Un verre de lait |KnB|

4. Toujours amis

J'accélère le pas pour sortir du métro et cherche du regard Sawako. Je l'aperçois enfin en train d'attendre un peu plus loin, assise sur le rebord d'une des fontaines, les yeux baissés sur son téléphone. De toute évidence, elle ne m'a pas remarqué alors je décide de m'approcher d'elle en silence avec un petit sourire. C'est plus fort que moi, j'ai envie de l'embêter.

- J'peux avoir ton numéro, ma jolie ? dis-je en changeant légèrement ma voix.

- Absolument pas ! réponds Sawako avec un ton agacé. J'attends quelqu'un alors c'est pas la peine de...

Elle s'interrompt en levant les yeux vers moi. La lueur d'agacement dans son regard disparait aussitôt pour laisser place à l'amusement.

- T'es idiot ! J'aurais pu te balancer de la bombe lacrymo à la tête !

Je pouffe de rire en imaginant la scène, les mains dans les poches tandis qu'elle se lève en rangeant son téléphone dans son sac.

- Très bien Daiki, puisque tu es en retard et que, en plus, tu m'embêtes, c'est toi qui invite ! déclare t-elle en glissant son bras sous le mien pour m'entraîner vers l'un des cafés qui bordent la place.

Nous sommes à présent assis à une petite table et un silence s'est installé entre nous depuis plusieurs minutes alors que nous attendons nos boissons. La serveuse arrive enfin et m'adresse une oeillade aguicheuse en posant la tasse devant moi. Je ne prends même pas la peine de relever et la jeune fille s'en va quelque peu déçue mais Sawako, elle, me regarde avec un sourire en coin.

- Quoi ? je lui demande d'un ton un peu bourru.

- T'as une petite amie, Daiki ? chuchote t-elle en se penchant vers moi. Ou un petit ami, peut être ?

- Non ! je réponds précipitamment. Pourquoi tu me demandes un truc pareil ?

- Parce que t'as même pas accordé un regard à cette jolie fille qui te fait de l'œil apparemment ! Alors soit t'es pas intéressé par les filles, soit t'es déjà pris.

Sawako annonce ça comme si c'était une évidence. Je souffle entre mes dents en détournant le regard. Comme si il pouvait y avoir que ces deux possibilités. C'est ridicule.

- Allez, raconte moi Daiki, reprends Sawako. Qu'est-ce que tu es devenu en dix ans ?

- T'es à Seirin, tu sors avec Kagami et tu traînes avec Kuroko...tu sais ce que j'suis devenu, Sawako.

Sans le vouloir, une note de tristesse s'est glissée dans ma voix en disant cela. J'ai conscience que depuis Teiko, j'ai changé et pas en bien. Mais personne n'a jamais réellement compris ce que j'ai ressenti à cette époque et d'ailleurs personne ne m'a jamais demandé. Depuis ma défaite de l'année dernière, j'essaie de redevenir celui que j'étais avant mais je doute que ce soit possible. Soudain, je réalise que Sawako n'a pas dû entendre beaucoup de bonnes choses sur moi depuis son retour et ça m'agace. J'aimerais qu'elle me voit différemment mais ça aussi je doute que ce soit possible.

- Je me fiche de ce que les gens disent de toi, Daiki, lâche mon amie d'enfance. Pour moi, tu restes celui avec qui je buvais du lait à la banane volé dans le placard de ma mère.

J'éclate de rire en me souvenant de toutes les fois où c'est arrivé et de l'air fier de Sawako quand elle me tendait le fruit de son délit.

- Ça fait du bien de t'entendre rire ! sourit-elle. Et puis tu sais, ton mauvais caractère, tu l'avais déjà quand on était gamins alors ça change pas grand chose pour moi...