Chapitre 4

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Loulou leva la tête vers le ciel. Il était deux heures de l'après-midi, et elle hésitait sur la tenue qu'elle allait enfiler pour le casting pour un petit rôle dans une pub. Depuis qu'elle avait arrêtée d'utiliser la magie pour être sur le podium, elle avait chuté en popularité. Mais bon, il valait mieux se battre jusqu'au bout avec ses moyens que de tricher, car c'était du mauvais jeu, et de plus, une fois avoir gagner la partie, on se sentait vraiment heureuse. Telle était la nouvelle manière de penser de la jeune fille.
Elle peigna ses cheveux violets en regardant sa garde robe. Il y avait une multitude de vêtements : de belles robes de grandes marques, parées de belles couleurs d'été, qui s'accordaient avec la saison qui venait à peine de commencer, et pourtant il faisait si chaud. Il y avait aussi des t-shirt tout aussi attirants, avec des shorts en jeans, en soie de couleur estival tout en étant à la mode-oui, ressembler à un chiffon n'aiderait vraiment pas Loulou à devenir une star ! Malgré toutes ses belles couleurs, tous ces beaux vêtements de haute couture, Loulou ne les désiraient pas.
Elle voulait se vêtir d'une robe. Mais pas de n'importe quelle robe. Cette robe était bien cachée derrière une autre robe, de la couleur de ses cheveux. Elle avait de beaux plis cousues avec minutie, soit avec la main, soit avec la magie-elle ne le saura peut-être jamais. Elle restait face à cette garde robe, fixant l'emplacement précis de cette robe, cachée par une robe de danse espagnole. Elle était tellement hypnotisée par cet océan de mélancolie qui entourait cette robe, qu'elle en fit tomber son peigne sur le sol. Ne prenant même pas la peine de ramasser celui-ci, elle se leva, et avança jusque sa garde robe. Elle écarta la robe d'origine européenne pour prendre la robe violette d'apprentie sorcière d'autrefois.
En effet, en secret, elle avait demandée aux sorcières du Royaume magique de lui donner son ancienne robe de novice en magie. Les sorcières, amusées et généreuses, avaient donné la robe. Bien sûr, elle ne contenait aucune magie, excepté que d'après les sorcières qui lui avaient donné cette robe, celle-ci prendra toujours, et parfaitement, la forme de son corps.
Elle serra fort la robe contre elle, comme-ci la robe allait prendre vie, qu'elle allait l'enfiler avec légèreté et qu'elle utiliserait la magie comme autrefois. Elle finit par lâcher la robe, sachant que ceci n'arriverait certainement jamais, puis l'enfila. Elle sortit de sa chambre, et descendit les escaliers.
Elle était maintenant dans le hall du dortoir des élèves futurs acteurs et actrices. Elle franchit la porte et se dirigea vers le bâtiment des salles de classes, motivée à passer le casting. Elle avançait d'une démarche assurée, ne quittant pas du regard le bâtiment, se remémorant le numéro de la salle de cours réservée pour le casting, quand soudain, elle entendit une voix l'appeler. Elle se retourna, et, surprise, vit Clara. Elle n'était pourtant pas ici, d'habitude !

"Attends, Clara ! Lui dit-elle. Tu devrais être dans l'école de journalisme toi !T'es-tu perdue ?"

L'intéressée rigola, puis prit en photo Loulou.

"Le retour de la star de l'école primaire !Ha ha !Enfin, non, si je suis ici, c'est pour un devoir de mon école !On me demande de faire un article pour le prochain journal sur ce casting pour cette fameuse pub !" S'exclama-t-elle. "Et tu seras aux côtés du grand footballeur, Honda !"

"Hum...Clara, je n'ai pas encore eu le rôle. Et puis, à quoi va te servir la photo que tu viens de prendre ?"

"La photo est pour moi. Et puis, je sais que tu obtiendras le rôle !"

Elle regarda de haut en bas Loulou, puis reprit :

"Ta robe est magnifique !Décidément, tes parents doivent énormément dépenser pour toutes ces hautes coutures !"

L'adolescente apprentie actrice rougit quelques secondes, puis reprit sa route avec son amie d'enfance. Elles traversèrent le chemin de sable qui séparait le gazon en deux, puis entrèrent dans le hall du bâtiment des salles de cours pour les acteurs en herbes. S’ensuivit une longue montée des escaliers, pour enfin arriver au couloir, juste devant la salle 412, celle, bien entendue, pour le casting.
Devant la salle, il n'y avait pas qu'elle. Il y avait aussi des élèves venus de toutes les écoles du coin, mais aussi de la ville, spécialement pour essayer de décrocher le petit rôle. Parmi eux, Loulou fut à peine surprise de voir le trio S.O.S. Ou plutôt le quatuor. En effet, Sam et Oscar avaient retrouvé Stanley, qui avait réintégré le groupe en acceptant Sébastien. Les quatre s'amusaient à dire des sottises qui auraient certainement bien fait rire Emilie, songea Loulou. En l'apercevant, les quatre amis eurent un sourire, puis rejoignirent Loulou et Clara. Ils lui demandèrent ce qu'était devenue toute sa bande d'amies, et surtout pour Emilie, car elle avait été leur première fan. Elle leur répondit avec regret qu'elle ne les avaient plus revues depuis longtemps maintenant. Ils parlèrent avec Clara en lui racontant quelques blagues qui, elle l'avoua, étaient meilleures que celles qu'ils lançaient à l'école primaire.
Le vacarme que faisait les adolescents se stoppa nettement quand la poignée de la porte bougea et que la porte s'ouvrit. Un homme portant une paire de lunette, petit et grassouillet, appela un élève.

"Bon, je dois y aller aussi Loulou, je dois prendre quelques photos et interroger les élèves et le jury. «Dit Clara en se glissant dans la pièce avec l'élève appelé.

Loulou s'appuya contre le mur et fit le vide. Le calme était soudainement revenu, et les élèves parlaient à voix basse. Certains essayaient d'entendre ce qui se passait dans la salle 412, qui devenait de plus en plus mystérieuse et angoissante au fur et à mesure que les élèves entraient et ressortaient encore plus angoissés qu'avant leur entré.

"Segawa...Loulou. » Entendit-elle soudainement.

La jeune fille sursauta, puis se redressa, car elle était appuyée contre le mur du couloir. Elle sentit une main se poser sur son épaule.

"Grosse merde." Lui dit Stanley.

Elle hocha la tête pour le remercier, un peu trop angoissée pour parler, puis entra dans la salle. Elle avait été vidée, et seul trois bureaux étaient collés les uns contre les autres, dos au tableau, où était assis le jury. À l'autre bout de la salle, sur une chaise, carnet sur les genoux, Clara prenait des notes. Loulou inspira une grande goulée d'air, puis expira lentement, essayant de reprendre son souffle et d'enlever cette grosse boule qu'elle avait au ventre. Combien de fois avait-t-elle tourné dans des publicités, chanter devant un monde fou ? Elle ne savait même plus, en tout cas, jamais elle n'avait perdu le trac qui n'hésitait pas à venir, telle une vipère poursuivant sa proie, se loger dans son ventre à chaque fois qu'elle allait faire une représentation quelconque.

"Qu'est-ce qui vous a poussé à vous présenter ?" L'interrogea la seule femme du jury, qui paraissait avoir une quarantaine d'années.

Elle avait un regard sévère, et se tenait de manière raide.

"Et bien, j'ai été une chanteuse et une comédienne en mon enfance. Toute ma vie j'ai aimé ce milieu et je veux en faire mon métier. Peut-être pourrais-je avoir une autre chance en me présentant. » Répliqua-t-elle.

Le jury se consulta durant à peine quelques secondes, puis prit des notes. L’homme aux lunettes qui avait ouvert la porte à Loulou était juste à côté de cette porte et regardait l'adolescente d'un air indéchiffrable. Caché derrière ses lunettes, elle ne pouvait pas même lire dans son regard.

"Mademoiselle Segawa, nous désirons avoir une représentation théâtrale pour mesurer vos talents. Vous allez improviser une pièce avec José. » Dit le premier homme du jury.

Le deuxième et dernier homme du jury se leva et se posta à côté de Loulou.

"José est ton père. Tu désires passer une soirée au bal de fin d'année avec ton petit ami, mais il ne veut pas car il n'aime pas ce garçon. C’est quand vous voulez. » Indiqua la femme.

Loulou ferma les yeux, entrant dans son personnage. Elle était une adolescente amoureuse d'un garçon que son père n'appréciait pas pour elle ne savait quelle raison et devait argumenter pour pousser son père à accepter de la laisser partir au bal. Elle décida de jouer la carte de la colère. Elle pivota sur ses pieds pour être face à José.

"Je suis prête. » Dit-t-elle.

L'homme, qui lui aussi avait l'air d'entrer dans son personnage, acquiesça d'un signe de la main. Le jury, comprenant qu'ils étaient prêts, observèrent la petite pièce.

"Papa ! Axel est un garçon digne de confiance, je ne comprends pas pourquoi tu refuses qu'il m'escorte au bal de fin d'année ! En plus, c'est le meilleur moment de l'année !"Cria-t-elle à l'homme.

"Je refuse que tu sortes avec lui car il a une très mauvaise réputation dans le lycée ! Il sèche souvent les cours et risque de redoubler, et je ne sais encore quelles horribles choses il pourrait bien faire !Et sortir avec lui, le soir...Je ne l'accepterais jamais !"

"JE NE SUIS PLUS UNE PETITE FILLE !Je le connais mieux que toi, et Axel est juste quelqu'un qui n'aime pas l'école !Et puis je serai bientôt majeure, tu ne pourras pas m'empêcher d'y aller !"

"Et tu crois ça ?Et bien je vais te montrer que tu es encore sous mon toit, et que tu dois donc m'obéir !Tu resteras dans ta chambre et tu n'iras pas à ce fichu bal !"

Loulou s'apprêtait à répondre par une nouvelle réplique quand la femme du jury la coupa :

"Cela suffit. Vous pouvez sortir, Loulou."

La jeune fille remercia le jury et l'homme aux lunettes, fit un bref signe à Clara, puis sortit de la salle. Elle fut accueillie, ou plutôt assaillie par les questions que lui lancèrent le quatuor S.O.S comme dans un interrogatoire, lui demandant si elle avait réussie, si elle avait eu le trac, et d'autres questions qu'elle arrêta d'écouter.

"Tout va bien. » Répondit-t-elle.

Au fond, elle le disait pour elle même. Elle savait qu'elle allait rater son casting, qu'elle n'aura pas droit à une nouvelle chance. Elle sentait étrangement que le jury n'avait pas apprécié sa petite pièce improvisée et si cela était vrai, elle était tout à fait d'accord avec eux. Elle soupira, légèrement démoralisée. Au moins, elle avait essayé,  et peut-être sa robe d'ancienne apprentie sorcière lui portera-t-elle bonheur !

Magical Doremi : Le peuple oubliéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant