Viking

Chapitre 17

Alors qu'il accélère le pas pour atteindre la petite bâtisse, je freine des quatre fers pour ralentir sa progression et . . . probablement pour gagner un peu de temps avant ma fin. Mais j'oublie à qui j'ai à faire. Voyant que je déploie mon énergie pour avancer le plus lentement possible, Thorsten grogne, fait un pas dans ma direction. Sans un mot, il me saisit par la taille et me balance sur son épaule comme si je n'étais pas plus lourde qu'un brin de paille.

Une fois installée sur ses larges épaules, il reprend ses grandes enjambées et nous arrivons dans la maison ou . . . plutôt une maisonnette. Il n'y a qu'une seule et unique pièce et elle n'est pas bien grande . . .

Toujours sans un mot, il me pose sur le sol et lâche son sac. Je jette un coup d'œil à ce qui m'entoure, une simple paillasse qui fait office de lit, une table, deux tabourets et un baquet. Pendant que Thorsten ferme la porte, je remarque un petit tas de bois dans un coin, ce qui veut dire qu'il avait prévu son coup. Un frisson de terreur parcourt mon dos. Même si mon regard vagabonde dans cet étroit espace, je n'ose pas bouger d'un millimètre de l'endroit où il m'a posée.

Une fois cette porte fermée, il s'approche du foyer et allume un feu. Je n'arrive toujours pas à bouger bien que je sois gelée et que me rapprocher me ferait du bien. J'en suis tout bonnement incapable ne sachant pas ce qu'il veut faire de moi. Voyant que je ne bouge toujours pas, il finit par m'adresser enfin la parole.

_ Viens te réchauffer, me dit-il durement.

Je ne bouge toujours pas d'un millimètre. Je sais qu'il est énervé et que cela risque de s'aggraver, mais j'ai peur pour mon avenir, ainsi que pour celui d'Ulrik et de Ragna. Et quand je repense à la cicatrice sur le visage d'Ulrik, je me dis que lui et ses hommes peuvent être aussi violent que cruel. Mais devant le regard qui appuie ses paroles, je finis par me résigner et à lui demander plus d'informations.

_ Pourquoi . . . pourquoi m'avoir amenée ici ? Demandais-je perdue entre la peur de ce qui allait m'arriver et la colère d'être prise au piège.

Je l'entends soupirer puis il me répond sans prendre la peine de me regarder car il fait de nouveau face au feu.

_ J'ai besoin . . . de réfléchir et pour cela . . . je dois . . . être au calme . . .

_ À quoi ? Commençais-je sans avoir réfléchi, puis je me ressaisis et reprends plus posément. Pourquoi avez-vous besoin de réfléchir et . . . pourquoi dois-je être présente ?

Il se redresse d'un bond et vient se placer juste devant moi. Si près de moi que je peux sentir la chaleur qui se dégage de son corps. Je n'ose pas lever les yeux de peur de me perdre dans le bleu des siens.

Mais Thorsten ne me laisse pas le choix. Il n'a que faire des battements de mon cœur qui s'accélèrent. Ses doigts se posent délicatement sur mon menton et redresse mon visage vers le sien.

_ Parce que je ne sais pas ce qui se passe . . . mais . . . pour une raison que je ne comprends pas . . . je n'apprécie pas de te savoir loin de moi . . . et cet Ulrik, . . . bien qu'il t'ait sauvé la vie ne me dit rien qui vaille, m'explique-t-il beaucoup plus calmement que je ne l'aurais cru.

Je reste interdite face à cette révélation. En arrivant, j'osais à peine bouger à cause de la peur de ce qui allait m'arriver et . . . maintenant je suis terrorisée par un flot d'émotions contradictoires qui me submerge.

Avant que ce moment ne devienne plus gênant qu'il ne l'ait déjà, Thorsten se dirige vers le sac qu'il a amené et en sort ce qu'il faut pour préparer une collation.

_ Viens manger, me dit-il avec gentillesse cette fois.

Je ne dis rien mais je le regarde assis devant le feu qu'il a allumé. Nous mangeons simplement assis sur une peau. J'avoue que je suis quelque peu étonnée de le voir si à l'aise dans la simplicité sans le faste du à son rang.

Il mange les yeux rivés sur les flammes qui dansent devant nous. Cela me laisse le loisir de le regarder, de l'observer à la dérobée. Je suis surprise de mon attitude car il y a encore peu de temps, j'étais perdue face à Ulrik et les souvenirs de mon passé.

En fait, je me rends compte que je suis heureuse de savoir qu'il est vivant . . . mais mon cœur ne vibre plus de la même façon quand je pense à lui.

Perdue dans mes pensées, je ne remarque pas que mon regard reste rivé sur le corps de Thorsten . Ce dernier commence alors à me détailler à loisir sans que je ne me rende compte de rien.

C'est cette chaleur sur ma peau, . . . cette chaleur qui parcourt mes veines et qui irradie mon corps. C'est cette même chaleur que j'avais ressentie ce soir-là . . . quand il m'avait embrassé dans la maison de ce petit village. Celle qui m'avait fait perdre pied face à cet homme qui m'avait arrachée à ma petite vie tranquille . . .

Lorsque mes neurones se reconnectent enfin, mes yeux papillonnent légèrement pour faire la mise au point. J'ai un léger mouvement de recul de surprise quand je remarque que Thorsten a les yeux rivés sur moi. Je suis si surprise, il n'y a rien de remarquable chez moi. Je ne suis qu'une simple esclave . . . ou alors . . . le titre ou le rang de fille de chef de clan aurait-il rajouter du piquant à ce que je suis . . .