18. Le portrait fantôme

1.7K 279 242
                                    

Resserrant ma prise sur la garde de mon épée, je me tourne vers la reine, m'attendant à ce que la prochaine attaque vienne d'elle. Mais elle se dissipe comme elle est apparue. Les fantômes vengeurs fondent alors de nouveau sur moi, leur animosité décuplée.

Je ne comprends pas comment ils peuvent être aussi nombreux dans un seul endroit ! Ni aussi gorgés d'énergie. Je n'ai jamais vu, ni même entendu parler de ça !

Ils sont si déchaînés et rapides, que je n'arrive plus à avancer vers la sortie. Ils ne veulent clairement pas que je leur échappe. Ils parviennent d'ailleurs à me faire faire demi-tour en concentrant leurs attaques derrière moi.

Pour continuer à me battre, je me retrouve à présent dos à la porte. Aïe.

Normalement, s'ils peuvent me fatiguer, me rendre malade, me blesser, voire me faire perdre connaissance, ils ne peuvent pas me tuer. C'est ce que j'ai toujours appris. Un mort ne peut tuer un vivant.

Les rares personnes qui ont perdu la vie lors d'une confrontation avec des fantômes avaient le cœur fragile, ou bien ont commis une maladresse. Comme par exemple, ne pas regarder où elles mettaient les pieds puis passer à travers un trou dans le plancher pour finir un étage plus bas...

C'est pour ça qu'il faut rester vigilant, quitte à être moins efficace.

J'espère vraiment que la prêtresse n'est pas en difficulté dans une autre pièce pendant que je perds mon temps dans celle-ci...

Une nouvelle fois, j'en appelle à mon esprit-totem et sens mon ardeur redoubler. Je fends les amas de fureur du passé, reculant méthodiquement vers la porte. Je bute alors dans un débris de bois, pas assez gros pour me faire tomber, mais qui suffit à m'énerver.

D'un coup de talon boudeur, je l'envoie valdinguer je ne sais où.

Même si je me déplace lentement, je suis toujours debout et je progresse. Ce n'est pas si mal considérant mon niveau de fatigue. Je n'ose imaginer cependant dans quel état je serai demain !

Une main fantôme, décharnée, surgit d'un coup pour me traverser au niveau du cœur, j'en ressens une violente brûlure à la poitrine. Je pousse un cri, titube, mais continue de me battre quand, au milieu des hurlements spectraux, un bruit sourd s'élève.

Il provient de derrière moi et, sans doute aussi, pas tout à fait de ce monde.

Je suis sûre de reconnaître le grondement d'une bête. Au même instant, je crois entendre Huntseyam hululer furieusement.

Les fantômes se mettent à hurler à leur tour ! Des stylets métalliques, qui brûlent d'une flamme bleu vif, les transpercent, un à un. Je les vois se disloquer les uns après les autres.

Je n'ai plus qu'à planter ma lame dans les trois derniers fantômes qui se tiennent devant moi, et la tranquillité revient enfin. Momentanément. Juste le temps qu'une main m'attrape par le col et me projette hors de pièce, tandis que de nouveaux fantômes commencent déjà à y apparaître.

Une grande silhouette vient aussitôt fermer rageusement la porte devant moi, puis se retourne pour me faire face. Je me retrouve alors nez à nez avec l'empereur.

- Qu'est-ce que vous faites là ?!! me hurle-t-il en me secouant par les épaules. Vous êtes complètement inconsciente !!

Il est vêtu dans un style très différent de la dernière fois où nous nous sommes vus.

Sa tenue est noire, sobre, très en dessous de sa condition. Elle est traversée par des lanières de cuir équipées de stylets métalliques comme ceux qu'il vient de lancer, et de deux lames maintenues au niveau de sa taille. Toutes ces armes sont consacrées.

Le Harfang et le LoupOù les histoires vivent. Découvrez maintenant