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Justin pdv

Je regarde Ester tenir Kalista dans ses bras et je pense à Daphné et à notre bébé qu'elle ne verra pas grandir. Une grande tristesse m'oppresse en la voyant bouger dans les bras d'Ester. Son visage tournée vers elle, elle s'agite et la touche du bout de ses petits doigts. Ester sourit, heureuse de pouvoir la tenir. Depuis la dernière fois, je trouve que Kalista a profité. Je me dis qu'il est peut être possible qu'elle sorte, bientôt je l'espère. Je sens une lueur d'espoir se former dans mon cœur et je veux voir la nourrice pour en avoir le cœur net. Si tel est le cas, Kalista pourra partir avec moi et elle viendra avec moi, oui mais où ? Au loft ? Soudain je me pose des questions sur notre devenir et Ester voit mon état changer. « Justin que se passe-t-il ? Tu sembles ailleurs ? Regarde ta fille comme elle est belle ? » Me dit-elle tout sourire. « Oui elle a changé. Je me demandais si justement elle pouvait sortir...et où irions-nous ? ». Ester lève les yeux sur moi, concernée par mon interrogation. « Tu n'en as pas parlé à Brian ? » me demande-t-elle hésitante. J'inspire et je n'ose pas vraiment lui avouer que je ne pensais pas élever cet enfant. « Tout a été si soudain...je n'ose pas lui imposer Kalista ». « Je comprends...tu as toujours l'appartement où vous habitiez ? » me dit-elle. Je n'y avais pas vraiment pensé mais en même temps, je ne sais pas si j'en serai capable. Nous avons partagé de bons et de mauvais moments dans cet appartement. Pour ma part, je ne m'y sens plus chez moi, je ne me vois pas y vivre sans Daphné. « Je ne crois pas que ce soit une bonne idée. Il va falloir surtout que je m'attelle à le vider de ses affaires... ». Ester verse une larme en repensant à Daphné. « Tu pourras y venir récupérer ce que tu souhaites » je lui dis compatissant. « Merci Justin » me dit-elle puis se remet à dorloter Kalista. Je décide de sortir pour demander à l'infirmière quels sont les progrès de ma fille et quand je peux espérer l'emmener avec moi. Je me dirige vers le bureau au bout du couloir et je demande des informations sur l'état de santé de ma fille. L'infirmière me signale en souriant  qu'elle reprend du poids et qu'elle semble hors de danger. Elle pourra bientôt sortir si j'en fais la demande mais je dois tout d'abord en parler au pédiatre qui la suit. Je laisse l'infirmière et je retourne vers la couveuse. Ester me demande ce qu'il en est et je peux enfin lui annoncer la bonne nouvelle sans éprouver le poids de l'inquiétude dans mon cœur. Après encore un moment à profiter de Kalista, Ester décide de me laisser un peu d'intimité. « Tu devrais aller te reposer » me dit-elle compatissante. « Hum ? » je dis en hochant la tête. « Je sais mais je dois parler au médecin tout d'abord, après promis j'appelle Brian pour qu'il vienne me chercher ». Elle semble hésiter avant de partir, « Justin...je n'ai pas osé te poser la question, mais...c'est quand la cérémonie ? ». Je rougis honteux d'avoir oublié de lui en parler, « heu en fait je dois m'en occuper mais avec Kalista j'ai malencontreusement oublié d'aller voir les pompes funèbres... ». « Si cela ne te dérange pas, j'aimerai beaucoup m'en occuper...j'ai envie de le faire tu comprends ? ». Mon cœur se serre à cette demande, je n'y avais pas pensé mais c'est évident qu'elle le veuille ! « Bien sûr Ester, Tu aurais dû me le dire avant...Je suis content que tu puisses t'en occuper au contraire » dis-je ému. Elle me sourit un peu « merci Justin...je t'appelle dès que j'ai tous les éléments », puis me laisse seul avec ma fille.
Il a fallu peu de temps avant que ma fille s'endorme. Je l'ai installé dans son berceau, puis après m'être assuré qu'elle soit paisiblement installée, je ressors à nouveau en quête du médecin. Je ne m'étais pas rendu compte du temps qui a passé et le médecin est finalement arrivé. Je tape à son bureau. Un « entrez » se fait entendre au travers de la porte. Le médecin s'est levé et me serre la main, « Docteur, je suis le père de Kalista et je voulais connaitre ses progrès et quand je pouvais espérer la ramener à la maison ? ». Le docteur concerné acquiesce à chacun de mes mots comprenant mon impatience sans doute, « hum oui effectivement, Kalista s'est remise assez bien et je suis confiant qu'elle puisse sortir bientôt ». Dit le médecin. J'accuse le coup déçu qu'elle ne puisse pas sortir tout de suite, « mais si tout va bien pourquoi la garder ? » je demande. Il me sourit devant mon impatience et mon manque de compréhension, « je comprends que vous soyez frustré de ne pas pouvoir avoir votre enfant avec vous, et surtout dans ces moments difficiles. Mais il faut bien comprendre que son état est encore fragile et que nous devons nous assurer qu'elle soit dans un processus de prise de poids, au-delà des complications liés à sa pré natalité. Ses poumons sont à peine formés et elle doit encore prendre des forces pour affronter son nouvel environnement. Il faudra être vigilant à l'endroit où vous compter la coucher, éviter les courants d'air et d'être en contact avec des personnes ou des animaux ». « Oui je comprends » je réponds un peu déçu en fronçant les sourcils. « Je suis sans doute naïf mais j'avais espéré pouvoir l'emmener aujourd'hui » Dis-je. Il me sourit puis se voulant rassurant il ajoute « si Kalista continue à progresser dans le bons sens, je pense pouvoir vous dire que d'ici la fin de la semaine, elle sera prête à partir, mais sous certaines conditions ». Étonné, je lui demande qu'elles sont-elles. « Et bien tout d'abord il faudra qu'elle soit sous surveillance constante, et qu'une infirmière passe la voir tous les jours. Il lui faudra comme je vous l'indiquais un environnement adapté, une chambre peu exposée au courant d'air et bien régulée en termes de température. Le prochain mois est primordial dans la continuité de sa croissance ». A ces mots je comprends que mon enthousiasme était égoïste et que je n'avais pas pensé à tout ça. Elle ne pourra pas venir avec moi chez Brian. Je me demande ce que je vais faire et comment procéder, « je vous remercie docteur «  dis-je en lui serrant la main pour prendre congé de lui. Je ressors déçu et dépassé par les évènements. Je suis soulagé qu'Ester s'occupe finalement des obsèques parce que je dois trouver une solution pour ma fille et cela accapare mon esprit. Je dois en parler avec Brian. Je décide d'aller voir Kalista encore un instant puis rassuré je ressors de l'hôpital. J'envoie un message à Ester pour le lui dire, puis j'appelle Brian pour lui demander s'il peut passer comme promis. Je ne sais pas si cela va lui poser un problème. J'hésite avant d'appuyer sur le bouton. Il m'a fait comprendre qu'il avait du travail ce que je comprends. Ce n'est peut être pas le moment de le déranger. Mais d'un autre côté je dois lui parler de Kalista et de ce que m'a dit le médecin. J'appuie sur le bouton et mon cœur se serre avant qu'il  décroche. « Hey »,
« Hey » je réponds puis un blanc s'installe. « Est ce que tu peux passer me récupérer où je dois prendre un taxi ? » je lui demande. Je l'entends respirer et je ne saurai dire ce qu'il éprouve en cet instant, « Tu as des nouvelles ? »,
« Heu oui, il faut qu'on parle Brian...j'ai vu le médecin et j'ai besoin de t'en parler ».
« Ok, je passe te chercher, tu ne vas pas prendre un taxi... »,
« Ça ne me dérange pas, vraiment...je peux me débrouiller ».
« Ecoute je passe te chercher puis on rentre au loft discuter. En passant je prends quelque chose pour le petit déjeuner, ça nous fera du bien de manger un morceau, tu dois avoir faim. On a eu une nuit plutôt courte tu ne crois pas ? ». Je ne réponds pas tout de suite mais je suis d'accord avec lui. « Ok Brian, je t'attends devant l'hôpital ».
Quelques instants qui m'ont paru interminables, cependant à ruminer dans ma tête comment lui présenter la chose, et puis soudain, la voiture s'avance devant moi et je sors de mes pensées pour mieux rentrer dans l'habitacle où Brian m'attend. Il s'engage rapidement sur la route sans un mot. Je sens la tension palpable en cet instant précis et je me demande comment je vais m'en sortir. Je repense à ma fille et je sais que je n'ai pas le choix. Nous arrivons au loft. Il récupère les pâtisseries qu'il a achetées en passant me prendre, puis nous nous dirigeons vers le monte charge. Dans l'ascenseur Brian s'approche de moi et me caresse le bras, visiblement concerné par mon mutisme. « Tout va bien ? » inquiet sans doute que je doive lui annoncer quelque chose de grave sur l'état de santé de Kalista. « Oui elle va bien » je lui réponds pour le soulager. Nous rentrons dans le loft et nous nous débarrassons de nos affaires. Brian se dirige vers la cuisine et je le suis. Il prépare du café et je m'assoie au comptoir épuisé d'avance par la bataille qui s'annonce. Il m'observe du coin de l'œil n'osant pas me brusquer. Je ne peux pas rester sans rien faire alors je l'aide à sortir les pâtisseries de la boite. « Hum je vois que tu es passé chez La Gourmandine* ». En ouvrant le paquet, l'odeur des brioches et autres viennoiseries me font saliver. Je les sors délicatement puis je les pose sur un plat. Brian nous sert à présent le café et je m'assoie de nouveau appréhendant de devoir lui parler. Affamé, je mords allègrement dans une brioche au sucre reculant ainsi l'échéance en ayant la bouche pleine. Brian me regarde en sirotant son café chaud. Puis n'y tenant plus il me demande enfin ce qu'il en est. « Alors Justin de quoi voulais tu parler ? ». Je termine d'avaler ma brioche puis je prends une gorgée de café et je me jette enfin à l'eau. « De Kalista. Le médecin m'a dit qu'elle prenait du poids et qu'elle semblait être sur la bonne voie ». « Hum hum » me répond Brian suspendu à mes lèvres, « c'est plutôt une bonne nouvelle tu dois être soulagé » me dit il. J'acquiesce mais sans conviction. « C'est plutôt une bonne nouvelle  » me dit-il, « alors c'est quoi le problème Justin ? ». Je me sens découvert ne pouvant plus feindre de ne pas savoir.
« Il a parlé également de l'après où elle devra être ».
« Précise, je ne comprends pas ce que tu veux dire » me dit Brian. J'inspire et je tapote nerveusement la cuillère de mon café, « Il m'a dit qu'il lui fallait un lieu propice pour qu'elle n'ait pas trop de courant d'air et qu'elle soit toujours surveillée, du moins le prochain mois. C'est important Brian ». Il me regarde sérieusement et je n'arrive pas à déchiffrer ce que ses yeux veulent me dire. Je ressens un immense vide autour de moi et de l'affolement à l'idée de me retrouver seul avec ma fille. Nos regards sont tendus et nous ne bougeons pas d'un pouce. Le bruit que fait ce silence est ahurissant. J'ai l'impression qu'il me soupèse et m'évalue. Je ne me suis jamais autant senti vulnérable qu'en cet instant. Je sais que je lui en demande beaucoup en m'imposant ainsi avec cet enfant. Il n'a jamais été un homme de 'famille' je dirai. Son enfance et sa vie jusqu'à lors ont forgé son mental et sa force, et ont fait de lui aujourd'hui ce qu'il est. Le son de sa voix me ramène dans ma réalité, « qu'est-ce que tu proposes ? ». Je ne réfléchis pas tant avant de lui répondre, « je voudrai qu'elle vienne avec moi, qu'elle ait sa chambre. Mais si cela suppose que ce ne soit pas ici...avec toi...je ferai ce que je dois faire pour elle » dis-je sans regret.

Il y a 20 ans...20 ans aprèsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant