Chapitre 13

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Août 2014

Je pars dans quatre jours.
Je pars dans quatre jours.
Je pars dans quatre jours.

Je reste allongée dans mon lit, à fixer le plafond. Je ne sais pas si cette nouvelle est censée me réjouir mais elle me brise le cœur.

Sans grande surprise, je n'ai pas revu Adèle depuis l'incident de la cabane. Elle reste cloîtrée chez elle depuis. Je l'ai seulement aperçu il y a deux jours, assise sur le perron, son éternel carnet de dessin à la main.

Julie a passé les derniers jours à me traîner à droite à gauche, pour me changer les idées et surtout se faire pardonner de l'épisode du bar. Ça a plutôt bien marché, nous avons beaucoup rigolé mais à chaque fois, mes pensées déviaient vers Adèle. Je me sentais coupable de m'amuser sans elle.

Dans quatre jours, tout ça sera fini. Je vais intégrer l'école de Sciences Politiques du Sud de la France que j'ai toujours convoitée, et retrouver Ambroisie, mes amis et mes parents.

J'ai beau essayer de me mentir à moi-même, le seul fait de penser que je reverrai plus jamais Adèle me donne une boule au ventre que je traîne depuis plusieurs jours.

J'entends des pas dans l'escalier. Je m'attends à voir surgir Julie, qui vient me tirer de mon lit pour m'emmener je ne sais où mais au lieu de ça, ma grand-mère apparaît sur le seuil de la porte, les mains sur les hanches.

Je ne l'avais pas vu monter ici depuis le temps où elle nous lisait des histoires avant de dormir quand nous étions enfants. Maintenant que nous sommes grandes, elle ne monte jamais, elle dit qu'elle nous laisse notre sanctuaire.

- Tu ne veux pas profiter de tes derniers jours ici ? demande-t-elle en s'asseyant sur le coin du lit.

- Si si.

Elle me sourit avec un regard compréhensif. J'ai la meilleure grand-mère du monde.

- Si j'étais toi, j'irai à la rivière à dix heures.

Je fronce les sourcils.

- Quoi ?

- Et je me ferais belle, on sait jamais, au cas où ce serait un « date ».

Je la regarde quelques secondes pour être sûre de bien comprendre.

- Dépêche-toi, ne la fait pas attendre, dit-elle avec un clin d'œil qui lève mes doutes.

Je saute de mon lit. J'enfile mon short en jean et pique le chemisier blanc de Julie. L'avantage, c'est que faisons la même taille.

J'embrasse ma grand-mère sur le front et la remercie. Je dévale les escaliers et traverse le salon sous le regard déconcerté de Julie par dessus son magazine. Je jète un rapide coup d'œil à la pendule de la cuisine, il est dix heures moins dix. J'ai tout juste le temps de traverser la forêt.

Après avoir enfilé une paire de Converses, je traverse le jardin et me dirige vers la rivière en marche rapide puis finis par me mettre à courir.

Je n'ai jamais couru aussi vite de ma vie. Les branches qui me fouettent le visage et les ronces qui s'accrochent à mes vêtements sont les derniers de mes soucis.

En arrivant à la rivière, mon cœur saute dans ma poitrine quand je l'aperçois, au pied de son arbre habituel, son carnet entre les mains, concentrée sur un dessin.

Elle lève la tête vers moi quand elle m'entend approcher. Son regard est partagé entre la joie et l'appréhension.

Je m'assois à ses côtés. Elle ferme son carnet avant que j'ai eu le temps de jeter un œil à son dessin.

Breathe [gxg]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant