Faux mensonge

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- Mila, où es-tu ?!

- En ville, avec les garçons.

- Tu aurais pu me prévenir que tu partais, je te cherchais partout !

- Je suis désolée Valia.

- Pourquoi ne m'as-tu rien dit ?!

- Tu ne m'aurais jamais laissée partir.

- En même temps tu ne les connais que depuis hier ! Bon, attends-moi au bar de Mike, j'arrive !

- D'accord...

Le cœur de Mila se serra d'appréhension. Sa sœur lui ferait-elle la morale en publique ? Et puis, elle n'allait tout de même pas venir à cheval, sa bête allait effrayer tout le monde !

Soudain, un hennissement strident, suivit d'une puissante cavalcade se fit entendre, confirmant les craintes de Mila. Puis, surgissant de nulle part, un énorme étalon noir déboula, provoquant le mouvement de panique des personnes les plus proches. Cet animal débarquait tel un ouragan et s'arrêtait là tranquillement comme si c'était totalement normal. Les gens présents prirent du recul et se mirent à contempler cette bête, fascinés, bien qu'effrayés. L'œil vif, le poil noir ébène luisant sous le soleil, la crinière au vent s'agitant comme un drapeau pirate, ce cheval était magnifique. Magnifique et terrible à la fois. En effet, il était tout simplement gigantesque. D'environ un mètre quatre-vingt-quinze au garrot, il surpassait tout d'une tête et demie minimum. Ses sabots étaient aussi larges que les mains d'un grand et puissant guerrier antique et son poitrail se montrait tellement musclé qu'on aurait cru la créature faite de pierre. Son air déterminé, arrogant et sûr de lui ajoutait à tout cela un aspect majestueux et noble réduisant n'importe quel pur-sang à l'état de simple poney.

C'est seulement lorsque les personnes présentes eurent terminé de contempler l'animal qu'elles s'aperçurent de la présence de sa cavalière. Une jeune fille aux cheveux bruns coupés aux épaules, habillée d'une veste en cuir noir, d'un jean bleu foncé et de baskets également noires. Elle aussi avait un air impérial mais personne n'osait la regarder dans les yeux car tous avaient remarqué que ceux-ci étaient couleur de feu. Cette fille ne pouvait pas être humaine, c'était impossible ! Personne ne pouvait avoir les yeux orangés ! Et puis son regard était tellement effrayant... . Une animosité féroce les animait et en faisait trembler plus d'un. Et puis son cheval n'était pas normal non plus ! On aurait dit qu'à eux deux, rien que par la force de leur regard et de leur agressivité, ils pouvaient réduire la ville en cendres, si l'envie les en prenait.

- C'est un démon, ne vous approchez pas ! Ce cheval est un démon !

Un silence ahuris régnait à présent. Certes, ce cheval semblait surnaturel mais de là à faire de lui un démon...

Ecoutez-moi, reprit l'homme qui avait parlé, j'ai déjà eu affaire à cette bête par le passé et je vous jure que je ne mens pas. Il y a de cela deux ans, je faisais partie d'une expédition ayant pour mission de capturer et dresser un troupeau de chevaux sauvages. Tout se passait très bien jusqu'à ce qu'un énorme cheval noir n'arrive au triple galop, semant la pagaille parmi le troupeau. Alors, avec mes amis, on s'est tous regroupés autour de lui pour l'attraper. Mais c'est qu'il se débattait l'animal ! Il lançait ses sabots en l'air en poussant des hennissements surpuissants ! Il a blessé l'un de mes compagnons et a fini par m'envoyer un coup de sabot en pleine gueule ! Regardez, j'ai la marque !, cria-t-il en montrant son visage. Je vous jure que c'est lui, je l'ai reconnu ! C'est le Cheval au Galop du Tonnerre, le Démon Noir ! »

Silence complet. Personne n'osait même respirer. Cet homme avait réellement une marque sur le visage et elle semblait parfaitement correspondre au sabot de cheval noir. Mais tout le monde savait aussi que l'homme était un ivrogne à moitié fou, alors que croire ? Tout à coup, la cavalière se mit à frapper dans ses mains. Elle applaudissait.

- Bravo, quelle histoire passionnante ! Mais vois-tu, elle manquait de réalisme.

- Mais ce n'est pas une histoire, c'est vrai !

- Mais bien sûr, et moi je suis la Reine d'Angleterre (la jeune fille savait que c'était une expression utilisée par les humains).

- Mais puisque je dis que c'est vrai ! Ma marque le prouve !

- Tu es sûr que ce n'est pas plutôt en draguant une belle jument que tu as reçu cette jolie marque ?

Eclat de rire général.

N'appréciant pas tes avances, elle t'aurait euh...comment dire... giflé ? Enfin saboté, si je puis dire, et tu aurais inventé toute cette histoire à dormir debout pour paraître moins idiot. Valia rit.

- Mais...mais... . Oh et puis merde, hein !

- Et ben dis donc, je comprends qu'elle n'ait pas voulu de toi si tu étais aussi vulgaire que ça avec elle, s'exclama la cavalière d'un air faussement outré.

Le rire de foule augmenta encore. Les répliques de cette jeune fille étaient excellentes !

Mike et ses amis étaient bluffés : sur cet animal gigantesque, Valia avait réellement l'apparence d'une déesse guerrière. Son air autoritaire et déterminé faisait d'elle une véritable Athéna. Seul bémol au tableau, il émanait de la jeune fille une agressivité hors du commun. Eux-même avaient assisté à une scène dans laquelle Valia n'avait pas cherché à retenir ses pulsions et cela les avaient quelque peu choqués. Comment une jeune fille pouvait-elle éprouvé autant de haine et de violence ? Et tous sentaient que cela n'était qu'une infime partie de ce dont elle était vraiment capable.

Gardant sa majesté, Valia fit pivoter son fier destrier en direction de Mila, présente à quelques pas d'ici. Rentre avant la nuit, lui dit-elle, puis Valia lança sa monture au galop - un galop ressemblant en effet aux roulements du tonnerre - et disparut dans la forêt aussi rapidement qu'elle était arrivée.

Quand le passé rattrape le présentOù les histoires vivent. Découvrez maintenant