Immédiatement, il se rendit compte de ce qu'il avait fait, et la fille comprit également. Ils se regardèrent un moment sans dire un mot, horrifiés.
Puis la fille prit une grande inspiration, et lui dit également son nom.
Ils restèrent encore un temps silencieux. Chacun savait qu'ils venaient de passer un pacte de confiance absolue, et qu'ils ne se connaissaient même pas. Mais ils savaient confusément que ni l'un ni l'autre ne le trahirait.
Finalement, la fille se secoua, radoucie :
- D'accord, mais qu'est ce que tu fais ici ?
Voyant qu'il hésitait à le lui dire, elle expliqua :
- Moi, je suis le cursus des pilotes. Je viens lire ici pendant la nuit, par ce qu'on n'a pas le droit d'utiliser de la lumière passé une certaine heure au dortoir. Évidemment, je ne devrais pas être ici, mais je viens quand même.
Une lueur dans les yeux de la fille le défiait de la blâmer pour ce qu'elle faisait.
- Je cherche une Professeur, dit le Docteur. Je pense qu'elle a disparu. Elle n'est pas dans son bureau du côté de l'Académie des garçons, et elle n'est pas ici non plus.
Les yeux de la fille s'écarquillèrent.
- Tu es venu jusqu'ici en passant par les bureaux des professeurs sans te faire prendre ?
Le Docteur acquiesça.
La fille prit l'expression d'un artisan qui reconnaîtrait le travail bien fait chez un confrère.
- C'est quel Professeur ?
- Le Professeur des Machines. Je ne l'ai pas vue depuis Samedi dernier.
- Ah, vous avez cours avec elle le Samedi ? Je ne peux pas t'aider, j'ai cours avec elle le Jeudi. Tu l'as vue après moi.
- J'ai peur de lui avoir créé des problèmes, confia le Docteur.
La fille eut une moue de consternation.
- J'aime bien cette Professeur, expliqua-t elle.
- Moi aussi, dit le Docteur.
- Je peux t'aider? Demanda soudainement la fille.
Le Docteur, pris par surprise, bafouilla un « oui ». Il le regretta immédiatement, par ce qu'il aimait opérer seul, et qu'il n'avait pas envie d'entraîner sa nouvelle amie dans des ennuis plus que certains, mais au fond, il avait vraiment envie d'avoir quelqu'un à ses côtés. Et évidemment, il était curieux de la connaître mieux.
- Tu peux m'appeler Sam, lui dit-elle. Pour des raisons de facilité.
Voyant qu'il restait interdit, elle ajouta sur le ton qu'on utiliserait pour être certain qu'un petit enfant a compris :
- Ne va pas répéter mon vrai nom sur tous les toits. Sam, c'est le diminutif de Samantha. Un prénom terrestre, expliqua-t elle en baissant les yeux.
- Dans ce cas, répondit-il, tu peux m'appeler Docteur. C'est le nom que je me suis choisi.
- Docteur, hein ? Si tu veux. Tu t'intéresses à la médecine ?
- Oui, je... Attends, il y a eu un bruit ?
Ils se turent. Le bruit s'approchait.
- On a dû nous entendre, chuchota rapidement Sam. Sur le fauteuil, vite!
Le Docteur s'exécuta dans la panique. Il se recroquevilla sur le fauteuil ; Sam s'assit à moitié sur lui, coupant la circulation dans sa jambe gauche, et étendit le pled sur eux deux de façon à cacher le Docteur. Puis elle fit semblant de dormir.
Une lumière s'approcha, suivie de près par une Dame du Temps. C'était la Bibliothécaire.
Le Docteur ne voyait rien de ce qui se passait, mais il se tint immobile.
Sam fit semblant de se réveiller en sursaut.
- Oh ! s'exclama-t elle. Je suis désolée, Madame, je suis venue pour lire tout à l'heure et je me suis endormie...
- Je ne t'ai pas vue quand j'ai fait ma ronde de fermeture, dit la femme d'un ton dubitatif.
- J'étais ici, je vous assure ! Je lisais « Orgueil et Préjugés » ! Magnifique roman. Les personnages, les situations...
- Oui, oui, la stoppa la Dame du Temps. Allez, ça ira pour cette fois. Retourne à ton dortoir.
- Je peux garder le livre ?
La Dame du Temps acquiesça et retourna en grommelant d'où elle était venue, probablement pour se rendormir.
Sam bondit du fauteuil, emportant le pled avec elle.
- Ça va ? Chuchota-t elle.
Le Docteur grogna en se relevant. Il avait mal au dos et des fourmis dans les jambes.
- On part d'ici, dit-elle quand il se fut dégourdi. Suis-moi.
Le Docteur la suivit hors de la Bibliothèque. Sam portait un uniforme de l'Académie similaire au sien, et ses cheveux bruns étaient séparés en deux longues nattes. Elle devait avoir son âge, ou un peu plus jeune ; ils avaient sensiblement la même taille.
- Je me suis rhabillée après m'être couchée, expliqua-t elle en voyant qu'il la regardait. Comme ça, si je me fais prendre, au moins je suis présentable. Alors, tu as un plan ?
- Pas vraiment, dit-il. Je comptais aller y réfléchir dans la bibliothèque.
- Hum. Je pense qu'on devrait trouver un endroit où personne n'ira regarder.
Ils marchèrent sans but un moment, puis le Docteur se souvint des simulateurs.
- On pourrait aller se cacher dans un des simulateurs, proposa-t il, personne ne les utilise sauf le Professeur que nous cherchons.
Sam reconnut que c'était une bonne idée, et ils descendirent quelques étages le plus silencieusement possible. Ils reprirent le couloir qui menait aux machines. La voie était miraculeusement libre ; ils coururent jusqu'au simulateur numéro trois, et s'y enfermèrent.
- Docteur ? Dit Sam alors qu'il refermait la porte.
Il sentit immédiatement que quelque chose n'allait pas. Déjà, la lumière était allumée, même si elle restait tamisée. Il se retourna et découvrit son Professeur des Machines, à terre et inconsciente près de la console centrale. Au-dessus d'elle se tenait la silhouette menaçante d'un enfant de huit ans.

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Gallifrey
Ciencia FicciónGAGNANT DES WATTYS 2019 - FANFICTION Gallifrey - notre enfance, notre foyer... Il y a très, très longtemps, quelque part dans la galaxie de Kasterborus. Deux enfants courent dans un champ. Les feuilles argentées des arbres scintillent dans la brise...