19 : Vol, meurtre et évasion

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  Le coup m'atteignit en plein estomac et je m'effondrai à genoux, souffle coupé.

  « Désolé ! s'excusa Erd avec empressement en se précipitant pour m'aider à me relever. »

  J'acceptai son bras et le rassurai d'un sourire fatigué. Alors que je me mettais déjà en position, prête à recommencer malgré mon ventre meurtri, Levi qui nous observait, se rapprocha.

  « Keith, m'interpella-t-il d'un ton neutre, viens par ici. »

  Surprise, j'échangai un bref regard avec Erd et m'excécutai. Depuis notre échange à la sortie de l'infirmerie, Levi se comportait de nouveau normalement avec moi. Ou du moins, aussi normalement qu'il en avait l'habitude. Il avait recommencé à m'adresser la parole de son ton froid et à me punir à coup de corvées lorsque je faisais des bêtises. Ce qui n'arrivait plus aussi souvent qu'autrefois. Je me sentais soulagé de ce poids en moins sur les épaules.

  D'un pas tranquille je m'approchai du caporal et m'arrêtai à sa hauteur avant de le saluer. Celui-ci fronça les sourcils.

  « Garde ton salut Keith, lança-t-il avant de s'écarter pour me déshabiller du regard. »

  Stupéfaite de ce manque de retenue inhabituel, je lui adressai un regard farouche.

  « Je peux savoir ce que vous regardez Capor…
  — Tu as maigri gamine. »

  Ma voix mourut et mes épaules s'affaissèrent lorsque je compris où il voulait en venir. Depuis l'expédition, je dormais mal, sans cesse réveillée par d'affreux cauchemars auréolés de sang. Et depuis la mort d'Ari, à mes insomnies s'était ajouté un manque d'appétit constant. Matin, midi et soir, je me rendais au réfectoire et ne mangeais pratiquement plus, me contentant d'un verre d'eau et d'un bout de pain. Le regard du caporal remonta pour venir plonger dans le mien. Il semblait mécontent de ce constat.

  « Tu continues de battre Jesper au corps à corps mais tu gagnes de moins en moins souvent contre Teresa et tu es vraiment pitoyable face à Erd. Pourquoi tu ne t'es pas relevée quand il t'as frappé dans le ventre ? »

  Incapable d'admettre la vérité à voix haute, je restai muette et soutins son regard. Je n'en avais juste pas eu envie. Je n'avais pas eu envie de me relever après ma chute, pas même de me battre. Si Erd ne m'avait pas aidée, je serais probablement restée au sol jusqu'à ce que tout cesse. Chaque matin, il me fallait faire un effort surhumain pour trouver la volonté d'ouvrir les yeux et de continuer à vivre. J'étais exténuée et seuls les visage d'Erd, de Jesper, de Teresa et du caporal me procuraient assez de courage pour quitter le lit.

  Levi soupira d'un air irrité.

  « C'était il y a plusieurs mois, il va peut-être falloir t'en remettre un jour tu crois pas ?
  — Peut-être.
  — Je reformule gamine : Tu vas t'en remettre et plus vite que ça. C'est un ordre. »

  Incapable de soutenir son regard plus longtemps, je laissai mes yeux fuir les siens. Mais à mon grand étonnement, Levi fouilla dans sa poche et en sortit une miche de pain dorée qu'il me plaça de force entre les mains.

  « Mange.
  — Mais… je n'ai pas…
  — Ta gueule soldat, mange. »

  Je regardai un instant le pain avant de lever les yeux.

  « Il n'est pas rassis, constatai-je avec méfiance.
  — Bien sûr que non, j'ai demandé aux cuisines d'en faire une fournée fraîche ce matin pour t'obliger à te nourrir.
  — Vous voulez dire que…
  — Tch, oui. Madame refuse le pain sec alors j'ai demandé du pain frais. Maintenant arrête de le regarder bêtement et mange-le ! On a besoin de soldats en bonne santé, pas de cadavres ambulants. »

𝐌𝐄𝐌𝐎𝐑𝐀𝐁𝐈𝐋𝐈𝐀 - LeviXOcOù les histoires vivent. Découvrez maintenant