Chapitre 16

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               Je suis miss fiches. Ce surnom m'est attitré depuis la Seconde. Depuis cette époque, je garde la même structure, les mêmes couleurs pour le titre, le sous-titre, le chapitre, le sous-chapitre... Depuis que je suis en études, mes fiches n'ont jamais été aussi colorées et structurées ! Sans parler du concours ECRICOME... Je fais des fiches tous les weekends sur les livres que je lis, dès que j'en ai l'occasion je fais des fiches sur des sujets de l'actualité... Bref, je fiche tout, absolument tout ! Mais là, j'en ai ma claque. Il est dix neuf heures, ça fait exactement six heures que je suis en train de lire et faire des fiches, et je n'en peux plus ! Je suis exténuée. Mon père, qui ne devait travailler que ce matin, a finalement passé la journée entière au bureau. Ce qui m'arrange, puisque j'ai pu travailler sereinement cet après midi. Mais voilà, il est l'heure de quitter ma chambre, descendre au salon et d'avoir une discussion avec mes parents...

Je descends les marches d'un pas lourd. Mon père est assis sur le canapé du salon, son journal à la main. Ma mère doit être en train de faire à manger, vu la délicieuse odeur qui flotte dans la pièce. Je suis angoissée, je sens ma respiration s'accélérer au fur et à mesure que je m'approche de mon père. Je prends une profonde inspiration et m'assieds à côté de lui, en lui embrassant bruyamment la joue.

          - La plus belle, dit-il avec un sourire en me serrant contre lui. Comment tu vas 

          - Bien papa, même si je suis fatiguée ! dis-je en riant légèrement.

          - Tu es née fatiguée, gamine...

Et je ne contredirai jamais personne là dessus !

          - Tu as eu ton frère ? me demande-t-il, hésitant.

Je ferme les yeux, ma respiration se coupe. On y est...

          - Oui...

Il expire, comme si lui aussi retenait sa respiration jusqu'alors.

          - Gamine, tu sais que nous n'avons pas d'atomes crochus, avec Lucas.

Ma gorge se noue, et je sais que dorénavant je ne pourrai plus parler sans laisser échapper un sanglot.

          - Je trouve qu'il a toujours été un peu trop gamin, et le fait de ne pas être venu me demander ta main ne fait que me conforter dans ce que je pense. Du coup, effectivement je trouve que vous êtes trop jeunes pour cela.

Il m'embrasse le crane et me frictionne le bras.

          - Mais je ne peux pas t'interdire, je ne peux pas me permettre de te dire quoi faire. Alors si tu es sûre de toi, que tu le veux vraiment, je suis le plus heureux des pères. C'est à toi de faire tes choix, de faire tes erreurs, sans nous prendre en considération. Je t'aime, gamine. Mais tu grandis beaucoup trop vite pour moi...

Les larmes coulent le long de mes joues lorsque je relève la tête vers mon père. Ses yeux verts sont brillants d'humidité, et ma gorge se noue encore plus.

          - C'est marrant, Johan m'a dit exactement la même chose.

          - Qu'il ne l'aime pas ?

          - Que je grandis trop vite, papa... je lui réponds en lui embrassant la joue.

Clink. Nous relevons tous les deux la tête devant cet étrange bruit.

          - Vous étiez trop beaux tous les deux, je n'ai pas pu résister, nous dit ma mère toute gênée, son appareil photos à la main.

Mon père ouvre son bras droit, comme un invitation à ma mère à s'y glisser. Elle sourit, pose l'appareil sur la table basse, et se blottit contre papa. Je suis bien, là.

Maman se redresse quelques instants plus tard, lorsque la minuterie se déclenche. On se lève en même temps qu'elle pour mettre la table. Je suis heureuse. Finalement, tout s'est bien passé ! J'avais peur d'une réaction plus violente de mon père, mais je suis contente de voir que finalement non, il se fie à mon jugement.


               Le réveil a été difficile, comme chaque dimanche. Me réveiller à 7h pour pouvoir commencer l'entretien à 8h alors que j'ai pleinement conscience que je pourrais faire une grasse matinée, c'est compliqué. Je me lève difficilement de mon lit, et me brosse les cheveux directement. Je sais que ma tignasse ne ressemble à rien au réveil, à rien du tout, même. Du coup, c'est le premier réflexe que j'ai depuis toujours : me coiffer. Je me fais une queue de cheval haute et j'envoie un message sur le groupe de Coaching de l'extrême pour les prévenir de mon réveil, puis je file sous la douche. Le jet d'eau tiède me réveille doucement, mais je ne m'éternise pas, de peur de trop trainer. Je m'enroule dans ma serviette, me sèche, et enfile mes sous vêtements en dentelle noire, mes collants opaques, puis une robe rouge près du corps à manches trois quarts. Je descends dans la cuisine et me fais mon thé à la rose, comme tous les weekend. Je mange une banane; une pomme ainsi qu'une tartine de chocolat. Une fois mon petit déjeuner englouti, je remonte me brosser les dents dans ma salle de bain.

Je reviens sur mon bureau et ouvre Skype, tout en buvant une première gorgée de thé. D'habitude, les garçons sont déjà connectés, c'est bizarre. A huit heure et dix minutes, un appel vidéo de Johan apparaît sur l'écran. Je l'accepte, contente de voir mon frère. Ouh la sale tête.

          - T'as frôlé le coma éthylique ou quoi ?

          - M'en parle pas. On est rentré à sept heures ce matin, je me suis levé y'a moins de trente minutes. Je suis mort.

Je rigole et bois une gorgée de mon thé lorsque la porte derrière Johan s'ouvre brutalement, me faisant sursauter. Josh.

          - Salut.

          - Bonjour Andy, me répond-t-il sobrement.

Bon, il a l'air malade lui aussi. Il n'est pas aussi chaleureux que d'habitude...

          - Vous avez bu le même poison pour être dans le même état ? je lance gaiement.

          - Ouais, me dit Josh avec un regard lointain.

Ha ouais, ça va pas du tout, là...

          - Josh, si ça va pas, tu peux retourner dormir ou te soigner...

Il lève finalement les yeux vers l'écran. Mon dieu, il n'a vraiment pas l'air bien... Il a l'air de souffrir le martyr...

          - Ouais, je vais retourner au lit. Salut, dit-il en se levant.

          - Mate, call Nikki. She'll be happy to play the sexy nurse ! dit mon frère très rapidement à Josh.

Josh secoue la tête et sort de la pièce. Mon cerveau est encore bloqué sur la phrase de Johan. J'ai retenu "Nikki" et "sexy nurse". Bon, ils ont l'air de s'amuser un peu, même s'ils travaillent et qu'ils sont malades...

          - Aller, gamine, au travail ! 

La gamine, Tome 1 - Toi, lui et moiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant