Chapitre 58 - POV 3.22 (Nuke) Suite alternative

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Nous avons perdu les repères que nous avions pourtant si simplement trouvés et établis.

Avant "le dimanche où je ne me suis pas rendu à l'office" (ou "ce dimanche" pour faire plus court – comme je l'appelle désormais de sorte à ne plus le désigner comme étant le jour des meurtres), je dormais toujours sur le côté gauche, et Nina sur le dos, de telle sorte que dans notre sommeil, nos contacts étaient limités à nos bras, à nos mains liées. Ce qui me convenait parfaitement (on sait mon rapport au toucher non voulu) et ne semblait pas la gêner tant qu'elle pouvait être sur le dos ou le ventre, à rire ou marmonner dans sa torpeur.

Après une demi nuit difficile dans notre lit, il est évident que ça ne fonctionne plus.

Je suis dérangé par mon épaule bousillée qui ne supporte pas d'avoir sa circulation sanguine limitée; gêné dans ma respiration par le poids porté sur ma cage thoracique; et plus généralement, désorienté par la perte de naturel de la position. Dormir sur l'autre côté me semble encore moins instinctif, d'autant plus que ça me fait tourner le dos à ma chérie. Quant à elle, même dans son sommeil, elle cherche à présent le plus de contact possible, tel qu'elle le faisait lorsque nous étions confinés à l'étroitesse d'un lit d'hôpital. Ça ne me dérange plus, hormis qu'elle cherche à se blottir sous mon bras invalide (qui ne supporte pas d'avoir sa circula-... Je l'ai déjà souligné.).

La seconde nuit d'essai, je suis à bout de souffle avant même que Nina ait pu s'endormir, m'obligeant à me rabattre sur le dos et l'oxygénothérapie. J'ai bien conscience qu'elle m'ait vu au pire de mon état et que je ne ressemble déjà plus à grand chose de ce que j'étais. Mais quand même: dans notre lit? la sonde nasale?! Ça tue le glamour!

Ça me rend confus. Embarrassé. Pour ne rien arrangé, mon bras tout entier est à la fois insensible et endolori. Je plie et déplie les doigts péniblement pour faire y revenir une circulation douloureuse.

« T'es encore en train de jouer à l'Ekun, me reproche Nina dans le noir.

— Tu ne m'aides pas, chérie!

— Ok. Qu'est-ce que je peux faire?

— J'en sais rien. »

Après une poignée de secondes, les draps se froissent et le matelas se courbe légèrement sous elle. « J'ai une idée. Approche par ici. » Je ne suis pas convaincu mais me plie à son exigence: jusque là, jamais une de ses intentions – aussi insensées ou fougueuses ont-elles pu paraître – ne m'a déçu. « Encore. » Je me décale davantage sur le matelas. « Encore. » Je ricane, incertain, et obéis. « Parfait. Ne bouge plus. »

Elle grimpe à califourchon sur mes hanches. Avant que j'ai le temps de réagir, elle repasse l'autre jambe par-dessus les miennes. Dix battements plus tard, elle se presse contre mon flanc, tête sur mon épaule et main sur la croix de ma Nina. « Mieux? » Je referme mon bras sain autour d'elle. Et je ris sourdement: je me prends la tête comme un con alors qu'il lui suffit d'une seconde pour décréter que nous avons juste à changer de côté. « Oui. Merci, chérie.

— Dors maintenant. La journée a été longue. »

Ça oui, elle l'a été. Mais grâce à elle – encore et toujours – j'ai pu retrouver une connexion avec l'univers que je croyais tellement loin qu'il serait impossible à rattraper.

J'embrasse ses cheveux. « T'as changé de shampoing, remarqué-je.

— Il n'est pas fabriqué en Europe.

— Importe-le.

Sweety, rit-elle comme face à une lubie insensée. Je ne vais pas faire importer mes produits de douche!

Versus [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant