Ça fait un mois aujourd'hui que Khalil est malade et on ne sait pas ce qu'il a en réalité.
Je ne saurai décrire ce que j'ai ressenti quand j'ai reçu le coup de fil de sa maman.
-allo Yaka, Khalil est malade. On est à l'hôpital et il te réclame.
La route qui me mena à l'hôpital fut longue, tellement longue que j'ai cru que je n'arriverai jamais.
En sortant, je n'ai même pas fait attention à ce que ma mère disait. Je lui ai tout juste dit que Khalil était malade et que si elle voulait que je n'y aille pas, elle n'avait qu'à me tuer.
J'ai retrouvé sa mère qui m'attendait devant la porte de l'hôpital pour m'amener à lui.
En une nuit, Khalil avait complétement changé et surtout il était devenu très pâle. On aurait dit qu'il était anémié. Lorsqu'il ouvrit les yeux et me vit, il s'efforça de me sourire, ce qui fit couler mes larmes. Je ne pouvais me retenir.
-hey princesse, je vais bien. J'ai juste eu des maux de ventre violents et maintenant ça va. Ne t'inquiète surtout pas. S'efforça t-il de dire.
Sa maman m'a dit qu'il l'avait appelé vers sept heures du matin, ne pouvant même pas parler correctement. Elle avait appelé une ambulance et avait accouru. Elle l'avait trouvé plier sur ses genoux, incapable de bouger et se tordant d'atroces douleurs au ventre. Il a perdu connaissance avant d'arriver à l'hôpital. Les médecins avaient dit qu'il avait eu une indigestion due à quelque chose qu'il avait sûrement mangé. Et ce qu'il avait mangé en dernier, c'était une pizza aux fruits de mer, en discutant avec moi au téléphone.
Donc, le lendemain, on le laissait sortir. Il est resté alité pendant trois jours, durant lesquels j'étais tout le temps à son chevet, ne le quittant que pour aller dormir chez moi très tard.
Puis il avait repris le boulot et quelques jours plus tard, les douleurs avaient recommencé et on avait fait le tour des hôpitaux de Dakar. On avait fait tous les examens possibles, cliniquement Khalil allait bien. Mais il se plaignait de douleurs atroces, on lui avait donné des antalgiques qui n'avaient fait aucun effet.
Je ne supportais plus de le voir souffrir. Je ne le quittais plus et avec ma mère, c'était devenu très tendu car un jour, Khalil allait tellement mal que je n'ai pas voulu le laisser et j'ai dormi là bas et sa mère m'avait dit que c'était le seul jour où il avait dormi la nuit durant depuis qu'il était malade car les autres nuits, il gémissait et me réclamait toute la nuit. Je ne savais plus quoi faire, j'aurai donné ma vie pour que Khalil ne souffre plus.
Cette semaine, il allait beaucoup mieux et commençait même à s'alimenter.
-Khalil, il faut que tu te battes, que tu te rétablisses parce qu'on doit se marier, je dois te donner des enfants et tu dois construire notre maison. Rappelle toi, tu me l'as promis.
Il me regarda et me fit un sourire si tendre
-je tiendrai ma promesse ma Rokhaya. Je vais aller mieux bientôt et tu seras ma femme. Je vais déjà mieux, ne vois tu pas?
Et comme promis, il a commencé à aller mieux car sa grand mère avait fait venir un guérisseur de la Casamance qui lui a coûté les yeux de la tête, mais ça en valait la peine.
On avait fait les aumônes qu'il nous avait conseillé, les uns plus compliqués que les autres, on avait acheté un boeuf qu'il avait immolé, des séances de récital de Coran avait été organisé. Ça avait été la première étape de sa guérison car pour qu'il soit complétement tiré d'affaire, il fallait qu'il aille dans le village du guérisseur lorsqu'il aura assez de force pour voyager. Il lui avait donné des bains et Khalil s'était levé et avait commencé à se promener dans l'appartement avec un déambulateur bien qu'il lui était difficile de manger des aliments solides ou chauds. Je revivais avec lui, je reprenais des couleurs et commençait à avoir de l'espoir.
Inquiète de mon état et de ne plus me voir, maman avait demandé à Fatima de l'amener chez Khalil. Quand elle l'a vu, elle a pleuré de chaudes larmes, me demandant pardon de s'être opposée à notre relation. Elle venait par la suite voir si elle pouvait aider, ce qui la rapprocha de la maman de Khalil.
Puis son papa est venu, il fallait qu'on l'amène à Ziguinchor. J'ai surpris une conversation entre lui et la maman de Khalil. Celle ci avait l'air très perturbée et remontée contre son mari.
Que se disaient-ils?
Je n'avais aucun moyen de le savoir car ils parlaient en socé et j'aurai tout donné pour comprendre leur langue et savoir ce qui se passait car ça avait un rapport avec la maladie de Khalil. Puis j'ai retrouvé sa maman dans sa chambre et lorsqu'elle me vit, elle essuya ses larmes.
-Yaka, demain on amène Khalil à Ziguinchor et il va falloir que tu sois forte car je sais que cette séparation va être très dure pour toi surtout avec son état. Mais je te promets qu'il va aller mieux et te revenir bientôt, vous vous marierez et tu vas me donner ce petit mari que tu m'as promis. Promets moi stp d'être forte.
-maman, je veux venir avec vous. Stp, laisse moi venir car je ne supporterai pas cette angoisse, savoir qu'il est malade et ne rien pouvoir faire.
-tu sais trèsq bien que ta maman ne te laissera j...
-elle va comprendre maman, je suis assez grande pour assumer ce que je fais et ma place est avec Khalil, l'interrompis-je.
-si tu l'aimes, ne désobéis pas à ta maman. Khalil a besoin de quiétude et te faire venir à Ziguinchor contre la volonté de ta mère ne fera qu'empirer les choses entre toi et elle et ça va déteindre sur lui.
J'abdiquais et rentrais chez moi pour revenir le lendemain afin de lui dire au revoir.
Je suis arrivée à l'aube, j'avais quitté chez moi vers 5h du matin. Je trouvais Khalil qui priait debout et je fus heureuse de le voir ainsi car ces derniers temps il lui était impossible de se tenir debout longtemps et pour marcher, il avait un déambulateur car il était encore faible. Donc le voir ainsi me redonna beaucoup d'espoir quand au fait de le revoir un jour me porter dans ses bras pour m'amener dans notre lit conjugal.
On prit le petit déjeuner avec sa mère et lui, son papa avait prétexté ne pas avoir faim mais en réalité, depuis qu'on s'était revu, il s'était installé une sorte de gêne entre nous, il m'avait salué normalement sans me regarder dans ses yeux et je voyais dans ses gestes tout un tas de regrets quant au mariage de Khalil. Mais pour moi c'était le passé et je regardais désormais vers l'avenir, la guérison de Khalil et notre vie ensemble.
Il fallait partir maintenant, il était 18h et le départ était prévu à 20h. Khalil m'attira dans sa chambre.
-Rokhaya, tu sais que je t'aime n'est ce pas? Alors ne l'oublies jamais car ça va te permettre d'être forte le temps que je revienne.
-mais pourquoi vous me demandez tous d'être forte? Khalil, tu me fais peur.
-parce que pour moi ça va être difficile de passer ne ce serait qu'une journée sans toi alors j'imagine ce que ça va être pour toi de passer une semaine sans moi. Je t'appellerai tous les jours pour te donner des nouvelles et dés que je me sentirai mieux je courais vers toi.
Il me serra très fort dans ses bras puis dans son regard, en une fraction de seconde, je lus une lueur qui me glaça tout le sang et j'eus tellement peur que mon coeur s'arrêta pendant un instant.
-maintenant, tu vas me faire le plaisir de t'alimenter et de prendre des kilos parce que je ne veux pas d'une maigrichonne comme femme, m'avait-il dit en m'embrassant sur le front.
Après leur départ, je suis restée encore à l'appartement. Il m'avait laissé les clés. Je suis restée scotchée sur le fauteuil je ne sais combien de temps, le regard dans le vide et le cerveau en nage. Je n'étais pas capable de retenir la moindre petite chose, sinon le retour de Khalil. Il venait de partir et j'avais l'impression que c'était il y a mille ans. Mon coeur se serra et je ressentais tout le poids du monde sur mes épaules. Surement dû au stress. Puis je suis rentrée à la maison, fatiguée et incapable de parler tellement j'avais le moral à zéro. Et pour la première fois depuis que Khalil était tombé malade, j'ai dormi dés que j'ai posé la tête sur l'oreiller.
Normalement, ils devaient être arrivé à Ziguinchor vers 11h. Je m'étais réveillée vers midi, pas une seule fois de la nuit, je n'ai senti la moindre petite chose. Je pris mon téléphone pour voir s'ils avaient appelé mais rien. Je décidais de rappeler après ma douche.
-Yaka, nous sommes bien arrivés, tout va bien. Je te rappelle dés que possible. Click
C'était tout ce que j'ai eu de la maman de Khalil. Et elle ne m'a même pas laissé parler, moi qui voulais juste entendre sa voix. je décidais de l'appeler sur son téléphone, peut être qu'il prendrait. Il sonna en vain puis bascula vers la messagerie vocale
《Salut! C'est Khalil, laissez moi un message. Je vous rappellerai》.
A mille reprises, j'avais rappelé sa mère, sa sœur mais rien. Personne ne répondait. Puis je commençais à paniquer.
Fatima est venue un peu plus tard et ma mère m'appela. Tout mon corps se mit à trembler et je souris en regardant Fatima.
-c'est Khalil? Il est mort? dis-je avec détachement et apathie comme si la personne dont je parlais m'étais inconnu et habitait à l'autre bout de la terre.
Fatima commença à pleurer suivie de ma mère.
-donc vous êtes sérieuses? Khalil est vraiment mort?...Non…il a promis qu'il reviendrait. Khalil allait beaucoup mieux hier soir quand on s'est quitté. Fatima dis moi juste que c'est une blague. Attendez, attendez dis-je en prenant mon téléphone et en composant le numéro de Khalil et tout ceci dans le plus grand des calmes.
《Salut! C'est Khalil, laissez moi un message. Je vous rappellerai》.
-vous voyez? Ça c'est la voix de Khalil et il a éteint son téléphone juste parce que dans le village où il est allé se soigner il n'y a pas de réseau. Sa maman me l'avait même dit pour au cas où je n'arriverai pas à les joindre et je viens de l'avoir au téléphone elle, dis-je comme pour me convaincre que tout ce qui se passait n'était pas vrai.
-Yaka, je sais que c'est difficile mais il va falloir que tu sois forte. Khalil est décédé cette nuit dans le bateau en allant à Ziguinchor. C'est sa maman qui m'a appelé très tôt ce matin, tu dormais et elle ne savait pas comment te l'annoncer. J'ai appelé Fatima pour te soutenir.
-je n'ai pas besoin de soutien maman, j'ai juste besoin de Khalil et il va revenir, il l'a promis et il a toujours tenu ses promesses, dis-je en retournant dans ma chambre.
J'attendais l'appel de la maman de Khalil ou le sien même. Khalil allait appeler ou sa maman, pour me dire qu'il avait eu soit une panne de réseau soit un problème de charge.
J'étais assise sur mon lit, la tête posée sur mes genoux repliés, le regard vitreux.
-Yaka, stp réagis. Tu ne peux pas rester comme ça sans rien dire et sans pleurer. Pour l'amour du ciel Yaka réagis me dit Fatima en pleurs.
J'ai passé la nuit dans cette position guettant l'appel qui viendrait sauver mon âme de la dérive. Maman vint me tendre son téléphone alors que j'avais le mien à la main.
-tiens, réponds.
Elle s'assit à côté de moi comme si elle avait peur de ce que j'allais entendre ou comment j'allais réagir en attendant ce que la personne allait me dire.
-Ma Yaka, dit la maman de Khalil de l'autre bout du fil. Je ne pense à personne d'autre qu'à toi car tu es la seule qui aie perdu Khalil. Il s'est étend durant le voyage, vers trois heures du matin. J'aurai aimé que tu le vois avant qu'on ne le mette sous terre mais ce sera impossible. Sois courageuse ma fille et prie pour lui. Il est parti en paix, sois en sûre et il n'a pas souffert. Il est mort la tête posée sur mes genoux et en parlant de toi et de tout l'amour qu'il avait pour toi.
J'ai alors commencer à ne plus sentir mes jambes pour commencer, puis j'eus l'impression que la terre se dérobait sous mes pieds et que j'étais dans un tourbillon puis ce fut le trou noir....
ZIGUINCHOR…MOSQUEE DU QUARTIER NEMA 2
Point de vue externe
-il est hors de question que vous assistiez à la prière mortuaire de mon fils, vieux démon. Sortez d'ici. Tout ceci est entièrement de votre faute, dit le père de Khalil en s'adressant au grand père de Farimata qui restait imperturbable.
-Malang, tais toi. Tout le monde te regarde. Respecte la dépouille de ton fils au moins. Tu auras tout le temps pour régler tes comptes avec lui ; chuchota l'homme qui se tenait à côté du papa de Khalil.
-oui mais je ne veux voir aucun membre de leur famille ici encore moins au cimetière. Ils n'ont rien à faire ici, c'est eux qui ont tués mon fils mais ils vont le payer cher, sa mort ne restera pas impunie.
L'imam rappela tout le monde à l'ordre car les gens commençaient à se poser des questions et à bavarder dans la mosquée même, oubliant le mort.
-respectez la maison de Dieu et notre fils couché ici. Dieu a donné, il a repris, nul autre que lui n'a le pouvoir d'ôter la vie. Mamadou Lamine demande pardon à ton Seigneur et accepte sa volonté.
Le père de Khalil éclata en sanglot. Il avait mal, terriblement mal. Surtout, il avait un sentiment de culpabilité qu'il ne pouvait expliquer à personne.
De retour à la maison, sa femme l'empoigna.
-Mamadou Lamine Cissé, où est mon fils? Pourquoi n'es tu pas rester là bas et lui tenir compagnie? pourquoi as tu accepté qu'on le mette à terre? Mamadou Lamine pourquoi as tu enterré mes deux garçons? Comment peux-tu te tenir là devant moi et me regarder en face? Dis moi pourquoi ?
La scène avait été insoutenable et tout le monde pleurait, hommes comme femmes.
Khalil était jeune avec tout l'avenir devant lui. On se prépare à tout sauf à enterrer son enfant. La logique voudrait que ça soit le fils qui enterre le père et non le contraire et c'est ce qui faisait le plus mal à Malang Cissé car il venait d'enterrer l'unique fils qui lui restait.
-Mariéme, je sais que je porterai à jamais la mort de mon fils dans la conscience. Je l'ai poussé dans les bras de cette femme et ça lui a couté la vie. Quand je suis allée prier ce vendredi là, j'ai rencontré le grand père de Farimata et je me rappelle qu'après lui avoir serré la main à la sortie, j'avais qu'une idée en tête, faire en sorte que Khalil épouse sa petite fille. C'était devenu une obsession. Elle était la femme parfaite pour mon fils. Et quand il l'a libéré, je suis allée voir Aly pour qu'il m'aide afin que Khalil entende raison et la reprenne à n'importe quel prix et c'est lui qui m'a aidé à me débarrasser du sort que ce vieux maléfique de Boubacar m'avait jeté. J’étais sous son emprise. Il ne pouvait rien faire contre Khalil et Rokhaya pour qu'ils se détestent, leur amour était trop fort, trop pur, donc la seule manière qu'il avait de les séparer était de faire en sorte que tous ceux qui pouvaient être d'accord directement pour leur relation, leur mariage ne s'entendent jamais et je suis sûr que c'est lui la cause de la maladie mystérieuse qui a amenée mon fils, car tout ceci a commencé dés l'instant où Khalil m'a appelé pour me dire que l'oncle de Rokhaya avait accepté de lui accorder sa main. Mais moi, j'étais encore aveuglé par le sort qu'il m'avait jeté. Mais maintenant il va payer pour tout ce qu'il a fait, dit Malang mélancolique.
Mariéme le regardait, dépitée et à bout de souffle.
-Personne ne t'a absolument rien fait Malang. Tu as prêté le flanc pour que ces gens s'attaquent à mon fils. Il ne leur a rien fait. Pourquoi lui Malang? Pourquoi mon fils? Pourquoi Farimata et son grand père ont jeté leur dévolu sur mon fils jusqu'à ce qu'il en meurt? DIS MOI MAMADOU LAMINE CAR JE SAIS QUE CETTE HISTOIRE VA AU DELÀ DU SIMPLE FAIT QUE FARIMATA VOULAIT COUTE QUE COUTE ÊTRE LA FEMME DE MON FILS. ET MAINTENANT QUE J'Y PENSE, TOI ET CE VIEUX SERPENT DE BOUBACAR VOUS ETIEZ LES PIRES ENNEMIS DU MONDE. ALORS DIS MOI POUR L'AMOUR DU CIEL POUR QUELLE RAISON MON FILS A ETE LA SEULE VICTIME DE TOUTE CETTE HISTOIRE. ET POUR QUELLE CHOSE A T-IL PAYE?Voila....
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YAKA| le poids de la superstition
Non-FictionIl y a des gens qui ne sont pas fait pour l'amour, le bonheur, le répit. Je fais partie de ceux là... Est ce moi qui fais les mauvais choix ou est ce le sort qui s'acharne sur moi? Yaka, une belle jeune fille pleine de vie et d'avenir, voit sa vie...