Chapitre 62 - POV 3.23.2 (Nuke) Suite alternative

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Jusqu'à ce que Nina quitte l'appart', deux jours plus tard, pour l'interview de la team qui veut la recruter, le malaise persiste en elle. Je n'agis pourtant pas différemment de l'habitude. Je suis attentionné sans l'envahir; je l'embrasse avec tendresse sans concupiscence; je la couve de tout ce que je peux lui offrir au quotidien. L'atmosphère s'allège néanmoins sensiblement quand elle ferme la porte derrière elle après avoir reçu mes encouragements d'un sourire.

Je baisse les yeux sur le clébard assis à mes pieds. Comme moi, il lâche l'entrée des yeux pour me rendre mon regard. Il agite doucement la queue. « Quoi? » Il la remue plus énergiquement en se dressant pour bondir sur ma jambe. « Il serait temps de t'apprendre les bonnes manières! » maugréé-je.

Je soupire doucement dans le silence de l'appartement. J'ai l'impression d'être déserté de moi-même.

Au delà de la baie, une fine pluie couvre la grisaille parisienne. Je pourrais... sortir? Le kiné est déjà passé et avec un temps pareil, il ne risque pas d'y avoir foule au parc. Je pourrais mettre un hoodie, un col et le masque... Ce dernier repose sur l'une des étagères de la bibliothèque où Nina a installé ses quelques cadres photos et figurines Totoro que ses viewers ne manquent pas de lui offrir à chaque convention (Une private joke à propos de l'aveu en live qu'elle dorme avec une énorme peluche du personnage. Aujourd'hui, c'est autour de moi qu'elle ferme les bras pour s'endormir.).

Le masque de tissu entoilé noir est vaguement formé au visage depuis l'arête du nez jusqu'au cou, et s'attache derrière les oreilles. Nina l'a commandé comme une taquinerie sur ma capacité à me rendre à InterStream sans faire un pas à l'air libre en passant d'un garage souterrain à l'autre. C'est juste une blague à dix euros, mais je l'aime bien. (Même s'il figurait sous la désignation trollesque de "korean mask medical fashion") Je dois bien avouer que de ne plus avoir à mettre de masque médical ou de gants me stresse. Je continue d'en mettre au bureau où j'essaye de me présenter toutes les deux semaines.

Alors... Je pourrais... sortir. Non? Sûrement... Oui.

C'est ce que je fais. Déterminé, néanmoins les nerfs à fleur de peau.

Avec Skill. 

Je passe quatre heures dans le parc quasi désert où je courais autrefois avec Wifi. Je regarde régulièrement derrière moi pour m'assurer que je ne suis pas suivi, et me fais quelques flips: je fais un large détour pour éviter un groupe d'ados rassemblés autour d'un banc de crainte qu'ils veuillent m'aborder à cause du chiot (toujours un aimant à gens ces petites bêtes); un klaxon et la pétarade d'un pot d'échappement me font sursauter et faire volte-face comme un cinglé; un cri distant n'est pas loin de me mener à la crise de panique. Non, je n'ai pas de TPST!

Mais dans l'ensemble, c'est moins terrible que prévu.

Je cours quelques kilomètres sans forcer et essaye le chiot aux ordres de base. Il me garde concentré et est plutôt réactif. La fatigue aidant, il comprend qu'il est plus facile pour lui de chercher la distraction là où je me trouve plutôt que dans l'environnement. Il court bientôt à côté de moi à la recherche de mon intérêt au lieu d'errer à l'encontre de la laisse qui nous lie.

Ce n'est pas un animal docile, mais réceptif. Il n'est pas du genre à profiter de ce qu'on lui laisse sans se rebeller. Il lui faut un travail, un objectif capable d'éveiller son intérêt. Comme moi!

Le soir tombera bientôt. Lorsque nous prenons le chemin du retour, je me sens mieux que depuis des mois. L'air frais, la pluie, et le sport m'ont indéniablement fait du bien. Je n'ai pas l'impression d'avoir abusé de mes forces et n'ai mal nulle part. Pas même au bras que j'ai pourtant sollicité sous l'orthèse compressive.

Versus [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant