Jérémy plissa les yeux pour tenter de regagner toute sa concentration. Cela faisait un moment maintenant qu'ils étaient occupés à démêler cet énorme sceau. Des perles de sueurs s'étaient accumulées sur ses cils et commençaient à lui brouiller la vue. Ses amis n'étaient pas non plus en grande forme, l'énergie contenue dans ce verrou et ce qu'ils avaient à user pour parvenir à l'ouvrir étaient colossales. Il avait l'impression que cela allait durer encore une éternité, il n'en voyait plus la fin. Et même si, petit à petit, pas à pas, le sceau commençait à se briser, la vue et l'espoir d'y arriver n'étaient que trompeuses. Il préférait ne plus se fier à ça, ne donner toute son énergie que sur sa tâche. Ne plus penser, agir presque comme une machine. Trop penser ne ferait que le dévier de son objectif. Et le conduirait inévitablement vers la mort.
Le vieil homme, tout comme Félix leur avait avertis des dangers qu'ils encouraient. Mais ils avaient promis qu'ils aideraient les succubes et les incubes innocents, prisonniers, qu'ils les feraient sortir de là. Pour l'avenir de plusieurs mondes, plus seulement le royaume des magiciens. Les prisonniers étaient tout aussi silencieux que le FLAT4, et regardaient avec autant d'attention qu'eux le dispositif s'en allant doucement. Comme une pelote de laine que l'on dénouait sans pouvoir ne serait-ce qu'une seule fois en lâcher le fil. La vie ne tenait qu'à un fil, et ça n'était plus qu'une simple figure de style. Il pouvait ressentir malgré tout le mal qu'il se donnait à les ignorer, les regards qui se posaient sur le groupe, et notamment celui du vieil homme qui les avait conseillé juste avant qu'ils ne se jettent dans cette épreuve difficile.
Il regardait toujours la toute petite flamme qui crépitait et qui petit à petit consumait le sceau, concentrant et calquant son rythme sur celui de ses trois amis, donnant tout le peu d'énergie qu'il lui restait sur ce dernier effort. Ils devaient ouvrir les cellules. Le reste, ce sera à Dorémi et ses amies de le faire. Il espérait qu'elles y parviendraient, qu'elles arriveraient à combattre cette tyran sans coeur. Dans cette petite pensée un peu impulsive, il sentit la petite flammèche vaciller en avançant. Vaciller un peu trop vite. Il sentit l'énergie de ses amis se focaliser sur le blocage de la flamme, essayant de retrouver le rythme croisière de départ. Jérémy essaya de la ralentir aussi, en se disant que si tout explosait, ce serait de sa faute. Pour une vulgaire erreur, ils allaient tous partir en fumée. Et les vies d'innocentes personnes allaient en payer le prix.
L'énergie de ses amis vacilla à son tour. Le jeune magicien ferma les yeux, demandant intérieurement le pardon de tout le monde en se disant que ce sera la fin pour eux. Oui, la fin. Et qu'avait-il fait en ce monde ? Excepté être le fils du roi des magiciens, et d'être né d'une rose ? On ne se souviendra de lui que comme d'un adolescent qui a fait l'erreur qui coûtera la vie de tout un peuple. Un peuple avec ses torts, ces incubes et succubes mais… Les sorcières, les magiciens aussi avaient eu leurs mauvais moments, tout comme les humains… Il n'aura le temps de ne dire adieu à personne, tout n'allait se passer qu'en une seconde…
Il ressentit tout d'un coup une énergie étrangère émerger de nulle part. Qui était-ce ? Il dévisagea quelques secondes ses amis, qui haussèrent les épaules, aussi étonnés que lui. Ils contemplèrent, les yeux écarquillés, la petite flamme avançant maintenant toute seule, comme si une nouvelle conscience s'était emparée d'elle. Comme si le sceau avait décidé de lui-même de s'ouvrir. Jérémy tomba à genoux, à bout d'énergie, sans quitter du regard ce qui se déroulait juste devant eux. Et puis, le sceau se brisa. Sans aucune explosion. Un à un, les prisonniers sortirent de leurs cellules, et, épris d'une nouvelle énergie, de la motivation, de la colère, de la rébellion, ils quittèrent les sous sols, en courant, en criant le nom de la femme qui les avait enfermé. Seuls deux des prisonniers étaient restés devant leur cellule.
« Arrête, grand père ! Tu as dépensé toute ton énergie ! Si ça continue, tu vas… » Lâcha la jeune succube en soutenant toujours le vieil homme.
« Oh, arrête donc de me… De me chouchouter… Ça devrait être… Le contraire. »
« Ne parle plus ! Tu gaspilles ta salive pour rien ! »
Les quatre adolescents tournèrent la tête vers la succube et son grand père.
« Ce… C'est… C'est vous qui… Qui nous avez sauvé la vie ? » Questionna Félix.
« Oui, c'est mon grand père, moi, je n'y suis pour rien. Mais comme vous le pouvez voir, il est… Il… »
La voix de la jeune fille se brisa, et les larmes ruisselèrent sur ses joues.
« Ne me dis pas qu'il va… Non ! » Cria Stéphane.
« Vous l'avez deviné, bientôt, je ne serai plus de ce monde… Mais… Je suis heureux, d'avoir sauvé mon peuple… Et ma petite fille. » Murmura-t-il d'une voix faible.
« Attendez ! Que pouvons-nous faire pour vous ? Je vous en prie, laissez-nous faire quelque chose pour vous en échange ! On peut peut-être vous soigner ! » Lui dit Léon.
« Vous ne pouvez rien faire pour moi, mais… Ma petite fille… Protégez la… S'il vous plait… » Dit-il d'une voix à peine audible.
Son corps tomba ensuite lourdement, et même si la jeune succube essayait de le soutenir, elle tomba avec lui.
« Grand père ! GRAND PERE ! »
C'était celui qu'ils avaient qualifié de monstre qui les avait sauvés et… Ils n'avaient rien pu faire pour lui…***
Elle ouvrit les yeux, sans vraiment les ouvrir. Où était-elle exactement ? Dans son corps ? Hors de son corps ? Les sensations étaient étranges, ici. L'endroit était sombre. Dorémi essaya de s'habituer à cette étrange situation. Elle pouvait encore voir. Voir ce qu'il se passait devant elle. Les sorcières en difficulté. Ses amies. Et sa petite sœur qui était terrorisée par cette succube qui se prenait pour la reine de l'univers. Que pouvait-elle faire, maintenant ? Ses mains et ses jambes étaient hors de son contrôle, la femme usait même de magie noire avec son corps pour terrasser ses amies.
« Je vais vous torturer avec le corps de votre amie !» Riait-elle hystériquement en volant sa voix.
Dorémi serra les poings, enfin, intérieurement, puisqu'elle ne pouvait plus contrôler ses poings. Elle chercha dans son for intérieur là où pouvait bien se cacher l'esprit de Magdeleine. Elle ne pouvait pas aller bien loin, elles partageaient le même corps, maintenant ! Elle courut dans ce qui semblait être son inconscient, ou son subconscient, enfin, la philosophie, ce n'était pas son truc.
« Où es-tu, Magdeleine ? Montre toi ! » Appela-t-elle.
Elle monta ce qui ressemblait vaguement à des escaliers en colimaçon, tout en scrutant les alentours. La voilà maintenant face à un long couloir, avec des tas de portes. C'était quoi, ça, encore ? Son cerveau était vraiment louche, bon sang ! Elle s'approcha de l'une des portes, qu'elle entrouvrit. Ses yeux s'agrandirent quand elle vit en face d'elle la cours de l'école primaire. Elle fit un pas, puis un autre, et marcha dans les lieux en levant la tête, cherchant des présences du regard.
« MAGDELEINE ! BOUGE TOI ET VIENS, SI T'ES AUSSI FORTE QUE TU LE PRETENDS ! » Hurla-t-elle au milieu de la récréation.
Elle sursauta en s'apercevant, au loin. Une mini elle. Enfin, c'était compliqué à expliquer. Elle marchait, avec elle, ses amies, en format primaire aussi. Dorémi se précipita vers elle, et agita les bras devant elle. Les filles continuèrent de passer, son double y compris, et les filles la traversèrent en l'ignorant bellement.
Hein ? Je suis un fantôme ?! A moins que ça soit… Mes souvenirs ? Songea-t-elle.
Oui, c'était ça… Ses souvenirs ! Ses souvenirs d'enfance ! Elle contempla encore quelques instants la cours de récré, les enfants qui jouaient, les petites Dorémi, Sophie, Emilie, Loulou, et Mindy, qui continuaient de parler en avançant. Il manquait Flora dans ce tableau… Flora ! Elle devait la sauver ! Elle ne devait plus perdre de temps dans le passé !
Elle retourna en courant vers la porte, qu'elle ouvrit, pour retourner dans ce couloir. Ce long couloir qui ne voulait pas en finir. Elle l'observa encore quelques minutes, puis, entendit, loin derrière elle, les cris de douleurs de ses amies.
« Alors comme ça, tu te caches au bout de ce couloir, hein ? » Cria-t-elle à l'attention de son ennemie. « J'arrive ! Et je vais récupérer mon corps, espèce de monstre ! »
Elle piqua un sprint droit devant elle, en direction de la fin de ce long chemin. Elle allait faire sortir Magdeleine de son corps et aider ses amies !
VOUS LISEZ
Magical Doremi : Le peuple oublié
FanfictionDoremi est maintenant une adolescente. À quinze ans, elle est une lycéenne ordinaire. Les années passées l'ont séparée de ses amies, Émilie, Sophie, Loulou, Mindy. Cependant, elle ne peut s'empêcher de repenser à son enfance et à sa vie d'apprentie...