Aimez-vous les uns les autres

Bouquets et textos

Ses mains étaient remplies de terre. Il aimait ça.
C'est vrais que c'était dur, mais il voulait gagner son indépendance le plus vite possible. Ainsi, il étudiait le jour et, le soir et le weekend, travaillait chez un fleuriste de Soho. Ses talents de compositeurs de bouquet étaient très appréciés.

"Hey, Nanny!"
Dès que son employeur avait su qu'il étudiait la puériculture, il avait gagné ce surnom, encore. Il termina son rempotage en songeant à Warlock pendant quelques instant. Le petit garçon venait d'entrer en première à Juniperfield et lui écrivait très souvent.
"Nanny, je te cause! On a eu une commande de la librairie des Chouettes. Je dois absolument aller chercher ma fille, est-ce que tu veux bien composer l'arrangement et livrer pour moi?
-Yep patron.
-Tiens, voilà les contraintes."

Une écriture régulière avait inscrit, au porte-plume ancien, sur un petit bout de papier: "Fleurs coupées, de saison, selon l'inspiration."
C'était vague. Mais il avait accepté. Il regarda dehors, et repensa à cet automne, trois ans plus tôt. Avec une base d'hortensia, il pris quelques fleurs de cotons, des roses sauvages au teint doux, et utilisa des feuilles d'heuchère pour donner du volume. Une fois préparé, il laissa l'autre vendeur seul pour arpenter les rues de Soho.

Il traina un petit peu, admirant les vêtements aux vitrines. C'était Soho, donc il travaillait dans une élégante robe noire, avec une ceinture d'argent pour souligner la finesse de sa taille, et tout le monde s'en fichait. Il avait trouvé une robe à longue manche, idéal pour cacher les vieilles cicatrices à ses poignets.

Il fini par ouvrir la porte de la librairie. Une voix émergea de derrière les rayonnages.
"Bonsoir, toutes nos excuses, mais nous sommes sur le point de fermer...
-Une livraison pour Madame Shadwell? de la part de son cher époux, à ce que j'ai compris de la carte.
-Oh! excusez-moi, mademoiselle, entrez, je vous en prie, je vais... Tantine? Tantiiine?"
Une petite dame à l'impeccable mise en plis débarqua dans la librairie.
"Oui, Ezra?"
La lumière déclinante du jour avait rendu la librairie très sombre. Anthony regarda par dessus des lunettes et étouffa un cri de surprise.

Il fourra le bouquet dans les bras de la libraire et partit sans demander son reste.

Les commandes se firent régulière.
"Es-tu sûr que tu ne veux pas travailler à temps plein, Anthony? Tes bouquets ont beaucoup de succès." Mme Shadwell avait beaucoup apprécié sa création et mettait un point d'honneur à fleurir sa librairie chaque semaine.

Heureusement, il n'était pas toujours obligé de livrer. Mais un soir, son patron fut de nouveau occupé ailleurs, et il n'eu pas le choix.

Il laissa de la monnaie supplémentaire dans la caisse et composa un second bouquet. Il y glissa des myosotis et des baies de genèvrier. Tout était prêt.

Cette fois-ci, il était revenu à un sobre jean skinny, mais sa démarche était devenue si féminine que le doute restait permis. Surtout avec les boucles rousses qui pendaient dans son dos. Il se dirigea vers la librairie, remplis d'appréhension et d'excitation mèlée.

Dès fois, je peux me montrer clémente. Dès fois, je me permet de jouer avec le destin.

Ce jour-là, c'était samedi, Ezra avait rouvert une vieille boite de rangement et retrouvé son ancien téléphone à clapet. Par curiosité, il l'a mis à brancher. En le rallumant, il a vibré pendant plusieurs minutes, à tel point que le vieux sergent Shadwell (à la retraite depuis quelques années) avait traité l'appareil d'engin du malin.

Quand il s'est enfin calmé, Aziraphale a commencé à ouvrir les messages, étalés sur plusieurs mois... voir années.

Micha < T'es ou? >

Micha < Hey t'aurais pu prévenir que tu changeais d'école! 😭 idiot >

Daphné < Essaye de lui pardonner 🙏 >

Gabriel < Est-ce que tu vas bien? >

Lije < Mec t'as raté la deuxième réunion de l'AGS, 'spèce de lacheur. 🙄 >

Uriel < Tu reviens l'année prochaine? >

Sandy < Pardon. Tout était de ma faute. >

Sandy < Sérieusement. 😫 >

Sandy < Ton amoureux ne va pas bien, il n'en peu rien! Je vais payer pour ça, mais je t'en prie, ne t'empèche pas d'être heureux. >

Gabriel < Ezra? >

Sandy < Je ne voulais certainement pas te faire de la peine. >

Hady < C'est de ta faute. Il a failli mourir! Réponds au moins! 😤 >

Gabriel < Anthony va bien, mais ça a été juste. Ce n'est pas sa première tentative de suicide. On espère que maintenant qu'il voit un psy, ça ira. >

Bee < Tu me manques, pauvre tache. 🤟 >

Daphné < Passe de belles vacances, où que tu sois. Donne nous des nouvelles. ⛱ >

Gabriel < Bonne rentrée. Que comptes tu préparer comme concours pour les études supérieures? N'hésite pas à m'appeler. Tu me manques. >

Micha < Mais réponds, lil bro. 😢 >

Hady < Tu sais pas ce que tu rates, c'est trop bien la sixième. Reviens, tu manques à la présidente. 😅 >

Uriel < Ouai mon secrétaire a raison tu me manques. A Gabe et Micha aussi. 😘 >

Bee < A toi je peux le dire, vu que tu réponds pas de toute manière 🤷‍♂️ >

Bee < J'ai embrassé Gabe après la réunion de l'AGS. Il a été gentil. En tout cas il m'a repoussé gentiment. Le *** 😡 >

Bee < C'est un secret, ok? Il faut que je l'oublie 😔 Comment tu fais pour ne plus penser à Anthony? >

Gabriel < J'ai souvent prié le seigneur pour toi. J'espère que tu trouves ton bonheur quelque part. >

Gabriel < J'entre au séminaire de Canterbury après l'été. Veux-tu qu'on se voie avant? Je pense entrer dans un monastère. Tu sais que j'hésitais.>

Gabriel < Si c'est le cas, nous ne nous reverrons jamais, je pense. >

Gabriel < Je veux trouver le monastère le plus isolé et le plus silencieux de l'univers. >

🐍😇

Demain je posterais le dernier chapitre très tôt dans la journée car je pars au salon du livre jeunesse à Montreuil (et que je prends l'autocar vers 8h). Et si j'ai encore de la batterie quand je rentre, je profiterais du voyage retour pour poster le premier chapitre de ma prochaine fic, en espérant que tout ça vous plaira!