Viking

Chapitre 29

Notre retour au château se fait dans le silence. Aurora ose à peine me regarder. Quand à moi, je ne cesse de passer ma main sur ma nuque où je ne sens plus la masse de mes boucles auburn. La tenue que m'a fournie Aurora est plus de style irlandais que viking avec le jupon et le corset qui me comprime la poitrine.

_ Est-ce que tu as faim ? Me demande-t-elle une fois que nous sommes dans l'enceinte du château.

Je lui souris car pour être honnête, je n'ai pas faim, je suis littéralement affamée. Elle le comprend d'un simple regard et n'attend pas ma réponse pour me saisir la main et me tirer vers les cuisines.

Une fois dans la pièce, je hume la bonne odeur de ce qui va être servi. La chaleur des fourneaux me fait du bien après ma toilette dans cette rivière gelée. Rien que d'y penser à nouveau, un frisson me parcourt le corps.

_ Adélaïde, dit Aurora à une petite bonne femme ronde et autoritaire mais dont les yeux trahissent la bonté et la bienveillance. Adélaïde, j'aimerais te présenter Eivor. Elle est désormais comme moi au service de Dame Sigfrid.

_ Pauvre enfant, la coupe Adélaïde d'un ton bourru. Approche-toi Eivor. Mon Dieu, ma douce enfant, qu'est-il arrivé à tes cheveux ? Murmure-t-elle.

Je baisse les yeux consciente de l'image peu flatteuse que je renvoie. Adélaïde pose alors sa main sur mon visage et m'oblige à la regarder.

_ Même ainsi, tu es très jolie et . . . tu vas faire tourner des têtes . . . Et puis ils repousseront . . . Quelle coutume idiote et barbare. Bon assez parlé, viens donc manger un bon bol de soupe bien chaude, dit-elle en plaçant déjà les bols devant nous.

_ Merci Madame Adélaïde, dis-je la tête basse.

_ Oh non ma belle, tout le monde m'appelle Adélaïde, et toi aussi ma jolie. Allez mange, il te faudra prendre des forces pour supporter les ordres et les demandes de ton impétueuse maîtresse, termine-t-elle avant de retourner à ses fourneaux.

_ Combien de temps avons-nous ? Demandais-je à Aurora qui ne lève guère le nez de son bol.

_ Oh ! En fait nous ne devons pas retourner voir Sigfrid, ce soir nous aidons en cuisine comme tous les esclaves du château en fait. Tu resteras dans la cuisine et je ferai le service en salle, me répond-t-elle.

_ Très bien mais une fois le travail terminé, je ne suis pas sûre de savoir retrouver notre chambre, dis-je penaude de me sentir aussi gauche et inutile.

_ Ne t'inquiète pas Eivor. Je viendrai te rechercher quand j'aurai terminé en salle, me rassure-t-elle en se levant pour débarrasser son couvert.

Puis elle s'approche d'Adélaïde qui la serre dans ses bras et lui indique les plateaux qu'elle doit amener dans la grande salle de réception. Ensuite Aurora disparaît des cuisines plateaux en mains.

Je me lève à mon tour et me dirige vers le baquet pour laver mon couvert puis je vais vers Adélaïde à mon tour pour savoir comment me rendre utile.

_ Et bien ma douce, que sais-tu faire ? As-tu déjà mis les pieds dans une cuisine ? Me demande-t-elle sans la moindre malveillance.

_ En fait, je sais faire beaucoup de choses, répondis-je humblement, ma . . . mère voulait que je sache me débrouiller, terminais-je mal à l'aise de mentir à une femme aussi généreuse.

_ Votre mère était une femme avisée. Que vos Dieux aient son âme, me dit-elle en me serrant contre elle. Mais tu ne lui ressembles guère, Dame Inga était blonde comme les blés tout comme Joründ, il me semble . . .

Je reste quelques secondes mal à l'aise face à ce sous entendu qui pourrait mettre en péril le mensonge de mon identité. Mais je me détends aussitôt quand je la vois me faire un clin d'œil, elle voit clair mais ne dira rien.