6. Le Pas de l'Ogre

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Le fantôme se glissait entre les arbres sous le regard de la Lune qui étirait les ombres.

Le garçon reposait à quelques mètres de lui, lové entre les racines. L'angoisse creusait un pli soucieux entre ses yeux. Il dormait, poings serrés, tenant contre sa poitrine un sac maculé de poussière.

L'homme s'arrêta à trois pas de cette forme plongée dans un sommeil torturé. L'enfant respirait difficilement. Il se pencha avec lenteur vers lui et lui toucha l'épaule. Il ne s'éveilla pas à son contact, englué dans ses cauchemars.

— Gamin, souffla-t-il.

Le garçon remua. Il reprit, plus fort :

— Gamin !

Un sursaut parcouru enfin l'endormi qui se réveilla d'un seul coup et braqua sur l'homme deux yeux hallucinés. Un couteau apparut l'instant d'après dans sa paume et l'adulte recula avec précipitation pour ne pas finir empalé. Il présenta ses deux mains en évidence.

— Ne t'inquiète pas. Je ne te veux aucun mal.

Il se rapprocha, sous le regard attentif de l'enfant — si tant était que ces yeux remplis de douleur fussent encore ceux d'un enfant —, et reprit :

– Je m'appelle Sham. Je me promenais dans les bois, je t'ai vu, je voulais vérifier que tu allais bien. Tu n'as nulle part où aller, pas vrai ? Viens avec moi, je peux t'aider.

— Non.

La voix rauque et grave acheva de confirmer ce que les yeux du jeune homme clamaient déjà. Ce n'était plus un enfant depuis longtemps. Sham sentit un poids tomber sur sa poitrine à ce constat.

— Je veux juste t'aider...

— Vous me traquez c'est ça ? Vous avez lu l'avis de recherche... Ils ont mis combien sur ma tête ?

Il fronça les sourcils et s'accroupit à la hauteur de l'adolescent.

— Je ne sais pas de quoi tu parles, petit...

Le jeune homme brandit son couteau, menaçant.

— C'est ça. On me cherche ici ? Ils savent que je suis parti dans cette direction ?

— Je ne sais pas qui tu es, je...

Le garçon bondit en hurlant. Le temps d'un éclair, Sham vit la lame fuser vers lui. Son corps agit seul et, en l'espace de trois secondes il tenait le gamin plaqué contre le sol.

— Je t'ai dit que je te voulais aucun mal ! grogna-t-il.

— Lâchez-moi ! Lâchez-moi !

Un hurlement d'animal sortit de la gorge de l'adolescent qui se débattit, lardant l'air de sa lame. Sham accentua sa pression.

— Calme-toi, souffla-t-il, calme-toi... Laisse tomber ton couteau...

Mais il continuer à vociférer. Il fallut de longues minutes avant que le garçon, à bout de souffle et de forces, ne finisse par s'immobiliser sous le regard perdu de Sham. Qui était cet enfant ? Pourquoi se sentait-il traqué ? D'où lui venait cette violence ?

— Lâchez-moi, répéta soudain le gamin d'une voix faible et rauque qui l'alerta.

Tout à ses questions, il n'avait pas réaliser que le petit avait desserré son emprise sur son couteau et s'était mis à trembler violemment. Il le relâcha avec précipitation. L'enfant se mit à ramper avec difficulté pour s'éloigner de lui, se recroquevilla contre un arbre et prit plusieurs amples inspirations. Sham le laissa faire, désemparé.

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