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Le Motel 6 de Beaumont n'est pas un mauvais endroit en fin de compte. Plutôt sympa enfaite. Certains de ses murs blanc ivoire sont tagués par des petits dessins. Rien de bien méchant. Néanmoins, Mycki et moi restons assises dans la voiture, à regarder le bâtiment. Ça fait 10 minutes que nous sommes là, et personne n'à bouger d'un pouce.

- Elle est là au moins ? – demande ma sœur en me regardant –

- On va bien voir.

Je sors en première et me dirige à cette porte bleue dont le numéro 41 est marqué en noir. Mycki me suit de loin, sans la moindre trace de joie sur son visage. Ça promet !

Je toque la première fois. Aucune réponse.

- Sam...je n'ai pas envie de poiroter ici pendant des heures si elle ne montre pas le bout de son nez.

- Moi non plus, frangine.

Contre toute attente, Mycki s'avance et toque à son tour. Un peu plus fort. Mine de rien, je ne l'ai pas forcée à venir, je lui ai proposée simple de voir maman avec moi et elle a acceptée. A-t-elle réfléchis à lui pardonner son absence ? On verra bien. Va-t-elle l'accueillir à bras ouvert après un seul pardon ? J'en doute, mais ça viendra. À bout de patience, j'aperçois les épaules de Mycki s'affaissés, et quand elle se retourne pour aller à la voiture, elle se fige.

- Bonjour les filles.

Je me tourne pour mettre une tête sur cette voix cassante. Ma mère se tient à quelques mètres de nous, un sac de course pendu au bras. Mycki ne fait que l'a fixée, pendant que je m'écarte pour laisser notre mère atteindre la serrure. Aucune de nous n'ose engager la conversation. Ça commence bien. Après de longues minutes à attendre que notre mère range ses courses dans ce petit frigo blanc, je soupire et lance :

- Je vais vous laisser quelques minutes. Et après, faut qu'on parle toutes les deux. Sérieusement. – en regardant ma mère –

Notre mère hoche la tête, un petit sourire sur les lèvre, Néanmoins, elle laisse entrevoir une petite déception de voir qu'elle n'auras pas les deux dans une seule discussion. Mais après quelques années à ne pas avoir vu Mycki, je suppose que ça l'a rend heureuse. En fin de compte, même avec ses saletés, elle n'a pas arrêté de penser à nous, à chercher à nous revoir. Par crainte, c'est juste moi qui ne lui ouvrais pas la porte. Mais aujourd'hui, ça va changer. Une bonne fois pour toute.

Au bout de 15 minutes, j'entre dans la chambre de ma mère avec un sac de nourriture et de boissons que j'ai prises le temps d'aller acheter. Mycki et ma mère sont en pleine discussion sur ses études et de ce qu'elle a manqué durant son absence. Elles ont l'air de mieux s'entendre.

- Je suis désolée de couper court à votre discussion...mais je veux que tu écoutes attentivement ce que j'ai à dire. – dis-je en m'asseyant en face d'elles –

Ma mère hoche la tête, son sourire d'efface légèrement face à mon sérieux. Je n'arrive toujours pas à sourire...à avoir un geste tendre. Ça viendra ! Quand ? Je ne sais pas.

- Maman...je veux que tu ailles mieux et que tu aies tous tes moyens, que tu sois sobre et clean. On le veut tous. Alors...

- Oui ! – lance-t-elle avec empressement –

Je suppose qu'elle sait déjà ce que je vais dire, mais je veux quand même être clair avec elle, histoire de ne pas me faire berner comme la fois précédente où je lui ai offerte mon aide.

- Pas très loin d'ici, il y a un centre de désintox. Tu vas y aller et tu vas faire la totale. Boisson, drogue...tous... - d'un ton neutre -

Dans ses yeux se voient la détermination mais aussi la crainte. De quoi a-t-elle peur ? De ne pas y arriver ? De nous décevoir encore une fois si c'est le cas ? Non, pas cette fois. J'y veillerais.

- Je vais m'assurer que tu aille jusqu'au bout en te parrainant. Et tu sais comment je suis...

- Et....pour l'argent ?

Venons-en.

- On a eu plus que 12 000 dollars, alors le reste sera pour le centre. Rien d'autre. Sean à accepter de te laisser son ancien appartement en ville après ta cure et je viendrais te voir au moins trois fois par semaine pour contrôler ton état. Est-ce que tu es d'accord ?

Elle se lève de sa chaise et fond dans mes bras. Etonnée par son geste, je reste là sans bouger. On dirait que toute sa vie, elle a attendu que quelqu'un vienne la libérer de son cauchemar...jusqu'à aujourd'hui.

Du coin de l'œil, Mycki nous regarde avec un petit sourire inscrit sur les lèvres. Ma mère se décale de moi et retourne sur son siège, légèrement gênée par son emportement.

- Maintenant...Il faut que tu appelles ce type pour lui rendre son argent et basta.

- Et si...il nous fait du mal ?

Je décèle dans sa voix une once d'inquiétude.

- Les garçons seront là en cas de besoin. Et crois-moi, ils ne prennent pas ça à la légère.

Sur le coup, elle semble se détendre un peu. Mais quand j'y pense, je ne sais pas de quoi est capable ce type...On fonce un peu tête baisser mais je veux que cette histoire ce finisse au plus vite, pour pouvoir mener une vie tranquille et que ma mère se soigne correctement.

- Appelle-le, organise un rendez-vous. – en me levant – Et tu m'appelles en suivant.

Mycki me suit jusqu'à la porte puis fait volte-face pour prendre chaleureusement notre mère dans ses bras. Une embrassade qu'elle accueillie avec plaisir. Néanmoins, elle me jette un coup d'œil pour voir si je vais en faire autant, sauf que mes jambes refusent de bouger. Au lieu de ça, elles me font faire demi-tour et marcher jusqu'à la voiture. Fille ingrate que tu fais Sam ! Il n'y a rien d'ingrat ! C'est juste qu'il me faudra du temps pour lui pardonner, à partir du moment où elle sera en bonne santé et que je pourrais lui faire confiance après sa sortie de cure, là...je lui pardonnerais totalement.

- Comment ça s'est passé ? – me demande Nash –

A notre retour, monsieur nous a attendus sus le porche avec ses autres messieurs. Dans la cuisine, l'un saute direct sur le plan de travail, deux autres se sont assis sur des chaises comme des personnes civilisées et le dernier est resté debout mais appuyer contre l'îlot central. A mon grand étonnement, mon père est rentré lui aussi.

- Bien.

- Elle a acceptée la cure ? – m'interroge mon père –

- Oui.

Il hoche la tête et presse sa main sur mon épaule d'un geste doux. Je sais que mon père aussi veut que notre mère aille mieux, mais je pense surtout que ça le soulage d'un poids de savoir qu'une autre personne pense à s'occuper d'elle, qu'il n'a jamais eu l'espoir d'obtenir un ''oui'' de sa part.

M'enfin, on verra bien.

Pendant plus d'une heure, les garçons sont restés à lamaison et ont planifiés l'éventuel rendez-vous avec le type. ''A combien on yva ?'', ''Qui va avec qui ?''...je vous jure qu'on dirait qu'ilsplanifient un braquage. Je sens le regard de Nash qui navigue entre le mien etles garçons, sa main qui se presse quelque fois sur mon genou, comme pour medemander si ça va. Oui, je vais bien. Mieux même. Mon père en retrait et écoute toute la conversation. Qui aurait cru qu'un jour, nous ayons besoin de faire tout ça ? Pas moi en tout cas.

Sunday PlayersOù les histoires vivent. Découvrez maintenant