Censure mon être

5. Glenn

Je traverse le couloir du dortoir. La seule chose que me différencie des patients n'est autre que ma blouse sur laquelle est accrochée une étiquette "Aide soigant Robin".
Les couloirs sont souvent bondés, mais le silence est présent. J'ai l'impression de vivre dans un aquarium, c'est agréable mais déconcertant. Je me dirige vers la chambre de Glenn. J'exerce ce métier depuis un an et c'est sûrement le patient le plus incompréhensible que j'ai eu l'occasion de rencontrer. Il ne parle jamais ou que très brièvement. Il ne sourit jamais, sur son visage si frêle et jeune ne reigne aucunes émotions. Il est très pensif, comme encré dans un univers parallèle. Il admire toujours le paysage. Les membres du personnel ont autant de mal que moi à le cerner. Et entretenir une conversation avec lui relève de l'impossible.
Sa porte se dresse devant moi. Je toque et rentre.
- Salut Glenn ! Alors la visite de tes parents s'est bien passée ?
Comme à son habitude, il est assis sur son lit, jambes dans le vide, face à la fenêtre. J'ai donc vue sur son dos. Et comme à son habitude, il ne répond pas.
- Oh tu as déjà accroché tes posters. C'est sympa !
Je suis déconcerté. Ses posters sont entièrement marron clair. Aucuns motifs, aucunes nuances. Rien. Juste du marron clair. C'est vraiment étrange, de sa part je m'attendais à un truc folklorique étant donné qu'il se plaint du blanc.
- Ça rajoute de la couleur c'est cool !
Je m'avance et me positionne devant lui.
- Qu'est ce que tu regardes dehors ? Qu'est ce qui t'intéresse tant ?
Ses yeux restent figés dans l'immensité du paysage. Comme s'il voyait la vierge, il est admiratif et à la fois si émerveillé. Le silence s'installe.
- Oh et l'activité "des sapins pour noël" à débutée ! Tu viens ? Ça pourrait être chouette ! Beaucoup de monde participe, tu pourras donc te faire des amis, et t'amuser un peu !
Glenn reste immobile. Il semble si lointain, ne m'écoute pas. Peut-être ne m'entend-t-il pas. Son silence me dérange, je voudrais tant qu'il devienne comme tout le monde, jovial et social. Je vais consacré toute mon énergie à lui donner l'envie de battre son problème. C'est un type gentil dans le fond, avec un passé traumatisant. Je veux l'aider. Mais il semble si loin, égaré dans un autre monde, seul et muet. Pourtant il me suivit de tendre le bras pour l'effleurer...

Je ferme derrière moi la porte. Laissant le jeune garçon dos au monde. Aveugle de réalité. À contre courant.