Affliction

11 - Le visage de la honte

On reprit le train direction Nice. J'avais passé une superbe journée conclue par une frustration et une humiliation qui a tout gâchée. Je voulais me coucher et ne plus me réveiller avant quelques décennies !

Je me couchai la tête pleine de questions et surtout un fort ressenti contre Nabil. Quel abruti ! il m'a humiliée. Quel garçon de son âge refuserait une telle proposition ? mais franchement qui étais cet ovni au sein de notre planète ? d'où pouvait sortir un garçon pareil ? j'ai rarement été autant en colère contre quelqu'un. Je vivais littéralement une expérience nouvelle. Jamais je ne m'étais retrouvée dans la position de la prédatrice et donc jamais je n'ai connu le rejet.

Mais comme on dit souvent ma fille, la nuit porte conseil. En me réveillant je n'en voulais plus à Nabil mais à moi-même. Comment ai-je pu être aussi stupide et imprudente pour faire une proposition aussi indécente ? je ne me reconnaissais plus. Je faisais les pires choix possibles depuis un petit moment. Nabil devait m'en vouloir en mort. Il fallait que je trouve une solution pour me faire pardonner.

J'allumai mon téléphone et j'avais quelques messages de Camille et Ô surprise un de Nabil ! j'appréhendais un peu. Je ne voulais pas l'ouvrir par peur de ce que je pourrai y trouver. Peut-être était-ce pour me larguer ? il fallait que je sache. Je me préparai au pire. J'ouvris le message : « Comment tu vas ce matin ? j'espère que tu as bien dormi. »

Je n'y comprenais rien. Qu'est ce qui pouvait se passer dans sa tête pour qu'il m'envoie ce message après tout ce qui s'était passé la veille ? tu sais ma fille il y a des gens qui ne disent jamais clairement ce qu'ils pensent. Quand on les fréquente on est obligé de lire entre les lignes, de regarder au-delà des apparences, savoir deviner leur pensées, leurs peines, leurs joies. Ces gens là sont souvent les plus malheureux car ne montrent jamais aucune faille, ni malheur. Ils réconfortent leur entourage, les soutiennent et les font rire sans que personne ne se doute parfois qu'ils sont les plus malheureux. On ne peut malheureusement pas les changer mais seulement essayer de veiller sur eux de la manière la plus bienveillante possible. Nabil était assurément de ses gens-là.

En relisant son message une bonne dizaine de fois, je me rendis compte qu'il voulait à sa manière me montrer qu'il n'y avait pas de malaises. Le message était plus pour me faire me sentir mieux que pour prendre de mes nouvelles. J'étais reconnaissant. Reconnaissant envers lui et envers l'univers qui avait mis un garçon aussi exceptionnel sur mon chemin.

Cette journée se passait plutôt normalement jusqu'au soir à l'heure du diner. Comme d'habitude on était à table à trois. Comme d'habitude mes parents ont raconté leur journée. Et comme d'habitude je me suis ennuyée. Mais rien ne dure dans ce monde malheureusement même l'ennui. D'un coup ma mère voulut que je lui raconte ma journée avec mon amoureux. Je me sentais terriblement gênée mais bon je lui fis un résumé rapide pour pouvoir vite passer à autre chose.

- On devrait l'inviter à venir diner ce weekend, t'en dis quoi ? me demanda ma mère.

J'en disais que c'était l'idée la plus stupide du monde ! je n'avais pas envie de présenter mes parents à Nabil, pas encore et en plus je pense qu'il n'accepterait pas de venir de toute façon. Mais la question de ma mère était purement rhétorique. Elle était presque en train de préparer le menu et la manière de dresser la table. Je ne savais même pas comment demander cela à Nabil.

- Ok je lui demande et je te tiens au courant. Mais s'il accepte il faudra faire un menu sans porc.

Mon père lui semblait pris de court et ne savait pas trop quoi dire mais comme d'habitude il approuvait ma mère. Mais tous deux semblaient pris de court par ma dernière phrase.

- Attends ! c'est un arabe ? demanda ma mère presque inquiète

- Euh c'est un humain maman ! c'est tout ce que je sais ! répondis-je irrité.