4 - Le palais flottant

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« Pourquoi moi ? »

Orion sembla réfléchir quelques secondes en caressant doucement les cheveux du plus jeune. Il regarda le mur, un mur qu'il avait si souvent observé pour encrer dans son esprit, l'image, cette magnifique image de celui qu'il aimerait toujours.

« Parce que tu es né pour ça. Parce que tu es sans aucun doute la seule personne à pouvoir me plaire et à pouvoir porter mon enfant.
- Porter votre enfant... Mais qui dit que j'en ai l'envie ?
- Je le sens. Au fond de toi tu veux savoir ce que ça fait. Tu as vu une femme, un esclave tomber enceinte et accoucher. Tu t'es dit, au moment de son accouchement, que ça aurait dut être toi. Non seulement parce qu'elle souffrait et que tu avais pitié mais aussi parce que tu as eu, pendant un infime instant, l'envie de savoir ce que ça faisait de sentir cette vie en toi et d'entendre les premiers pleurs de ton enfant. »

Leo ne sut quoi répondre à cette déclaration. Il avait perdu tous ses mots et se recula simplement du corps du dieu sans répondre.

« Tu sais que j'ai raison...
- Je veux retourner dans l'endroit où je me suis réveillé. Je... Je veux me reposer, s'il vous plait. »

Le noir de peau considéra sa demande et souffla discrètement avant d'acquiescer.

« Bien. Je vais t'y ré-emmener. »

Encore une fois, le silence régna durant leur marche. Jusqu'à ce que, comme un temps avant, Leo posa sa main sur le mur invisible et se tourna vers son dieu.

« Je vous ai demandé plusieurs fois mais vous ne m'avez'pas répondu. Où sommes-nous ?
- Nous sommes sur Onhar. Mon palais.
- Pourquoi on ne peut pas sortir ?
- On peut sortir, mais pas par là. A moins que tu veuilles faire une chute de cinquante mètres tout droit vers le sable.
- Oh... Attendez, quoi ? Une chute de cinquante mètres ? Mais comment c'est possible ? »

Orion rit d'un seul coup en le regarda avec des yeux tendres.

« Il se trouve que mon palais ne sait pas ce que veut dire le mot gravité. Il vole si tu préfères. Je peux me déplacer à ma guise comme ça.
- Mais, on doit vous voir à des kilomètres, pourquoi je ne vous ai pas vu en marchant, moi ?
- Le... Mur que tu touches est une barrière, non seulement il permet aux imprudents de ne pas tomber mais en plus, il nous cache des esprits malveillants. Les gens qui vivent ici en ma compagnie sont sous ma responsabilité, je leur ai promis la sécurité. »

Le blond n'en croyait pas ses oreilles, il était en train de survoler le désert sur un palais flottant. Il n'arrêtait pas de se poser la question : Il était vraiment en vie ? N'était-ce pas juste un rêve ? Ou le monde après la mort ?

Ils reprirent leur marche et arrivèrent finalement à l'espèce de chambre. Le lit n'avait pas bougé mais il était refait et de nouveaux fruits étaient posés sur une petite table en pierre.

Orion s'éclipsa finalement en laissant son protégé seul. Leo alla s'assoir sur le matelas dans le plus gros silence et passa ses bras autour de ses jambes à présent repliées.

Il n'y croyait toujours pas.

Il pouvait réellement porter un enfant en lui ?

Sa main vint d'elle-même se poser sur son ventre. Il tendit à nouveau ses jambes pour regarder celui-ci.

« Par où il doit sortir, sérieusement... ? »

Le blond attrapa ce qui ressemblait à une grappe de raisin et en prit quelque grains en tournant sa tête vers l'horizon. La pièce étant ouverte sur le paysage du palais, puis, au fond, laissait apercevoir le désert.

Ce même désert qui avait failli l'engloutir. Faire sa mort, bien que celle-ci ne puisse surement pas affecter quelqu'un, tout comme sa disparation. Peut être que certains esclaves s'en voulaient de l'avoir laissé là, seul et abandonné... ? En tout cas s'il y a bien quelqu'un qui semblait beaucoup se préoccuper de sa vie, c'est ce... « Dieu ».

Orion était un être bizarre. C'est comme s'il l'aimait autant que sa propre vie. Il ne cessait de lui donner des noms intimes, des noms qu'on ne donnait normalement qu'à notre mari, ou à notre femme. A une personne dont nous étions épris. Alors qu'ils ne se connaissaient à peine ! Leo ne savait pas qui il était quelques minutes auparavant et cet homme l'appelait déjà 'mon tendre'. Ce n'est pas comme s'il était moche mais il n'était pas non plus éperdument amoureux, il ne le connait pas !

Alors que c'était la première fois qu'ils se rencontraient.

Leo se laissa tomber sur le matelas, sa tête reposant sur l'oreiller alors qu'il continuait ses réflexions dans le silence accompagné par le bruit de gouttes qui tombent.

~°~

« Mon seigneur ? Il est l'heure de dîner. »

Leo se retourna vers la belle brune qui l'avait amené au dieu tantôt. Seshat lui sourit un peu en prenant un peu d'eau dans le petit bassin. Elle en mit sur ses mains et mouilla doucement les cheveux blonds de l'ancien esclave qui ouvrit enfin la bouche.

« Que fais-tu ?
- Je mouille vos cheveux. Je vais les démêler et les coiffer. Ça fait tellement longtemps que vous ne l'avez pas fait... je pense que je vais devoir les couper s'il y a trop de nœuds.
- Vas-y. De toute façon, je les trouve bien trop long. »

Obéissante, l'égyptienne prit une sorte de brosse à cheveux et commença à la passer dans les mèches blondes avec douceur, sortant de temps à autre, un couteau très fin mais néanmoins coupant, pour justement couper ces mêmes mèches, bien trop dures à démêler.

« Comment es-tu arrivée ici ?
- J'ai prié le maître. Je voulais partir de mon ancienne vie, je n'y étais pas heureuse.
- Ah non ?
- Non, je n'avais pas la vie que je voulais mener. Je voulais vivre dans un palais comme celui-ci. Pas en tant que princesse ou reine, non, rien qu'en servante, je voulais être utile et servir à quelque chose. C'était toute ma vie avant de marier.
- Ton mari n'était pas aimant ?
- Non... Il ne pensait qu'à l'argent... Il m'a épousé seulement pour pouvoir satisfaire ses besoins, le ménage et que sa famille ne l'oblige pas à faire un mariage forcé avec une femme désobéissante.
- Tu as bien fait de partir dans ce cas. Il n'était pas fait pour toi, tu méritais largement mieux. »

Seshat sourit tendrement devant la compréhension du jeune homme et rangeant le petit couteau, se concentrant sur le démêlage des cheveux de son invité, maintenant presque courts, tombant simplement sur sa nuque et ses omoplates et non sur son dos jusqu'à ses hanches.

« Je vous les laisse assez long pour faire une belle queue de cheval basse. Ça vous va tellement bien. »

Leo sourit un peu. Il se retourna vers elle quand elle eut finit et la regarda ranger tout son matériel de coiffure. Elle était apparemment équipée. Avant qu'il ne puisse ouvrir la bouche, elle passa derrière lui pour faire cette dite queue de cheval et mettre une pince avec un bel éléphant en or.

« Vous vouliez dire quelque chose, mon seigneur ?
- Seshat, c'est le nom d'une déesse, non ?
- La déesse de l'écriture, oui.
- Tu écris ?
- Écrivais, plutôt. Quand j'étais plus jeune, je voulais être cette déesse mais j'ai eu trop peu d'éducation. Je ne sais pas écrire grand-chose si ce n'est quelques phrases de présentation, mon nom et l'alphabet.
- Oh, je vois. »

Leo passa sa main sur la pince dans cheveux et lui sourit. Déterminé à trouver des réponses à ses nombreuses questions au près de ce dieu qui le considérait comme son amant et son amour.

« Allons diner. »

-daddy🍭

Réécrit le 12/07/2019.

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