La jeune fille se retourna vers Gwendoline, et les deux se dévisagèrent sans que l'une ne trouve les mots pour engager une conversation qui ne soit pas sur le ton de la gêne, ce fut finalement Gwendoline qui se décida, elle effectua un salut poli le plus courtois ton qu'elle put prendre.
« Je suis Gwendoline Alice Marianne Rowerscream, enchantée de faire votre connaissance, mademoiselle.
-Salut! Répondit l'autre en sautant de son lit, vu tes manières de nantie, ça se voit que t'es pas du coin! Moi, c'est Conny! »
Conny avait les cheveux frisés et bruns foncés, maladroitement rameutés dans un chignon tombant et mal fait, ce qui jurait avec ceux de Gwendoline, clairs et bien peignés et coupés, sa robe était simple, celle d'une petite ouvrière, tout au plus. Son visage dégageait un optimisme proche de celui qui avait quitté la fillette à la soit disant mort de son père.
Elle tendit une main en direction de Gwendoline que celle-ci la serra.
-He, bien...Il est vrai que je suis plus ou moins haut placée dans la haute société, enfin...C'est ma famille qui l'est, et...
-Pas de ces manières pompeuses avec moi, je suis une fille du peuple, moi! Je n'ai pas besoin de tout ça, moi!
Cela rassurait Gwendoline qui n'avait que trop entendu durant son deuil qu'en temps que « Lady Rowerscream », elle devait raffiner ses manières.
-Bien dit-elle en s'asseyant, alors, eh ben...Vous...Tu vas pour quelles raisons en Égypte, Conny?
-Tu peux m'appeler Coco, comme tout le monde, ici! Bah...Pour te répondre, je suis couturière à Londres, la plupart de mon travail se déroule dans une des boutiques des petits quartiers. J'ai un amoureux qui travaille au port, Ben. Il a été affecté aux machines du Damas, et quand il a eu l'occasion de visiter l'Egypte, il est tombé d'admiration devant le charme du pays, et il travaille désormais au port d'Alexandra, où je ne sais quoi. Dans l'un de ses billets, il m'a proposé de quitter l'pays pour tenter ma chance en Afrique avec lui...J'suis pas adepte du soleil de plomb qu'y a, là-bas, mais il dit que quand on s'habitue, on arrête de suer comme un porc, et que ça devient même agréable, la lumière et la chaleur...Alors j'viens, mais c'est surtout car je l'aime. »
Cela émouvait Gwendoline. Non pas qu'elle était sensible au romances à l'eau de roses ou deux cœurs fait l'un pour l'autre se retrouvent dans un pays de Cocagne pour filer le parfait amour et avoir beaucoup d'enfants, mais le fait que comme elle, Conny était prête à tout risquer pour retrouver quelqu'un qui lui était cher. Cela donnait de l'espérance à la fillette.
« Si elle peut le faire, se dit-elle, alors moi aussi! »
-Et toi, Blanchette? Pourquoi une lady comme toi voyage au milieu de la seconde classe du Damas? Pour la noblesse, c'est l'équivalent de Whitechapel. »
Le surnom que Conny venait tout juste de trouver à Gwendoline était également dû aux cheveux blancs de la fillette, qui ne savait pas comment le prendre, mais en analysant la personnalité apparente de sa voisine de lit, cela semblait amical.
-He, bien...Mon père a été porté disparu, mais ma tante soutient qu'il est en vie. Je me suis décidée à l'accompagner...De toutes façon j'ai passé ma vie à Londres, je suppose donc que le changement ne me fera pas de mal...
-Eh, bien! Tu dois être une sacrée casse-cou pour risquer de froisser tes jupons de dentelles, tu me plaît, Blanchette. Je suis sure que...Oh, c'est ta poupée?
Elle pointa un doigt en direction de Quignon, qui s'était assis dans un coni de la valise de Gwendoline. Son regard semblait curieux et émerveillé par la précision dés détail de l'automate, que ce soit ce de sa robe, ou de son visage.
-Oui, dit elle, étonnée du fait qu'une poupée-grincheuse puisse émerveiller à ce point quelqu'un, c'est un cadeau de...ma mère...
Gwendoline avait baissé la tête en prononçant ce nom. Elle n'avait pratiquement pensé qu'à son père, en s'embarquant sur le Damas, et son espoir enivrant lui avait ôté de la tête toutes les conséquences que sa fugue pouvait avoir sur sa mère, ou sur quelqu'un d'autre. Certes, elle avait laissé une lettre expliquant son geste, mais quand on est une mère, qui dans un monde où, quand on fait partie d'un cadre où les gens sont tous les mêmes, ses enfants sont le centre du monde, où on vient de perdre son mari, et ou, par conséquent, on se raccroche aux êtres que l'on chérit le plus, ses petits bébés, est-ce que trouver une lettre sur le bureau de sa fille disant à peut près « hé, je suis partie pour l'Afrique, salut! » était suffisant? Gwendoline était prise de doutes et sa tête bouillonnait de question.
-Eh, ben! T'en as des jolis cadeaux, lança Conny en tripotant Quignon, j'pourrai l'habiller, ta poupée?
-Euh...Balbutia Gwendoline à peine sortie de ses rêveries, Ou...Oui! Bien sûr!
C'est ce moment que choisit Hortense pour venir parler emploi du temps avec Gwendoline.
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La lignée des archéologues
AdventureJ'aime pas les résumés. Si ça vous tente, lisez, et puis flûte! Dessins par moi