- 6.3 - GAV

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En ouvrant les yeux, j'avais l'impression que j'avais réellement tiré. Si bien que j'ai dû me lever et aller vérifier mon arme de service. Tout va bien, les balles sont loin du revolver. C'était bien un cauchemar. Malgré ma discrétion, Clément ouvre un œil et m'interpelle au loin, me demandant pourquoi j'étais debout. Je viens donc me recoucher et me colle à lui.

« J'ai juste fait un mauvais rêve.

— Tu peux me raconter si tu veux.

— Et bien... j'ai rêvé que je tirais sur le salaud qui a...

— Je t'écoute...

— Celui qui a tué Grégoire.

— Oh... Il est...

— Oui, mort. Grégoire est mort. A cause de moi.

— Pourquoi, enfin, si tu veux en parler...

— Pendant qu'on lui faisait face tous les deux, nous parlions. Nous imaginions qu'il n'avait pas d'armes. C'était faux. Profitant que je me retourne, il a tiré. Deux fois. Grégoire a eu l'excellente idée de se jeter sur moi. Il a été touché par l'une des deux balles. Moi par la seconde. Il m'a sauvé la vie, en payant le prix fort ».

J'ai les larmes aux yeux, la mâchoire serrée, le regard froid et les poings tendus. Mon inconscient me joue des tours mais pour une fois il me donne de la satisfaction. J'aimerais tellement l'abattre.

« Et tu n'as rien eu, toi ?

— J'étais à l'hôpital quand ils l'ont enterré. Je n'ai même pas pu lui dire au revoir. Et je n'ai toujours pas osé aller le voir. Je n'y arrive pas.

— C'est normal mon cœur. Il ne faut pas que tu t'inquiètes. Je t'aiderai, si un jour tu te décides.

— D'ailleurs, dans mon cauchemar, il s'en était pris à tout le monde ... sauf toi. Je ne supporterais pas qu'on te touche.

— Il n'y a aucune raison à cela. Et puis, n'oublie pas, l'armée m'a bien éduqué.

— Tu as raison... »

Personne n'a le droit de me le retirer. Personne. C'est mon Clément. Mais. Au fait. Il m'a appelé comment ?!

« Clément, tu as dit quoi ?

— Que je serai là pour toi.

— Non, mais, mon surnom. »

Il se met à rougir, comme un enfant qu'on aurait pris sur le fait accompli.

« J'ai dit... que... enfin... mon cœur... »

Ma main prend la sienne, naturellement. Je ne veux pas qu'il s'inquiète. Je ne le prends pas mal. Je sais qu'il a peur d'avancer trop vite. Moi aussi. Mais on a bien le droit d'être affectueux. D'être ensemble et d'en profiter. C'est tellement important et si rare. Je viens l'embrasser, dans un baiser qu'il me rend encore et encore. Puis, je le vois se raidir, et ouvrir la bouche :

« Dis-moi, Julien. Je peux te poser une question ? »

J'ai peur. Il ne doit pas me parler de l'hôpital. Je ne me sens pas capable. Pas encore.

« Tu es prêt à me parler de cet après-midi ?

— Oh oui, bien sûr ! lançai-je, soulagé.

— Je t'écoute, me dit Clément d'un air surpris par mon enthousiasme.

— Samuel a failli compter pour moi, tu le sais.

— Oui, et je me réjouis qu'il n'ait que failli, sourit-il.

Hommes de Loi (B&B)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant