Affliction

10 - Retrouvailles

Je me remettais difficilement de la soirée de la veille. L'attitude de Camille était un peu exagérée. Je sais qu'elle voulait m'aider à éclaircir les choses avec Cédric mais c'était trop brutal. Je n'arrivais pas à fermer les yeux sans voir le visage meurtri de Cédric ou celui en furie de Manon. Qu'étais-je devenue ?! Moi qui ai toujours mis un point d'honneur à ne jamais blesser quelqu'un je venais de blesser mes deux meilleurs amis de toujours gratuitement. S'il y avait une once d'espoir que je me réconcilie avec Manon un jour, je pense que cet espoir s'était envolé.

Ma fille il arrivera un moment dans la vie où tu seras face à un dilemme. Des moments où tu pourras choisir d'agir ou de te rester spectateur. Des moments où tu devras parler ou garder le silence. Dans ces moments là chaque décision te semblera injuste voire pire que l'autre. Dans ces moments-là il faut juste écouter sa conscience et prendre la décision qui te permette de dormir. Même si en prenant cette décision tu vas à l'encontre de tes amis, ils finiront par comprendre. A cette soirée là je n'avais vraiment pas pris la bonne décision. J'aurais dû arrêter Camille et en tant qu'amie elle aurait compris mais j'ai décidé d'opter pour la lâcheté et je me suis tu.

Mais on n'allait pas se laisser démonter ! ce jour-là je devais retrouver Nabil pour passer une journée ensemble et fêter le BAC comme il se devait. J'étais super excitée. Je me préparai de la manière la plus coquette possible et partis à la gare. Nabil m'avait proposé de passer une journée à Mandelieu-la-Napoule, une magnifique ville à une quarantaine de kilomètres à l'ouest de Nice. Au programme : Nage avec les dauphins et finir à la journée à la plage Château. J'avais ajouté un petit point au programme mais je ne lui avais pas dit, je voulais lui faire la surprise.

Arrivée devant la gare, Nabil était là et m'attendait déjà. Il était toujours en avance aux rendez-vous, je ne sais pas comment il faisait, mais ce n'était pas le moment de s'en soucier. Je courrais me réfugier dans ses bras : « que ça fait du bien ! » Pensai-je. On se fit un câlin qui dura bien quelques minutes avant que je ne recule un peu pour l'embrasser. Il avait l'air un peu gêné mais cela ne m'avait pas arrêté. Après les embrassades je me détachai un peu de lui, lui pris la main :

- Alors prêt pour cette journée ? lui dis-je avec un clin d'œil aguicheur.

- Absolument ! mais dis-moi, t'as fait quoi à tes cheveux ?

Ah oui, j'ai toujours été blonde depuis ma naissance et cette couleur m'allait bien. Mais on sait tous les clichés qui entourent les blondes. On est l'archétype même de la personne idiote et je ne voulais pas partir à la fac avec ces à priori. Juste après le bac j'avais alors décidé de changer de couleur et de me teindre en brune.

- Euh ça te plait pas ? répondis-je en rougissant.

- Je pense que tu ne réponds pas à ma question là.

Il avait raison ce n'était pas cela sa question. Mais en vérité j'avais peur de sa réaction si je lui donnais mes vraies raisons. Et je me rendis compte que j'étais vraiment idiote de vouloir toujours calculer et prévoir la réaction des gens en avance, de tout le temps vouloir ne pas être stigmatisée.

- En fait j'ai peur de subir les clichés sur les blondes une fois à la fac...

Je m'attendais à ce qu'il rigole, se moque de moi ou même parte en fou rire devant ma connerie mais il n'en fit rien. Il resta silencieux, pensif comme s'il cherchait une réponse acceptable parmi des centaines de mauvaises réponses.

- Je comprends; les gens peuvent être assez lourds avec ça. Mais tu crois vraiment que tu as quelque chose à prouver ?

- Ben non ! répondis-je