Épisode 28 - "C'est Alan"

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Lundi 9 juillet. 9 heures 30.

Le sort s'est acharné sur Nora. Elle était si heureuse d'avoir pu entrer dans la voiture et s'enfuir. Mais elle n'a su rouler que trois quarts d'heure avant de tomber misérablement en panne d'essence. Henri avait sûrement tout prévu ! Elle est restée coincée dans la voiture au milieu de nulle part toute la nuit. Effrayée, elle n'a pas osé continuer le chemin à pied. Elle commence à avoir soif. Son estomac crie famine. La peur la taraude et elle sent la fin s'approcher de plus en plus concrètement. Elle n'a toujours aucun moyen de contacter la police ou de demander de l'aide. Cette fois, elle est perdue. Désespérée, elle pose sa tête sur le volant tout en laissant couler ses larmes tel un torrent déchaîné. Il n'y a plus rien à faire. Alan a gagné. Il est le plus fort dans cette histoire.

Épuisée, elle finit par s'endormir. Puis, quelques minutes plus tard, alors qu'elle dormait à poings fermés, quelqu'un frappe légèrement sur la vitre de la voiture. Elle sursaute, surprise. Elle croit rêver. Ce n'est pas possible ! Elle est probablement encore endormie. Mais la personne ouvre la porte.

- Est-ce que ça va, madame ? Qu'est-ce que vous faites ici ?

Nora se frotte les yeux, encore un peu déboussolée par ce retournement inattendu. Puis, alors que le soleil l'aveugle légèrement, elle se rend compte qu'il s'agit d'un policier.

- Vous êtes de la police ? demande-t-elle presque euphorique.

- Oui, Madame. Tout va bien ?

- Non ! Ça ne va pas, répond-elle en sortant de la voiture. Vous devez absolument m'aider. Il y a des gens qui sont en danger. Alan Vermont les retient prisonniers dans sa maison de campagne. Il faut les sauver !

- Alan Vermont, vous dites ? Il est recherché par la police depuis vendredi. Il a été kidnappé par une femme. D'après les témoins, il s'agit du leader du fan-club d'Alan. Elle s'appelle Nora. Vous la connaissez ?

- Quoi ? Mais vous n'y êtes pas du tout, répond-elle en reculant d'un pas. Ce n'est pas ce qui s'est passé.

- Qui êtes-vous, madame ?

- Je vais vous expliquer.

- Votre nom, s'il vous plaît.

- Je m'appelle Nora, mais...

- Vous êtes en état d'arrestation. Vous avez le droit de garder le silence et de....

Le policer attrape les poignets de Nora et lui place les menottes presque aussitôt. Elle n'en croit pas ses yeux et ses oreilles. Cette situation est grotesque, mais elle n'a aucun moyen de pouvoir s'expliquer.

- Où va-t-on ? demande-t-elle à nouveau en larmes.

- Vous allez m'indiquer où se trouve la maison d'Alan Vermont.

- Vous n'appelez pas des renforts ?

- Des renforts ? dit-il en riant de bon cœur. Je n'ai pas besoin de renforts.

Perplexe, elle se laisse conduire jusqu'à la voiture de police où elle est jetée sur la banquette arrière comme un chien.

Jean-Yves Marchand, le chef de la police, a réussi à retrouver Nora. Et maintenant qu'elle est à sa merci, il va pouvoir s'occuper d'elle, exactement comme la mère d'Alan lui a demandé.

Lundi 9 juillet. 12 heures 30.

Je suis ligoté et bâillonné sur une chaise dans une des chambres de la maison. À côté de moi, Jelie a subi le même sort. Elle me regarde d'un air terrifié. Nous avons été démasqués. Rien ne se passe comme prévu. Nous sommes placés face à un lit matrimonial. Sur celui-ci git Arkaig, ensanglanté. Son corps commence à sentir et à se putréfier. Les fenêtres sont fermées, l'odeur est insupportable. Mais Isa l'a fait exprès. Elle veut que nous fassions face à nos péchés comme je l'ai mise face aux siens.

Le visage pâle et tiré, elle entre dans la pièce munie d'un long couteau de cuisine. Elle est dans une colère noire. Elle s'approche dangereusement de Jelie et pose délicatement la lame sous son cou.

- Alors, Alan. Tu as pris plaisir à détruire mon idylle avec Arkaig. Qu'est-ce que ça fait de voir sa chérie sur le point de perdre la vie, hein ? Qu'est-ce que ça fait ? hurle-t-elle.

- Dis-moi ce que tu veux Isa, et je te le donnerai.

- Tu sais ce que je veux ! Je veux la clé de Sol ! Donne-moi cette foutue clé ou je tue Jelie devant tes yeux !

- Tu as peur que tes petits secrets soient dévoilés au monde entier, n'est-ce pas ?

- Tu as assez joué avec moi, Alan. Maintenant, donne-moi ce que je veux ou je tue ta copine.

- Tu as épié notre conversation hier. Tu sais que Jelie m'a trahi et joue désormais cavalier seul. Je n'ai aucune raison de lui pardonner. Tu peux la tuer.

- Quoi ?

- Tu n'auras jamais ce que tu demandes, Isa. Tu mourras dans cette maison.

- Alors, tu mourras avec moi !

- Vas-y, tue-moi. De toute façon, c'est comme ça que ça doit se terminer. Je n'ai pas peur de la mort.

- Tu es un grand malade. Et Jelie l'est aussi. Comme tous ceux qui t'ont suivi dans cette maison. J'imagine que c'est pour ça qu'on est tous là, pour expier nos péchés ?

- Les tiens sont plus lourds que les dix réunis.

- Je n'ai que faire de ton jugement. Je veux juste quitter cette maison maudite avec mes secrets.

- Jamais ! je hurle tout en riant. JAMAIS !

- Alors, si c'est ainsi, tu ne me laisses pas le choix.

Isa respire un grand coup. Jelie se met à hurler de terreur. Elle sent la mort s'approcher. Mais c'est moi qu'Isa veut tuer maintenant. La lame de son couteau frôle lentement mon cou. Elle tremble, mais elle est déterminée. Soudain, je sens une tristesse m'envahir. Ce n'est plus le visage d'Isa que je vois près du mien, non, c'est celui de ma mère. Elle me déteste, elle passe son temps avec une autre famille. Elle me méprise. Elle me veut du mal. Je ne peux empêcher mes larmes d'échapper à mes yeux et de couler sur mes joues froides. Je n'ai pas peur de mourir. J'en même envie. Je veux juste arrêter de souffrir.

Mais soudain, un coup de feu retentit dans la pièce. Le couteau se dérobe inopinément de ses mains et tombe au sol avec Isa. Ben est venu me sauver. Il a réussi à se détacher des liens noués par Isa et il est venu me sauver. Avec l'arme de son frère, il a tiré un coup de feu. La balle a perforé le dos d'Isa qui s'est effondrée immédiatement.

- Elle est morte. Enfin, déclare Ben froidement. Je ne supportais plus sa voix agaçante.

Je ne peux plus m'arrêter de pleurer. Comme un enfant. Ben enlève mes liens et ceux de Jelie. Il a la pudeur de ne rien me demander. Je tombe à terre, au milieu de mes larmes et du sang d'Isa. Je ne sais pas quelle est cette émotion qui m'emporte, mais je ne la contrôle plus. Tout devient soudainement bien trop difficile à gérer. Tout devient flou dans mon esprit. Et puis, d'un coup, un trou noir m'envahit. Pendant quelques secondes, je ne sais plus où je suis.

Je ne sais plus qui je suis.

Quelques mètres plus loin, couchée depuis des heures dans sa chambre, Anaïs ouvre enfin les yeux. À son chevet, Christine lui tient la main. Les cheveux ébouriffés, le regard vide, et le visage noirci par la douleur, elle se balance lentement d'un côté à l'autre.

- Christine ? demande Anaïs encore dans le brouillard.

- Tu dois me dire ce qui s'est passé. Je t'en supplie. Dis-moi qui a tué mes enfants. Je t'en supplie.

Tant bien que mal, Anaïs tente de se relever. Les souvenirs refont alors surface. Les révélations d'Alan la percutent. Elle se revoit descendre les escaliers avec lui. Puis, les enfants, il les tire vers la piscine et il la force à regarder la scène. Il est furieux. Il maintient leur tête dans l'eau. Ensuite, il prend un couteau et il coupe les veines de ses poignets.

- Je t'en supplie, réitère Christine.

- C'est Alan. C'est Alan qui a tué tes enfants. C'est Alan... dit-elle paralysée par le dégoût et l'effroi. C'est Alan...

Jusqu'à la mortOù les histoires vivent. Découvrez maintenant