Sa vraie nature

34.

Le samedi soir, effectivement, les amis de Damien lui ont tendu une sorte de guet-apens. Ils voulaient absolument voir son nouveau petit copain, ils se sont donc réunis dans leur bar favori. Et Patrick est le centre d'intérêt. Tout le monde veut lui parler, les félicitations pleuvent, chacun valide le choix de Damien : cet homme est vraiment magnifique.

– Alors, quand est-ce que vous emménagez tous les deux ?

– Vous avez déjà pensé au mariage ?

– Vous faites un si joli couple.

Patrick tente de rester gentil et de sourire aux blagues parfois un peu idiotes. Il n'a pas réellement envie d'être là, il veut passer le maximum de son temps avec Damien. Tout ce qui le distrait de cet objectif, il n'apprécie pas.

La soirée se prolonge, difficile de couper court à cette fête organisée par les amis de Damien. Patrick a juste envie de prendre son copain par la main et de retourner chez lui, loin de cette foule, pour n'être que tous les deux. C'est à ce moment que son téléphone sonne. Il sort du bar pour mieux entendre.

– Bonsoir, ma chérie.

« Eh bien, on dirait qu'il y a de l'ambiance à ce tournoi de boxe. »

– Oui, on a improvisé une petite fête.

« Arrête de me prendre pour une conne, Patrick ! »

Il se fige. Elle a certainement tout compris. Il ne sait plus comment réagir.

« Je suis passée à côté de ton que club de boxe. À l'extérieur deux adhérents fumaient, je suis allée leur parler du tournoi. Il n'y a pas de tournoi, Patrick ! »

– Je, euh...

« Depuis quand est-ce que tu me mens ? Non, ne réponds pas. J'ai cogité tout l'après-midi. Je suis presque devenue hystérique à cause de toi. Je me suis demandé avec qui tu pouvais être à Nice, si tu me trompais avec une jolie femme, depuis combien de temps tu couchais ailleurs. »

La femme de Patrick hurle dans le téléphone. Si ses paroles ne sont pas cohérentes, c'est sous le coup de la colère.

« Et puis j'ai réfléchi. Je suis vraiment débile. Tu vas plus souvent au sport, tu sors plus souvent avec tes collègues, tu organises une visite de Paris pour un type que tu as rencontré à Nice. Tu as laissé ton portable professionnel à la maison, mon chéri. J'ai vu ton historique Internet. »

Patrick est tétanisé. Il n'essaie pas de se justifier, c'est totalement inutile.

« Et moi qui comme une idiote ne faisais que des compliments à ce Damien, heureuse de te voir avec un nouvel ami. Maintenant j'ai une seule question, enfin deux : est-ce que tu es avec lui en ce moment et est-ce que vous couchez ensemble ? »

S'en suit un long silence. Patrick a des larmes au bord des yeux. Ce qu'il va répondre mettra définitivement fin à son mariage.

– Je suis avec lui. Nous avons déjà fait l'amour plusieurs fois.

Le silence est entrecoupé par les sanglots de sa femme.

« Est-ce que tu l'aimes ? »

À ce moment, Damien sort du bar et approche d'un pas rapide en direction de Patrick. De le voir, lui donne le courage nécessaire.

– Oui, je l'aime.

Sa femme raccroche.

– Qu'est-ce qui se passe, mon chéri ?

Patrick se jette dans les bras de Damien.

– C'était ta femme ?

– Oui.

– Elle a tout compris.

– Oui.

– Et tu pleures parce que...

Patrick se détache légèrement de son homme pour le regarder dans les yeux. Les larmes ne cessent pas de couler.

– Je pleure de joie.

– Quoi ?

– Ça va être dur, mais je suis libéré. Il y a tellement longtemps que je voulais lui dire. Maintenant qu'elle a tout compris, c'est un poids en moins, je me sens tellement léger.

– D'accord, je ne m'attendais pas à cette réaction.

– Tes potes sont super sympas, mais tu peux aller leur dire qu'on rentre à l'appartement ? J'ai besoin qu'on soit seuls.

– Évidemment, mon chéri, donne-moi cinq minutes.