La cantine est si bruyante. Elle provoque des échos en moi, nuisibles. Polux et la Bleu jactent. Je mange. Tout à un goût si amer. Au bout de la table, comme à son habitude, se trouve June. Elle n'est pas amer, elle n'est pas fade.
Les assiettes sont récupérées. Je me lève et pars. J'ouvre la porte et sors. J'adore le jardin. Il me fait penser à chez moi. Je contemple les alentours durant ma marche. Les arbres sont grands, parfois frêles, la neige au sol n'est que parsemé, l'herbe redevient visible à de nombreux endroits. Le soleil est doux. C'est agréable. Je voudrais m'enterrer ici.Je regarde la rivière, assis sur le banc. Elle va vite, trop vite. Je me demande où elle mène. Des bruits de pas se font entendre. June. Elle s'assoit à côté de moi, silencieuse. Nous contemplons l'eau, qui s'écoule, frémissante. Un vacarme si apaisant.
- D'où vient ce cour d'eau ? Quelle en est sa source ?
Elle réfléchit un instant.
- Je ne sais pas. D'une montagne proche, de la neige qui coule. Je ne sais pas Glenn.
- Et si c'était des larmes.
- Qui pourrait pleurer autant ?
- Nous.
Je voudrais m'y baigner. Je voudrais m'y noyer.
- Il faudrait que l'on soit extrêmement triste.
- Sais-tu jusqu'à où elle s'écoule ?
- Je ne sais pas. Je pense qu'elle court jusqu'à la mer.
- La mer est salée. Comme les larmes.
Je voudrais que l'on y plonge. Que le sel nous ronge.
- Et si ce court d'eau était l'assemblage des larmes de toute les personnes existantes ? questionne-t-elle.
- Et si l'on est mort ?
- Tes larmes ne sont plus de ce Monde.
Le silence de l'être. Le bruit de la nature.
- June, ne sois pas triste. Je ne veux plus que tu sois triste. Je ne veux plus que tu souffres. Je veux que tu sois heureuse.
Son regard ne quitte pas le courant. Sa bouche entrouverte, ses lèvres pulpeuses, son souffle court, ses cheveux. Elle reste désarmée, vulnérable, devant moi.
- Tu es si gentille, si douce. Tu ne mérites pas d'avoir mal.
Une larme glisse le long de sa joue.
- Ne pleures pas... je ne veux pas que tu sois triste...
Elle tourne la tête vers moi, plante ses yeux dans les miens. Elle susurre, au delà du ruisseau.
- Ce qui me rend triste Glenn, c'est de savoir que c'est toi qui souffre. Que tu ne t'en rends pas compte. Tu ne réalise pas la puissance ta douleur. Et tu es là, à me rendre heureuse, tandis que tu as mal. Je suis si triste. Je veux t'aider, laisse moi t'aider. Tu peux guérir.
- Guérir ?
- Guérir pour sortir.
- Je ne suis pas fou. Je n'ai pas besoin de guérir.
Elle ne me quitte pas des yeux, elle reste muette.
Elle ne dit pas non.
Elle me pense fou.
- Je ne suis pas fou. Je ne suis pas fou. Je ne suis pas triste. Je ne souffre pas. La seule chose qui me touche est de rester bloquer ici. Et tu as prolongé mon séjour !
- C'est pour ton bien !
- TU NE COMPRENDS VRAIMENT RIEN. Bon sang, tu ne comprends donc rien...
Elle sursaute et s'écarte légèrement, apeurée. Innocente. Coupable. June.
- Je veux partir. Partir vivre. Ici je meurs. Tu me maintiens en vie. Mais tu n'es pas chaque seconde avec moi. Alors je survis, mais je ne vis pas. Emmène moi. Partons. On peut s'enfuir ! Traversons le court d'eau, les larmes et les peines !
Je me lève avec entrain. Mais sa main attrape mon poignet.
- Glenn... restons ici. Tu disais que l'extérieur te manquait.
- Oui tu as raison. Mais je ne veux pas de cet extérieur la. Il n'est que fictif.
- Je reste ici, murmure-t-elle.
- June...
- Je t'en pries... restons un peu dans ta prison. Après tout, je te manquais non ?
Mon rêve.
Je recule.
- Vas-tu encore une fois t'acharner ?
Elle me scrute, crédule.
- Glenn je ne comprends pas...
- Tu n'es qu'un rêve. Tu n'es plus réelle.
- Glenn je suis réelle !
Elle m'agrippe, désespérée, elle est différente.
J'ai peur.
- Glenn tu me fais peur... parle moi...
- Je ne t'ai jamais remplacé.
- Je le sais, j'ai confiance en toi.
Elle est irréelle. Un mirage. Elle n'est que poussière.
Et la poussière s'envole avec le vent.
La poussière reste avec le temps.
Mais June est éphémère.
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Censure mon être
Teen FictionBienvenue à Skoltin Vik, Glenn est stoïque, dans cet hôpital, sa cellule l'opresse. Un bureau dépourvu d'ornements, un lit simple et des murs blancs. Il attend. La folie, la folie, la folie, la folie. Est ce la seule chose qui le définie ? Il l'aim...