20 - Devant Dieu et devant les hommes...

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Pour le commun des mortels, je venais de faire un choix étonnant voire bizarre. Mais pour moi c'était l'évidence même. J'aimais Nabil de tout mon cœur et je ne voulais plus rester une seule seconde sans être légalement sa femme. Ma chère fille, en ce moment-là du récit je ne t'ai toujours pas dit ce que tu veux savoir mais je te promets qu'il n'y a pas de détails superflus. Chaque page, chaque phrase, chaque mot que je t'écris est essentiel pour que tu comprennes mieux mon état d'esprit et surtout ce pourquoi j'ai toujours évité de parler de cette histoire.

Je commençais donc à préparer mon mariage et continuai à ignorer allègrement mes parents bien que je vivais encore sous leur toit. Ce n'était pas une attitude responsable quand on sait que j'avais besoin de leur aval pour pouvoir me marier selon le rite musulman. Pour le mariage civil, j'étais majeure et donc pouvais me passer de leur consentement. Je les réunissais alors sous les incessantes supplications de Manon et leur exposai exactement mon projet de mariage. La tête qu'ont faite mes parents ce jour-là je ne l'avais jamais vue. Ils semblaient avoir vu un ours polaire dans un désert tropical tellement l'incompréhension se lisait sur leur visage. J'avais adopté une méthode brusque et directe car je savais de toute façon que je n'aurais pas leur consentement. J'étais dure avec eux, ils le méritaient et ils le savaient. Je voyais qu'ils ne trouvaient pas leurs mots alors je continuais d'enfoncer le clou. Je leur fis comprendre que de toute façon ce mariage aurait lieu et qu'il n'avait nullement intérêt d'essayer de s'y opposer. Après près de 15min d'un monologue agressif de ma part je leur laissais la parole. Mais aucun d'eux ne voulait s'y aventurait. Ils étaient surpris. Et moi je savourais intérieurement leur détresse.

Je sais que ce n'est pas bien d'en arriver là avec ses parents mais les parents sont censés être le support infaillible des enfants mais eux m'ont lâchée la seule fois où j'ai vraiment eu besoin de lui. Après avoir essuyé ses dernières larmes ma mère me dit qu'ils étaient d'accord avec le mariage mais à contre cœur. J'étais surprise, très surprise mais soulagée aussi. Pour leur faire encore plus mal mais aussi pour ne prendre aucun risque je leur impose une dernière condition : aucun d'eux ne sera présent à aucun des deux mariages. Je voulais que mon oncle et parrain joue le rôle de tuteur. Ma mère étouffa un cri et monta dans sa chambre et mon père me jeta un regard assassin avant de me tourner le dos en disant de faire ce que je voulais.

Je montais dans ma chambre pour appeler Manon et lui raconter tout ce qui s'était passé. Comme d'habitude elle a essayé de me sermonner un peu pour que je ménage mes parents mais elle ne pouvait pas savoir ce que je pouvais ressentir. Je savais déjà que j'en avais fini avec mes parents, je les détestais même en ce moment-là.

Je sentais que mon été allait être particulier. Je venais d'avoir mon BAC et au lieu de préparer sereinement la rentrée, je préparai mon mariage avec un détenu. Ça ressemblait à un thriller ou une blague de mauvais gout. Pourtant j'étais prête à prendre ce nouveau virage. La demande de Nabil pour être transféré à Toulon avait été instruite et acceptée très rapidement. Je ne pouvais m'empêcher de me dire que c'était pour éloigner Nabil de Nice et se débarrasser de leur petit problème de conscience si problème de conscience ils avaient. Bref ce n'était pas pour me déplaire, enfin quelque chose allait dans mon sens. En plus de pouvoir utiliser les unités de vie de la prison de Toulon, ce transfert avait aussi un autre but. En effet seul le procureur pouvait autoriser la célébration d'un mariage d'un détenu et je ne voulais pas risquer que celui de Nice nous fasse un mauvais coup, après tout c'est le beau père de Camille.

Malgré mon emploi du temps serré à cause des préparatifs je me débrouillais pour aller chaque jour rendre visite à ma future belle-mère pour prendre de ses nouvelles et parfois lui faire quelques courses. Dès que le transfert de Nabil avait été fait, j'ai automatiquement relancé les demandes de visite pour Awa et moi. Mais cette fois nous avons aussi demandé une autorisation de célébration du mariage au procureur. On avait fixé la date pour l'avant dernier weekend du mois d'aout. En attendant on procéda à la célébration du mariage musulman. Dans l'esprit de mon oncle c'était plutôt une formalité, vu que cela ne changeait rien à nos différents statuts légaux mais dans mon esprit cela changeait tout. Je pourrais enfin me considérer comme la femme de Nabil.

Le mariage a été célébré par l'imam de la mosquée de la Madeleine. Y avait mon oncle qui représentait mes parents l'oncle de Nabil qui vivait à Marseille et quelques amis de la famille de Awa. L'imam me remit 50 euros de la part de Nabil comme mahr qui apparemment était une obligation dans le droit musulman. En effet l'époux doit faire un don à sa fiancée avant la célébration du mariage. Après des rituels auxquels je ne comprenais rien, l'imam fit un joli discours sur les obligations des époux entre eux. Il mit l'accent sur le fait qu'on devait se soutenir et s'entraider dans toutes les circonstances. A la fin de la cérémonie il me prit à part pour me donner quelques conseils d'une sagesse extraordinaire.

En rentrant chez moi ce soir-là, mes parents m'attendaient au salon malgré l'heure relativement tardive. Je sentais que ça allait être gênant mais j'étais prêt à être désagréable s'il le fallait. Ils sentaient que j'étais sur la défensive et bizarrement je les sentais sincèrement désolés. Peut-être je me trompais.

- Nous t'attendions dit ma mère d'une voix timide.

- Je vois ça ! répondis-je agacée. Et vous voulez quoi ?

- Angelina ! aboya mon père mais ma mère l'arrêta d'un signe de la main.

- On voulait te féliciter pour ton... mariage

- Euh merci répondis-je surprise. Maintenant si vous voulez bien m'excuser je vais aller me coucher.

- Non attends dit ma mère. Tu comptes faire quoi à la rentrée ?

Enfin ! cela faisait des semaines que j'attendais cette question. J'avais le choix de faire plusieurs choses mais j'allais faire ce qui semblait le moins valorisant aux yeux de mes parents. Crois-moi ou pas ma fille mais je ne le faisais pas pour les embêter, loin de là. En fait je voulais faire un DUT en alternance pour pouvoir gagner de l'argent pendant mes études parce que Nabil aura sûrement besoin d'aide là ou il était et je me devais de l'aider après tout c'est ce que je venais de jurer devant l'imam. Mais le fait que mes parents pussent croire que je le faisais pour les mettre en colère était un bonus dont je ne voulais pas me priver. Aussi quand je leur dis ce que j'allais faire je n'ai pas donné les raisons pour lesquelles j'allais le faire. Ils étaient dans l'incompréhension totale et moi je savourais intérieurement. Avec le recul, aujourd'hui je me dis que j'allais un peu trop loin avec eux même si je leur en veux encore mais seulement j'aurais pu gérer cette situation avec un peu plus de maturité.

Bref après avoir bien torturé mentalement mes chers parents, je montais dans ma chambre pour tenir mon habituel chat sms avec Manon avant de m'endormir. On parlait essentiellement du mariage qui arrivait à grand pas. Nous avions obtenu toutes les autorisations nécessaires et avait la possibilité d'amener jusqu'à 50 personnes à condition de demander un permis de visite pour chacun d'entre eux. Mais nous ne voulions de toute façon pas avoir autant de monde à notre mariage. De mon coté j'avais juste invité mon parrain, Manon et Cédric (mes deux témoins). Nabil avait pour sa part invité un garçon de sa classe. Il m'avait déjà parlé de lui mais ne l'avait jamais présenté officiellement. C'était son témoin. Y avait aussi sa mère naturellement.

Le jour J, on était convoqué à 11h, donc à 10h on était déjà tous sur place. Le procureur est arrivé un peu avant 11h pour célébrer notre union devant la loi. En dehors de nos invités respectifs, il y avait le directeur de la prison ainsi que deux gardes. Tous les invités étaient très bien habillés. Après nous avoir lu nos droits et devoirs il nous demandé si nous avions des vœux à échanger. Je sentis Nabil se crisper et je comprenais pourquoi alors je répondis « non » au procureur. Il procéda alors à la fameuse question :

- Monsieur Nabil Ahmed Abdou Baraka, voulez-vous prendre pour épouse Madame Angelina Natacha Romane ?

Nabil se tourna vers moi et me considéra comme un objet précieux qu'il fallait protéger. Il me regarder avec des yeux que je n'avais jamais vus auparavant. Quelque chose brillait dans son regard et des idées semblaient se bousculer dans sa tête. Une larme coula le long de sa joue. Il se racla la gorge et se tourna à nouveau vers le procureur...

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Salut les amis! j'espère que votre weekend se passe bien.

à très vite,

Bak0ura

AfflictionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant