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Rafael ne bouge pas. Pas d'un centimètre. Il est là, contre moi. Il n'a pas dit un mot, sa respiration semble coupée. Sa tête est logée sur mon épaule. Je n'ose plus rien dire, plus rien ajouter, j'attends. A mon tour d'être plongé dans cette torpeur, après tout. Je sens que se répand sur ma peau une légère humidité. Il pleure.

Tandis que j'essaie de passer ma main contre sa joue, il la saisit avant et m'impose de la laisser contre son torse. Il la serre si fort que mes phalanges pourraient me faire mal. Ses doigts forment des figures géométriques aléatoires sur ma peau, laissant paraître un stress visiblement immense.

Petit à petit, après quelques temps que je suppose être des minutes, sa tête se relève, sans jamais que le contact entre son menton et mon épaule ne soit rompu. Je me délecte du temps passé avec lui, essayant d'oublier qu'il n'a pas encore pu me répondre, ou seulement réagir. Sa bouche est désormais contre mon cou.

Plusieurs baisers y sont déposés, délicatement, puis sur ma joue. C'est alors qu'il prend une inspiration et chuchote :

« Je suis amoureux de toi Florent. Terriblement amoureux. Terriblement parce que tu es terrible. Dans ta manière d'agir avec moi, de t'investir, de t'engager. C'est terrible de se dire que j'ai vécu des années sans connaître tout ça. Sans te connaître, sans savoir ce que pouvait procurer le contact d'une peau comme la tienne, en ignorant ce que pouvait signifier compter pour quelqu'un. Merci d'être là Florent. Merci de ne pas m'avoir ignoré. Merci de m'avoir s... ».

Le dernier mot s'étouffe dans un sanglot. Je n'ose pas lui demander, ni même parler. Je me décale seulement pour venir m'assoir à cheval sur le tabouret et qu'il soit parfaitement logé dans mes bras. Je ne m'attendais pas vraiment à cette réaction, je suis un peu sonné à vrai dire. Il est si touchant, c'est si difficile de me retenir de pleurer à mon tour...

« Sauvé. Merci de m'avoir sauvé... ».

C'était le mot de trop. Il n'avait pas le droit de dire ça. Mon corps ne répond plus à mes injonctions et lâche à son tour, en imaginant parfaitement ce que signifie ce verbe pour lui. Des vagues commencent à gagner mes yeux, affectent mon regard et, peu à peu, nos deux liquides salés se mêlent sur nos visages respectifs.

« Je t'aime, moi aussi... ».

Il a répondu, ça y est. Il l'a dit. Il me l'a dit. Dans les yeux. Même si les quatre sont complètement embrumés. Mais je l'ai vu.

« Et toi Rafael... Tu négliges complètement tout ce que tu m'apportes... J'ai passé des années entières à m'oublier, à éviter que des sentiments trop doux n'affectent mon cœur, de peur qu'il lâche, que je ne lâche. Je n'arrive même pas à comprendre comment en si peu de temps tu as réussi à faire de moi cet être ouvert aux sentiments, alors que j'étais encore une statue dépourvue d'âme il y a de ça quelques mois...

— Et pourtant, c'est bien toi qui m'as dit mon premier vrai je t'aime...

— Comment ça ? lui demandai-je doucement.

— Je n'ai jamais rien reçu de mes parents, du moins pas comme ça... Et encore moins de mes proches, de mes autres relations... C'est toi le premier... »

Je ne sais pas même plus comment réagir. J'ai l'impression que mon cerveau a déconnecté ses neurones, laissant place à un flot d'émotions. Je ne parviens qu'à poursuivre mon étreinte amoureuse et puissante. Je le vois sourire, encore.

« Et maintenant je sais aussi que tu seras le dernier. On va tout construire ensemble Florent.

— Tu vas devoir me faire découvrir ce qu'est réellement un couple dans ce cas, lui dis-je taquin.

Special Teacher (B&B)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant