- 9.2 - Emporté

1.6K 190 36
                                    


« Oh oui, désolé. J'ai rencontré Samuel sur une application et il m'avait d'abord donné Julien comme pseudo, puisqu'il était discret. C'est juste un réflexe ».

Thimothée termine sa phrase en me faisant un clin d'œil appuyé, amical, au regard de son patron ; mais qui pour moi prend un sens totalement différent. Il vient de sauver ma peau. Littéralement. Enfin. Ce n'est pas sûr. Il faut encore qu'il accepte cette version. Et son regard ne laisse rien présager de bon.

« Intéressant... Je pensais pas qu'on pouvait devenir amis après un plan cul, ricane-t-il, encore et toujours.

— Enfin, c'est que... commençai-je à balbutier.

— J'y pense. Vous pourriez vous les faire à deux.

— Comment ?! m'étranglai-je.

— Il faut arrêter de berner le petit Tim là. Je vous verrais bien en vrai-faux couple d'escorts. Les clients adoreraient. Deux pour le prix d'un. Enfin, non, pas vraiment ! s'étouffe-t-il.

— Je ne... dis-je en regardant Thimothée qui reste impassible et, surtout, silencieux.

— Ne fais pas cette tête Thimothée, il fallait bien que tu le saches un jour. Bienvenue dans le monde réel ! Ton pote ne veut ni être prof ni être mannequin. Non, il veut être escort. Coucher même. Il me l'a dit. Je suis sûr que vous auriez plein de clientes et de clients tous les deux... Tant que ça me ramène mon fric... »

Thimothée ne bouge toujours pas. Rien. Comme cassé de l'intérieur. C'est assez surprenant de réagir ainsi. Peut-être pas après tout. Je n'en sais rien, moi je suis venu ici en connaissance de cause. Et j'ai assez pour faire tomber tout le réseau parisien, puisque le big boss vient d'appeler le responsable mannequinat.

Il s'est tourné pour passer son appel, mais nous pouvons parfaitement entendre leur discussion puisqu'il répond à de potentiels clients, très intéressés pour des défilés. Et dire que Marc et Favian sont dans la mode. Je leur raconterai à l'occasion, pour savoir si c'est monnaie courante de se servir du mannequinat comme couverture. Peut-être pas d'ailleurs, je ne suis pas sûr que ce soit très pertinent de ma part de leur demander ça.

Thimothée sort enfin de son mutisme, en me regardant droit dans les yeux. Son regard a changé. Il ne semble ni surpris, ni déçu, ni choqué, mais davantage à la recherche d'une explication au creux de mes pupilles. Nos regards se déconnectent quand nous entendons frapper à la porte de verre. Sans doute le responsable. Je ne prends pas la peine de me retourner, alors que le patron lance un « entre, vas-y » toujours au téléphone.

Une main se pose sur mon épaule. Je suis agacé. Vraiment. Il me prend déjà pour son morceau de viande. Je détourne la tête vers Thimothée qui, lui, a complètement changé de visage. Pourquoi ? Il me perturbe décidément beaucoup. Il ment sur notre rencontre, ne réagit pas en apprenant qu'il travaille pour des truands et, maintenant, est pétrifié.

La main me lâche et je vois une arme dans la seconde. Je lève la tête, à mon tour abasourdi. Ce n'est pas un des hommes du réseau. C'est Samuel. Avec un casque, un gilet pare-balles et toutes les protections nécessaires. Mais c'est bien lui. Une arme à la main. Qu'il vient de poser sur la tempe de notre interlocuteur.

Surpris, il lâche son téléphone, tandis que d'autres hommes entrent dans la pièce. Evidemment. Que je suis idiot. J'ai trouvé le moyen d'oublier que j'avais appelé les renforts. Ils ont mis du temps à arriver, c'est certain. Mais ils sont là. Samuel en tête. Sa main se crispe d'ailleurs. Le stress j'imagine. Ou... Non !

Je me lève d'un bond, de peur que Samuel ne tire. Il me regarde furtivement et secoue la tête. Alors que les hommes de la BRI sont en train de le menotter, Samuel prend le menton de son pire ennemi dans sa main, et lui assène un coup de poing monumental. Ce n'est pas très malin de sa part. Mais je le comprends, après tout. Si j'avais l'assassin de Grégoire devant moi, je ne sais pas de quoi je serais capable.

Hommes de Loi (B&B)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant