Épisode 11 - RIP

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Vendredi 6 juillet.

J'appuie sur la détente. Je m'attends à voir une explosion bruler mes mains, à du sang sur mon corps déjà rougit par le celui de Catherine. Je m'attends à des hurlements. Mais rien ne se passe comme prévu. Le déclic se produit, mais aucune balle de sort du revolver. Je l'ai désormais en main et dépité je ne peux que constater qu'il est enraillé. Nora souffle de soulagement et tombe à terre. Ben continue de me figer comme si rien n'avait changé. Le temps reprend son cours devant nos yeux ahuris.

- Oh mon Dieu ! s'écrie Christine heureuse de voir Nora toujours vivante.

Je me dois de jouer la comédie et faire croire que je l'ai sauvée, même si intérieurement j'enrage que mon problème soit toujours présent.

- C'est bon, je réponds en montrant le revolver. Je l'ai !

Madie se met à pleurer de joie. Pour elles, tous nos soucis sont réglés. Nora n'est plus une menace. Ben est neutralisé. Il ne reste plus qu'à appeler la police et l'ambulance pour nous sortir de ce cauchemar. Mais c'est sans compter ma volonté. Moi, ce que je veux, c'est qu'on se rende dans ma nouvelle maison de campagne super équipée. Je sais qu'on en est loin et que je n'ai plus de véhicule, mais je vais trouver un moyen. Je trouve toujours un moyen.

Soudain, une explosion nous oblige à tous nous retourner vers la camionnette. Le capot a complètement sauté en morceaux. Il est en flamme. Anaïs hurle à l'aide.

- Il faut sortir Arkaig de là ! s'écrie-t-elle. Venez m'aider !

Nora ne peut pas bouger. L'émotion qu'elle a vécue l'oblige à rester couchée sur le sol. Elle est complètement traumatisée. Ben en fait de même. Il a retrouvé son calme légendaire qu'on redoute tant déranger. Christine nous dit qu'elle va s'occuper d'eux tandis que Madie et moi courrons vers la camionnette. L'explosion a réveillé Jelie et Isa qui sortent péniblement par l'arrière, toutes déboussolées. Lou semble toujours à l'intérieur et je comprends qu'elle doit être celle qui a succombé à l'accident. J'ai vu son corps complètement disloqué. Dommage, une victime en moins à faire souffrir !

Anaïs ouvre la porte du conducteur, mais Arkaig est trop lourd pour elle. J'interviens pour le tirer et Madie et elle m'aident à le trainer à quelques mètres de là. La chaleur est étouffante. Il est sûrement temps de s'éloigner du véhicule. Il ne va pas tarder à exploser complètement.

- Lou est toujours à l'intérieur ! s'écrie Isa encore paniquée.

- Elle est morte, rétorque Jelie sous le choc. Elle est morte...

C'est à instant que Madie semble avoir une idée lumineuse.

- Le sac de Nora ! déclare-t-elle fièrement. Il est encore dans la camionnette ! Il faut aller le chercher. Tous nos portables sont à l'intérieur. On va pouvoir appeler les secours.

- J'y vais, je réponds immédiatement.

- Non, la camionnette risque d'exploser rétorque-t-elle. J'ai pris des cours de secourisme avec les pompiers de ma ville. Je vais agir vite. Ne t'inquiète pas.

- Ne fais pas ça, Madie, c'est trop dangereux ! je réplique angoissé.

Elle ne m'écoute pas. La fille parfaite veut jouer les héroïnes et cela ne m'arrange absolument pas. Je ne peux pas la laisser faire.

- Madie ! je hurle. Tout va exploser ! Sors de là !!

Quelques mètres plus loin, Anaïs se met à pleurer.

- Elle va mourir ! s'écrie-t-elle choquée.

Isa et Jelie se sont éloignées de la camionnette, le risque étant trop grand pour sortir Lou de là. Terrifiées, elles sont allées rejoindre Nora, Christine et Ben.

Je n'ai plus le choix à présent. Je dois entrer dans cette camionnette. L'intérieur est déjà enfumé. Madie cherche après le sac de Nora et quand je rentre elle l'a en main. Je sens mon estomac se retourner.

- Je l'ai trouvé ! s'exclame-t-elle heureuse. On est sauvé !

Je ferme les yeux un instant et je revois Madie marcher tranquillement dans la rue avec un livre à la main. Elle a le sourire en bouche, elle est heureuse. Ça me fait mal de devoir mettre fin à sa courte vie. Je ne voulais pas que ça se passe ainsi. Mais je ne peux pas la laisser sortir de ce véhicule avec ces portables. Je la fixe alors du regard avec insistance.

- Je suis désolé, Madie. Mais tu ne sortiras pas d'ici avec le sac.

- Quoi ? s'enquit-elle dans un mélange d'incompréhension et d'inquiétude.

- Monsieur Henri Darmont, ton professeur de musique. C'est mon père. Vermont est le nom de ma mère que j'ai utilisé pour la scène. Je sais que tu ne comprends rien à tout ça et je suis désolé de ne pas avoir le temps de t'expliquer. Mais rien de ce qui arrive n'est un hasard. Tu n'étais pas dans ce groupe par hasard.

- Je... quoi... mais...

Je la vois vaciller pendant que je lui assène un coup sur la tête qui la fait immédiatement tomber au sol. Je lui prends le sac des mains et je le jette dans le feu à l'avant du véhicule. La fumée est de plus en plus épaisse, j'ai du mal à respirer. Je sors rapidement pour rependre mon souffle. Tout le monde est en expectative.

- Où est Madie ? demande Anaïs encore en pleurs.

- Elle s'est évanouie. Il y a trop de fumée. J'ai dû sortir reprendre un peu d'oxygène. Je vais la sortir de là.

Brusquement, des craquements à l'avant du véhicule annoncent une explosion plus grande.

- Attention ! hurle Anaïs.

J'ai à peine le temps de courir quelques pas. La camionnette explose complètement sous nos yeux choqués. Des morceaux de tôles et de vitres volent de toute part. Puis, soudain, on n'en croit pas nos yeux. Une torche humaine tente de sortir de ce qui reste du squelette du véhicule. C'est Madie, le corps entier mangé par les flammes, qui comme une étoile qui brille de mille feux pendant quelques secondes s'éteint nonchalante sur le sol.

En quelques minutes, nous venons tous de vivre des moments terrifiants. L'accident, les cris, la folie, l'horreur, les coups de feu.

Le sang. La mort. Rien que la mort.

RIP Madie, Lou, Catherine.

Qui sera le prochain ?

Jusqu'à la mortOù les histoires vivent. Découvrez maintenant