12 - OUI ! bien évidemment...

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Un milliard de questions me traversaient l'esprit après cette fameuse soirée. Je n'avais pas peur que Nabil me quitte, non! loin de là. Je sais même qu'il s'emploiera à me réconforter mais je me sentais honteuse. Je venais de me rendre compte que mes parents étaient très à l'aise avec le racisme. Et en réfléchissant un peu, ils l'ont toujours été. Je me rappelais déjà plus jeune les petits commentaires qu'ils faisaient sur les gens de couleur quand ils regardaient la télé. Ils se disaient que c'était drôle mais maintenant je sais que ce n'était que du racisme ordinaire.

Ma fille, notre monde est malade ! les blancs se moquent cruellement des noirs et autre arabes ou asiatiques à cause d'un sentiment de supériorité très mal placé. Les noirs se victimisent et pourtant sortent des réflexions sur les autres qui sont plus que blessant. Et je ne te parle même pas des autres. Chaque société se plaint du racisme et pourtant en y regardant de près chacun est grand acteur de ce racisme. L'allemand se croit supérieur au français, le français méprise le belge. Le africains ne se considèrent pas entre eux. Le peul voue une haine viscérale au wolof, qui lui croit que de toute l'Afrique c'est le seul qui est noble... ce n'est que quelques exemples ma chère, mais ceci pour t'illustrer à quel point notre monde est malade.

Nabil m'a appris à regarder au delà des apparences, des différences. A juger l'être humain par sa valeur et non pas par sa couleur, ethnie ou religion. Je me sentais trahie par mes parents et naturellement je n'ai pas trouvé le sommeil ce soir-là. D'habitude quand je n'arrivai pas à dormir à l'époque, Manon me tenait toujours compagnie par sms mais hélas je ne pouvais compter sur elle ce soir-là. J'essayai donc de contacter Camille et elle en a profité pour me faire mille et une reproches. Et elle n'avait pas tellement tort, j'étais à fond sur Nabil au point d'en délaisser le reste. Mais on se réconcilie rapidement et je lui racontai ma soirée. Comme d'habitude elle était très élogieuse sur Nabil.

La semaine se passait bien et j'arrivai tant bien que mal à oublier ou du moins ne plus penser à la honte ressentie lors de cette soirée. Je n'arrivais cependant pas à pardonner à mes parents et cela se ressentait. L'ambiance à la maison était assez tendue et j'évitai allègrement de croiser mes géniteurs. Heureusement Nabil était là pour me changer les idées. Inutile de te dire que je ne restai jamais 30 minutes sans avoir de ses nouvelles. Je lui demandai si c'était possible de passer le voir chez lui. Je t'avoue ma fille que c'était clairement par curiosité. Je voulais voir ce à quoi ressemblait l'antre de cet homme si mystérieux. Mais pour passer du temps avec Nabil n'importe quel prétexte était bon. Cependant la curiosité mal contrôlée n'est pas bon allié. La curiosité amène la méfiance, la méfiance guide vers la paranoïa, la paranoïa conduit inévitablement à la folie...

Nabil accepta directement ma proposition et me demanda de passer samedi après midi 15h30. Je ne comprenais toujours pas sa manie pour la précision horaire mais ça faisait partie de son charme. J'espérais rencontrer sa mère mais il me dit qu'elle devait passer voir une de ses cousines qui vit à Marseille. Ce n'était pas très grave, surtout que cela voulait dire que nous allions avoir l'appartement pour nous deux...

Le jour J, pour faire bonne impression, je me fis très belle et partis de chez moi vers 14h pour avoir une chance d'arriver en avance pour une fois. Mais dans la vie, comme l'expérience nous l'a montré, chacune de nos actions a des répercussions... je suis arrivée précisément à 14h48 au pied de l'immeuble que Nabil m'avait indiqué et l'appela. Il me proposa de monter, mais je le sentis un peu surpris. Arrivée au bon étage je vois le numéro de l'appartement. La porte était entrouverte. Je toquai et une dame d'une cinquantaine d'année ouvrit. Elle était grande et très élégante mais son visage semblait marqué par la lassitude ou les épreuves. Elle devait être magnifique dans sa jeunesse. Sa peau était d'un noir sombre et uniforme, ses grands yeux noirs semblaient séduire le monde. Elle portait une longue robe beige et un foulard vert olive sur la tête.

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