Justin et compagnie

Le temps des secrets

Les premières heures de cette journée de rentrée s’étaient faites en compagnie du titulaire de classe qui avait expliqué les différentes règles de l’école. Le classique quant à la tenue vestimentaire, au comportement, aux retards, etc. Les sorties de cours, le respect avaient également une place importante dans son discours. Ensuite avait eu lieu le traditionnel vote pour le délégué de classe.

Certains de mes condisciples s’y étaient préparés durant les vacances. Une fois élu, celui-ci devait proposer directement et sans autre préparation, une activité pour faire connaissance.

-Le jeu est simple, expliqua Jason, il s'agit de chacun dire un grand secret sur nous que les autres ne savent pas. Ça permet de faciliter l'entende et la confiance. Mais je préviens tout de suite que ce n'est pas dans le but de se moquer de qui que ce soit !

Nous étions tous assis par terre en tailleur, pour former un grand rond.

-Comme il se doit, je commence. Je m'appelle Jason Carpentrie, j'ai douze ans. Ma matière préférée est les maths. Alors, ce que vous ne savez pas de moi, c'est que mon père que je fais passer pour mort est en fait bien vivant mais qu'il est en prison. Je ne le dis pas pour me plaindre. Il a eu ce qu’il méritait et aurait dû réfléchir avant de commettre tous ces vols. Je le dis juste car j’ai décidé d’être
honnête.

Ça commençait fort. Il y eut un froid. Jason avait toujours prétendu que son père était décédé dans un accident de voiture.

-Alors, qui prend la parole ? Si on allait dans l'ordre ?

On était assis en rond et c'était Frédérique qui était juste à côté de lui.

-Bien, je m'appelle Frédérique, j'ai onze ans. J'ai un secret qui ressemble à celui de Jason : à propos de mon père. Je n'ai jamais dit qu'il était mort mais je n'en ai jamais parlé car en fait il est parti.

A ce moment, elle me regarda d'un air interrogateur et je lui fit "oui" de la tête pour lui dire qu'elle pouvait tout raconter, que ça ne me dérangeait pas.

-Il est parti vivre avec celui de Justin en nous abandonnant, nos mères et nous. Et depuis, on ne les a jamais revus. Ils sont partis quand nous n’avions que quelques mois. Ils ne nous manquent pas parce que nous ne les avons pratiquement pas connus. En échange nos mères sont devenues de très très bonnes amies et nous aussi.

Je vis l'étonnement se marquer sur de nombreux visages dont celui de Maxime qui ne connaissait pas la vérité. Nous n'en avions plus jamais parlé depuis ce jour où, au camp, il m'avait demandé ce qu'était devenu nos pères.

Les secrets défilèrent. Ainsi, j'appris que nous avions dans la classe un garçon cardiaque, une fille qui avait déjà été saoule, une autre qui avait déjà été prise à voler dans un magasin.

Alexia nous avoua qu'elle ne parlait pas beaucoup car il lui arrivait de bégayer quand elle était fatiguée. Julien nous dit que sa passion était de faire de la danse, peu commun pour un garçon.

Arriva le tour de Madyson, une jeune fille assez taciturne. Elle commença par devenir toute rouge.

-J'ai trouvé, lança Benoît, tu peux changer de couleur à volonté !

Un fou rire général commença mais Jason réclama de la laisser parler. Et ça donna un chuchotement très confus et très rapide :

-Jefaisencorepipiaulit !

Personne n'avait rien compris.

-Pardon, demanda Jason, peux-tu répéter.

Elle était rouge, sur le point d'exploser mais articula beaucoup mieux :