L'ombre des légendes

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Les rêves attrapaient les pensées nébuleuses.
Les illusions dansaient sous des regards bizarres,
Tourmentant sans logique et en fruit du hasard,
Égarant le dormeur sur la terre orageuse.
Terrible cauchemar qui mortifie l'esprit
Ravage tout espoir, par un sombre mépris.

Hurlement.

Jamais homme n'entendit pareil cri désespéré.

Glacial.

Et des sanglots rapides secouèrent l'enfant. Impossible de se dominer : la terreur toute entière le prenait et le malmenait.

Mal à la tête. Un mal puissant qui s'estompait doucement en laissant une simple douleur lancinante et insupportable, qui ôtait toute faculté de réflexion.

Ah qu'elle parte, cette douleur ! Ah qu'elle s'en aille ! Ah... Maudit cauchemar...

Épuisé, l'enfant s'effondra sur son lit et mordit violemment son oreiller. La douleur disparaissait peu à peu, remplacée par une impression étrange. Quelque chose avait changé...

Curiosité.

Le garçon se lève. Il écoute.

Du cauchemar naît l'autre et les métamorphoses.
L'esprit souffrant se donne en un temps sacrifié
Et reçoit la magie des ombres magnifiées,
Et reçoit plus encore que d'entendre ces choses.

- Quoi ? Geignit l'enfant en sautant sur son lit en position de bagarre. Je n'ai pas peur, vous savez ! Je sais me battre !

La douleur était partie. Sa vue s'habituait doucement à l'obscurité et lui renvoyait un étrange spectacle. Irréel.

Une foule d'ombre avait envahi sa chambre et l'observait silencieusement. Certaines, complices, s'échangeaient quelques mots. D'autres semblaient s'être mal réveillées et somnolaient encore. Des silhouettes d'enfants étaient grimpées sur les épaules de leurs parents. Et trois ombres, devant, attendaient noblement une réaction de l'enfant.

- Je n'ai pas peur, lâcha ce dernier, comme un automate, avant de s'enfuir de la pièce en hurlant, fermant les yeux et les mains bien appliquées sur ses oreilles. Pas peur !

L'air frais du jardin parut le réveiller un peu plus. La douceur de ce début d'été apporta un peu de baume à ce cœur terrifié. Il se crut sorti d'affaire et ouvrit attentivement les yeux.

Désespoir...

- Quand est-ce que le cauchemar prendra fin ? Murmura-t-il d'une voix blanche en notant les ombres des arbres se redresser et venir l'entourer avec curiosité.

Entends cela, enfant : rien n'est rêves ici.
Tout est réalité et nous sommes vivants.
Vivants. Entends cela. Et faibles comme vent.
Faibles... Entends, enfant. Entends bien notre cri.

La voix venait de derrière, de la maison. Effrayé, le garçon se retourna pour découvrir que toutes les ombres qui occupaient quelques instants plus tôt sa chambre traversaient maintenant les murs de la maison et venaient vers lui.

- Alors, je deviens fou, se dit le garçon en tombant assis sur les fesses. Et la douleur de tout à l'heure m'a faussé l'esprit.

La lune ne bougeait pas, ronde et pleine dans le ciel. Mais le vent léger qui faisait s'effeuiller les forêts animait les ombres et leur donnait vie. Celles-ci paraissaient rire sous cape et s'approchaient toujours plus de l'enfant terrifié.

- Fou, répéta-t-il bêtement en se pinçant la peau pour bien s'assurer qu'il ne dormait pas. Fou.

Les trois nobles ombres se tenaient toujours devant lui, les seules, immobiles, à lui prêter une attention aiguë. Avec quelques couleurs, elles auraient pris l'apparence de trois vieillards, peut-être à longue barbe blanche. Leurs barbes étaient noires.

Et si la nuit n'avait posé son voile sur l'orée de ces bois, la foule derrière elles aurait pris des couleurs chamarrées aux formes bigarrées. Elle n'aurait pas autant terrifié l'enfant.

- Bougez pas ! Je veux pas vous voir. Juste, dodo, moi, s'écria-t-il en se redressant à demi.

Ses paroles étaient inutiles. Nul ne bougeait.

Envoyées jusqu'à toi, par les rêves et les mythes,
Nous attendons de toi que tu joignes nos rangs.
Ta destinée, enfant, te porte vers le Grand.
Et tu pourras rejoindre un poste dans l'élite.
Mais ai pitié de nous, faibles et malheureuses,
Maltraitées par le sort d'une vie désastreuse.

Qui parlait ? Les lèvres ne remuaient pas. Les regards, seulement, des ombres noires, paraissaient s'animer, presque scintiller. Quel était ce prodige ? Et ces vers qui coulaient tristement en une belle mélopée...?

Alors comme ce rêve étrange ou cette folie naissante persistait, comme l'enfant se voyait bien réveillé et en possession de tous ses esprits, il se mit à comprendre que tout ce qu'il voyait était peut-être réel. Le merveilleux existe. La magie sous ses yeux. Ce n'était peut-être pas un cauchemar alors ? La douleur avait-elle créé en lui ce fabuleux don ?

Une petite ombre lui fit un sourire et secoua sa main gentiment, comme pour lui rappeler de n'avoir pas peur d'eux. Puis, elle pointa son doigt sur l'horizon, indiquant le soleil qui se levait et les couleurs qui revenaient. Les couleurs...

- Qui parle ? Questionna le garçon. Qui fait ses rimes ? Est-ce que c'est l'un de vous ? Vous voulez que je vous rejoigne, c'est cela ?

Toutes les ombres opinèrent de la tête avec enthousiasme et désordre et de larges sourires naquirent sur les lèvres. Les trois meneurs s'avancèrent d'un pas et les vers reprirent, venant de nulle part et partout à la fois :

L'imagination débordante des enfants
Recrée et donne vie aux rêves oubliés.
Nous venons des légendes et des mythes passés.
Enfant, tu as le don de nous rendre vivants.

- Maintenant ? Interrogea-t-il avec quelque incrédulité.

Des sourires répondirent. Le soleil continuait de se lever. Et les ombres des légendes emportèrent avec elles l'enfant qui devait leur redonner vie.
Imagination enfantine toute puissante.

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Nouvelle écrite dans le cadre des joutes wattpadiennes. Voilà ce que nous devions faire :

 Voilà ce que nous devions faire :

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J'ai eu la première place.

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