- Vous n'êtes pas très grande pour vos seize ans.La dame qui m'observe me dépasse d'une tête. Mains croisées dans le dos, cheveux blancs coiffés en un chignon haut, elle porte une longue robe noire brodée d'argent et m'offre un sourire affable.
Je lui rends son sourire en répondant humblement :
- Non, madame.
Pas de grande mère malgré son âge, Leireng m'a prévenue : à l'école on utilise des madame ou des monsieur pour s'adresser aux responsables et professeurs.
- La pauvre petite ne mangeait pas très bien chez feu ma grande cousine, déplore Leireng d'un ton peiné. Je crains que cela n'ait grandement affecté sa croissance... pauvre enfant.
Elle est métamorphosée depuis que nous sommes dans le bureau de madame Kanerem. Bouleversée, pleine de compassion et de gestes tendres à mon égard, elle est à l'opposée d'il y a quelques heures.
Après notre arrivée au palais, elle m'a houspillée jusqu'à ce qu'on gagne ses appartements où la tailleuse nous attendait pour les essayages.
Par dessus mes sous-vêtements, mon couteau toujours bien à l'abri, j'ai d'abord dû enfiler une longue chemise blanche aux manches courtes, en toile de coton. Ensuite, on m'a fait passer deux jupes légères, froncées, la première ocre, la deuxième mauve.
Puis vint la tenue principale, en toile de ramie.
C'est une robe longue qui descend au-delà des chevilles, au col haut, ajustée, à la jupe évasée. Son bleu cobalt est égayé de quelques broderies cuivrées, aux manches autour des poignets et tout le long des boutons qui la ferment sur le devant.
La tailleuse a dû la raccourcir, puis la rétrécir à la taille, aux épaules, et dans le dos.
La robe est complétée par une veste en soie de la même teinte, au plastron en damas et aux manches transparentes en organza. Le symbole de l'école est brodé sur le pan droit au niveau de la poitrine, sur le pan gauche une fleur de camélia lui répond.
Je pensais que nous en avions alors fini. Mais j'ai vite déchanté en voyant arriver une tenue d'archerie, une tenue d'équitation, une tenue de "promenade" (dont le nom m'a rendu perplexe), une tenue de sortie (qui n'a rien à voir avec la tenue de promenade, donc), une tenue de danse et enfin une tenue de cérémonie.
Toutes ont eu droit à un ajustement, sous les soupirs impatients de Leireng.
La tailleuse a ensuite pris mes mesures pour "les autres tenues" (j'ai du mal à imaginer lesquelles) avant de se retirer. J'ai remis sur moi la première, Leireng a rangé les autres dans une malle, puis elle m'a brossé les cheveux avec hargne pour tenter de les discipliner.
Elle a fait de son mieux pour les rassembler en une haute et longue queue de cheval. La coiffure réglementaire ici. Trop de petites mèches s'en échappaient encore, ce qui m'a valu des coups de brosses rageurs.
Nous nous sommes ensuite dépêchées de nous rendre à l'école. Tout le long du chemin, Leireng m'a assommée d'informations et recommandations. Elle a critiqué encore plus rudement tout ce qui n'allait pas chez moi (selon elle), mais sitôt devant le frontispice de la Maison des Iris Jaunes, école impériale pour jeunes filles, son air est devenu plus adorable que celui d'un chaton.
Nous avons été reçues dans le bureau de la directrice et, depuis, elle me caresse les cheveux, la joue, me serre de temps en temps les doigts, tout en répondant le plus souvent à ma place aux questions qui me sont posées.
Pour être honnête, elle me met tellement mal à l'aise ainsi, à déborder d'affection pour moi, que je crois que je la préférais avant.
- C'est tellement généreux de votre part d'accepter cette pauvre enfant, malgré toutes ses lacunes. Je ne sais pas comment vous remercier..., déclare-t-elle en pressant une nouvelle fois ma main dans la sienne.
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Le Harfang et le Loup
FantasyTraitez-la de barbare stupide du nord si vous le souhaitez, mais Taïmi ne comprend pas ce qu'elle fait là. Elle ne comprend pas pourquoi elle a été choisie pour épouser l'empereur d'un pays qui a longtemps été l'ennemi du sien. Ni pourquoi ce mariag...