12 : Conseil d'amie

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  Les séances suivant cette première victoire, je me battis contre tous les membres de l'escouade, excepté le caporal. L'affrontement contre Teresa semblait avoir joué le rôle de déclic. Désormais, il suffisait que je me mettes en position pour me retrouver prise de cette puissante clairvoyance qui ne me faisait presque jamais défaut. Je gagnai donc successivement contre Jesper, Ryme et Ari. Seul Erd, le plus rodé d'entre eux, me fit mordre la poussière, deux fois de suite avant que je ne parviennes à le battre.

  Suite à l'affrontement m'ayant opposée à Teresa, la nouvelle de ma victoire s'était répandue comme une traînée de poudre : la bleue avait battu une des soldates d'élite au corps à corps. La soldate en question quant à elle, avait été la première à faire circuler l'information, chantant mes louanges à tue tête et ne cessant jamais de vanter mon talent en public.

  Je trouvais ça gênant mais avais néanmoins accepté de bonne grâce les félicitations de tous les inconnus qui venaient d'eux même me souhaiter la bienvenue.

  Pour la première fois de ma vie, je me sentais acceptée par autrui. Je pouvais percevoir le lien fort qui unissait tous ces soldats, tissé par le fait de vivre ensemble, combattre ensemble et mourir ensemble. La solitude n'existait pas dans le Bataillon, et cela rendait la perspective d'une mort prochaine plus acceptable.

  Malgré tout, un point noir venait ternir ce si charmant tableau.

  Le caporal-chef Levi Ackerman.

  Depuis notre conversation dans la forêt, ce dernier semblait m'avoir prise en grippe et me haïr plus que jamais. En trois jours, je ne comptais plus le nombre de fois où je m'étais retrouvée de corvée dans les jardins et le réfectoire. Le caporal semblait sauter sur la moindre occasion, le moindre mot de ma part pour me rabaisser avec une hargne singulière. Même les autres l'avaient remarqué.

  Jesper et Teresa en plaisantaient tandis que Ryme grommelait dans le dos de Levi pour me témoigner son soutien.

  Toutefois, pour une raison inexplicable, les corvées me dérangeaient moins que le fait de ne pas être appréciée du caporal. N'étant pas de nature à vouloir plaire je me contentais d'effectuer ses ordres avec froideur, sans chercher à lui prouver un quelconque dévouement.

  Mais au fond de moi, j'avais mal.

  Sa proximité me procurait une désagréable sensation, accentuée par les souvenirs qui revenaient invariablement me hanter. Et toujours, les mêmes questions ressurgissaient.

  Avait-il véritablement oublié ? Notre rencontre n'avait-elle donc aucune valeur à ces yeux ? Ce moment si bref mais si fort que nous avions partagé des siècles plus tôt, unis dans la misère… cela ne revêtait-il donc aucun sens à ses yeux ? Pourquoi me détestait-il ? Pourquoi ?

  Je ruminais continuellement cette peine, balayant le sol sans relâche et frottant vigoureusement les carreaux de fenêtres du QG.

  Un matin, alors que je récurais le réfectoire de fond en comble – punition pour avoir provoqué un petit accident lors de la séance d'équitation – Hanji vint me trouver afin de me féliciter.

  « Ton niveau est remarquable pour une bleue non-formée ! Erwin n'avait pas tort en louant ton potentiel.
  — Humph… grognai-je sans cesser de frotter férocement le sol avec mon chiffon gris. »

  Désinvolte, Hanji prit place sur le banc à côté de moi et appuya son coude sur la table fraîchement lavée.

  « Demain tu apprendras la manœuvre tridimensionnelle, Levi me l'a dit. »

  La mention du caporal me fit l'effet d'une vague de picotements dans ma colonne vertébrale et ma main se mit à astiquer le sol avec encore plus de ferveur. On aurait dit que je cherchais à creuser la pierre.

𝐌𝐄𝐌𝐎𝐑𝐀𝐁𝐈𝐋𝐈𝐀 - LeviXOcOù les histoires vivent. Découvrez maintenant