6 - Les limites de ma patience

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Après cet après-midi football avec Nabil, et les révélations qu'il m'avait faites je croyais et surtout j'espérais qu'on avait passé un cap. Mais à peine le lendemain je ressentis le retour du Nabil distant et parfois froid. Il répondait à mes messages mais de manière stricte. Il restait néanmoins toujours correct.

Le printemps est supposé être la saison des amoureux ma fille et je ne te parle pas du coté bestial de la chose. Mais la ville de Nice au printemps est juste magnifique. J'ai beau y avoir grandi je ne me lassais jamais de ce spectacle. Le soleil réchauffait non seulement notre peau qui frissonnait avec les dernières fraicheurs témoignant du passage de l'hiver, mais aussi nos cœurs en l'emplissant d'un espoir d'un avenir sentimental meilleur.

Je profitais donc du printemps pour essayer de voir Nabil chaque fois que je le pouvais ou du moins quand il était disponible et ce n'était pas toujours évident. Tantôt il devait bosser ses cours, tantôt il devait faire un truc pour sa mère. Parfois j'en arrivais à me demander s'il ne me fuyait pas mais je devais rester positive. Surtout que quand il annulait un de nos rendez-vous il se montrait très attentionné les jours suivants comme pour se faire pardonner. On arrivait quand même à trouver des petits moments pour se voir et se balader mais rien de bien excitant, je n'arrivais toujours pas à déterminer le type de relation que j'entretenais avec lui.

A chaque fois qu'on se rencontrait je devinais certains traits de son caractère mais il continuait à cultiver le mystère. La dernière fois qu'on s'est rencontré on a profité du soleil pour marcher longtemps sur la promenade des anglais. J'ai arpenté cette promenade des centaines de fois mais cette fois là c'était différent. Elle me semblait plus jolie, plus romantique. En même temps je marchais à coté de l'homme le plus extraordinaire sur terre. Et non je n'exagère pas !

A un moment donné, emporté par mon élan de romantisme, je voulus lui prendre la main mais il esquiva dans un geste maladroit et gêné. J'étais bien plus gênée que lui mais heureusement il savait changer de sujet pour éviter les situations embarrassantes. On finit par s'assoir sur un banc en face de la méditerranée pour admirer le bleu pur de la mer. J'en profitai pour lancer la conversation.

-          Au fait t'es de quelle origine ? lui demandai-je.

Il ne répondit rien et sembla pensif. Il resta ainsi un long moment, je commençai même à me demander s'il avait entendu ma question. Il finit par lever les yeux sur moi et me considéra quelques secondes avant de dire :

-          Et toi t'es de quelle origine Angélina ?

En ce moment-là, si je connaissais assez Nabil j'aurais su qu'il était contrarié. Mais rien ne pouvait m'y préparer.

-          Ben je comprends pas... je suis... française répondis-je prudemment.

-          Parce que je suis pas français moi ?

-          Euh mais t'as bien des origines, non ?

Sans le savoir je m'enfonçai dans ma bêtise à insister comme ça.

-          Donc si je suis ton raisonnement, parce que je m'appelle Nabil et j'ai la peau mate suffit à te faire croire que j'ai des origines ? je sais que ta question est innocente mais réfléchis un peu, en me demandant mes origines tu sous entends que je peux pas être français comme toi, et donc forcément tu me stigmatises. Tu sais je serai pas étonné que tu aies quelques origines mais on t'a formaté dans le sens où les blancs sont les vrais français de tel sorte que tu ne t'es jamais demandé si tes grands parents étaient français... mais moi cela fait à peine un mois que tu me connais et penses déjà que je ne peux pas être français pur souche...

Je rougis, j'avais envie de disparaitre sous terre. Je n'avais jamais imaginé le sous-entendu presque xénophobe qu'impliquait ma question. En plus il avait totalement raison. Plus tard je découvris que mon grand père est arrivé en France à l'âge de 5 mois avec ses parents en provenance des pays soviétiques.

AfflictionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant