Chapitre 5 - POV 3.2 (Nuke)

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Show time!

Quand mon pseudo est prononcé par le présentateur, il résonne en écho dans toute la salle et l'adrénaline semble remplacer mon sang. Il bande mes muscles, enflamme mes nerfs et ma peau. Et c'est la sensation la plus kiffante qui existe!

Je réajuste la casquette qui protège mes yeux de l'éclat brûlant des spots. Sur le rythme du dubstep, les lumières chamarrées de la gigantesque salle clignotent plus que dans un night club autour des écrans géants qui retransmettent notre entrée en scène entre les RIP_Bro et les Reapers. C'est de l'événementiel de haut niveau. Le public hurle, bras levés, applaudit. Ils sont des milliers! Ils veulent voir du beau jeu et nous comptons leur en donner, ils le savent.

Mais dans quelques instants, quand la partie commencera, le vide se fera en moi. A lors, la sérénité régnera. Il ne restera que les calls de mes mates et les sonorités bien connues du jeu. Même le clavier et la souris se dissoudront, fusionneront comme une extension de mes mains, se souderont en phalanges supplémentaires. La plénitude sera atteinte.

Iffi, jette quelques punchlines bien senties au micro, histoire de chauffer la salle déjà en feu et d'affirmer notre suprématie aux adversaires. Steppe, débarque et réplique pour la galerie. Un tournoi pro, c'est entre la boxe et le catch en terme de spectacle: beaucoup de mises en scène et de vent brassé.

Pour les joueurs, le Vrai ne se passe qu'une fois chacun connecté. Les PGM savent ça... A part visiblement la team de rookies qui suit les Reapers sur scène: le gamin (Stradivarius, si je n'm'abuse) prend le micro et chante haut et fort que c'est un père qui fait le gamer et que les Reapers n'ont donc pas leur place dans un quelconque tournoi qui implique des touches. Il est de notoriété publique que les Reapers sont composés d'orphelins au moins de père. Étant moi-même élevé par ma mère depuis que j'ai dix ans, le coup porte aussi durement qu'à ceux visés.

« Il est encore temps de vous reconvertir dans la crapette. » conclut le gosse avant de rendre le micro au présentateur.

Une bonne partie du public hue ou crie tandis que se succèdent en moi un pincement de douleur, puis une vague de colère proche de la rage, jusqu'à finalement faire tomber la lassitude résignée sur mes épaules. Qu'ils sont lourds ces gamins! Il a l'air fier de lui en plus! avec son petit sourire suffisant. Tssssssss...

A l'expression et la posture de Steppe, il en est resté à la rage. Les autres sont juste trop choqués pour réagir.

Je ne peux pas laisser cet arriviste arrogant ruiner les games de qui que ce soit à son avantage.

Je profite de la cohue des allées et venues des présentations de chauffe pour frôler discrètement l'épaule de mon némésis en me tournant de biais de sorte à lui parler tout en dissimulant mon visage aux innombrables caméras. « Ne le laisse pas t'entraîner: quoi qu'il arrive, on va laver ce p'tit con à notre façon! » Il me jette un coup d'œil incertain le temps de me dévisager. Un petit sourire finit par détendre ses traits.

Il me tend la main que je serre sans hésitation (J'ai du gel désinfectant en poche!). « Que seul le meilleur gagne alors, bro.

— Comme toujours... »

Nous nous éloignons chacun vers nos postes opposés.

C'est maintenant que ça commence vraiment.


Pour le laver, je l'ai lavé! A l'ancienne! avec du talent et des mécaniques étudiées. Sa faute aussi: son équipe a tenté de venir nous chercher, comme si nous étions des bleus pas prêts à les recevoir. Mes mates se sont brillamment adaptés à mes calls, m'ont couvert et secondé, nous assurant un max de points. A la pause, je peux dire que nous sommes à la fête rien que pour ça!

Versus [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant