19. Une journée interminable

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- Suirei... Suirei ! C'est l'heure !

- Mhmmm...

À travers l'épais édredon, une main agrippe mon épaule pour me secouer. J'ai l'impression que je me suis endormie il y a un instant à peine. Je me rappelle avoir rêvé, mais impossible de me souvenir de quoi. Je ne me souviens que d'une lumière chaude d'après-midi d'été...

Encore dans les brumes du sommeil, je grimace en essayant de me terrer un peu plus sous mon monticule de draps chauds.

- Allez, lève-toi ! Insiste la voix de Daireng en tirant d'un coup sec sur l'édredon et les draps, découvrant mon visage.

Je grimace puis consens à ouvrir les paupières, la lumière du jour me les fait vite refermer. J'ai mal au crâne, mal aux yeux, et l'impression que ma tête va se décrocher si jamais j'ose me lever.

- Il est quelle heure ? je demande dans un énorme bâillement.

- Six heures. Vite ! Il faut que tu fasses ton lit et que tu te prépares !

- Oui... d'accord...

Je me sens déjà repartir dans le sommeil quand Huismei me secoue de plus belle en criant :

- Alleeeeeeez !!

De mauvaise grâce, je finis par m'asseoir sur le bord du lit. C'est sûr : ma tête penche si dangereusement en avant qu'elle va tomber d'une minute à l'autre et rouler par terre...

- Oh lalala ! T'as une de ces têtes ! s'écrie alors Huismei, épouvantée.

- T'as des cernes énormes !! commente Daireng. Qu'est-ce qui s'est passé ?!

Il se passe tout simplement qu'on n'a plus toutes seize ans ici...

- J'ai... j'ai fait des cauchemars, je réponds cependant dans un énième bâillement.

- Nous n'aurions jamais dû raconter ces histoires de fantômes avant d'aller se coucher, on l'a effrayée ! déclare Ishan d'un ton moralisateur.

La pauvre. Si elle savait...

- Allez, debout ! Je vais t'aider à faire ton lit.

Je n'ai pas l'énergie pour protester. 

Mais je garde assez d'esprit pour penser à récupérer le pendentif caché hier soir, tout en faisant mine d'arranger l'oreiller. Une fois le lit fait, Ishan me tend une chemise avec des sous-vêtements propres, pris dans mon coffre, et m'envoie faire ma toilette.

J'obéis comme un brave petit soldat.

J'ai tout juste le temps, une fois revenue, d'enfiler ma tenue d'école et de m'attacher les cheveux avant qu'on ne frappe à la porte quatre coups, puis qu'on insère une clé dans la serrure. Je vois toutes les filles courir se ranger dans l'allée centrale tandis qu'une surveillante fait son entrée glaciale dans le dortoir.

- Bonjour, mesdemoiselles, nous dit-elle sans sourire.

- Bonjour, madame, répondent-elles en chœur.

Elle fait le tour de la pièce de son regard dur, bouche pincée, puis nous considère les unes les autres jusqu'à ce que ses yeux s'étrécissent en tombant sur moi.

- Vous ne semblez pas avoir beaucoup dormi, mademoiselle Fannan.

- Non, madame.

Ses yeux s'agrandissent d'une lueur menaçante tandis qu'elle s'adresse à tout le dortoir :

- Vous avez veillé après l'extinction des lumières ?

- Non, madame ! répondent les filles avec chaleur.

Le Harfang et le LoupOù les histoires vivent. Découvrez maintenant