi s'attendre lorsqu'elle avait ramené la petite dans l'une de mes caves. Elle était peut-être la petite protégée chez son père, mais ici, c'était sous mes ordres qu'elle était et c'était mon gang qu'elle avait mis en danger. Alors c'était à moi de choisir la sanction à laquelle elle s'exposait.
L'ascenseur arriva enfin à l'étage escompté. Pas trop tôt. Je vous ai dit que la patience n'était pas ma qualité principale ? Je passai devant, la brunette me suivit sans un mot. Tant mieux, je n'avais pas envie de parler pour l'instant. Si tout se passait comme je l'escomptais, j'allais l'entendre piailler pendant des heures d'ici peu. Et je devrais donner le change. Je n'en avais pas envie mais si elle faisait son job correctement, j'allais enfin pouvoir le récupérer. Et ça valait toutes les galères du monde. J'ouvris la salle. Les lumières s'allumèrent doucement et j'y poussais Rin. C'était ici que nous allions passer de nombreuses heures durant la semaine qui venait. Je fermais à clef derrière moi. Finalement, c'était une bonne chose que cette petite princesse ai atterri ici.
Mais elle n'avait pasintérêt à être décevante.
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Hey ! Comment allez-vous ?
Un petit chapitre un peu spécial pour bien commencer la rentrée scolaire.
N'oubliez de lire le chapitre 10 qui a été publié dimanche avant celui-ci et bonne lecture à tous ! A mercredi prochain ! ^^
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Little Angel
ActionLe monde a atteint un pic de pollution critique, tuant une grande partie de la population mondiale. Mon père est le sauveur de l'Humanité. Ou presque. A 17 ans, et je suis obligée de le suivre dans une mission diplomatique au Japon. Les Yakuzas ont...