Le soleil venait à peine d'entamer sa montée, et, pourtant, Levi rongeait déjà son frein. Dans l'attente du moment où il sortirait de son appartement, en revêtant son uniforme. Dans l'attente de directives plus concises. Dans l'attente de voir comment la journée allait se dérouler. Il était stressé.
Erwin l'avait informé, il y a de cela deux semaines, qu'il avait décidé de mettre sur pied le plan de sa carrière. Outre le fait qu'il semblait avoir pris dix ans en quelques semaines -notamment à cause de l'enlèvement d'Hanji, le grand blond n'en restait pas moins convaincant. Ainsi, il avait réussi à obtenir l'aide des brigades extérieures à leur cellule et avait formé ce qui ressemblait, plus de loin que de près, à une alliance.
Et ce qui avait pris des mois de préparation était sur le point d'arriver. La mèche était allumée et allait prendre de plus en plus d'ampleur grâce à la poudre.
C'était ce qu'avait affirmé son supérieur, clamant haut et fort que la contre-attaque avait été enclenchée.
- Nombreux sont ceux qui ont perdus des amis, des collègues, des êtres chers... Je ne peux blâmer Dietrich sur tous les points car il n'en reste pas moins un adversaire coriace... Mais je vais vous dire ceci : nous allons l'abattre, ensemble. En nous unissant, nous offrons le meilleur moyen de venger nos morts. Dietrich s'en est toujours sorti grâce à l'appui de ceux qu'il faisait chanter. Du grand juriste au gentil boulanger. Démanteler son traffic ne se fera pas en un claquement de doigts. D'ici la fin du jour, certains d'entre vous ne serons plus là pour savourer le goût de la victoire. Je n'ai pas la prétention de dire que nous reviendrons tous ensemble sains et saufs. Nous savons tous que cet espoir est vain. Vous l'avez su dès l'instant où vous vous êtes engagés à m'aider dans ma quête de justice. Je ne peux que vous remercier pour la confiance que vous mettez en moi. Ce sera tout pour ce soir. Prenez soin de ceux que vous aimez en rentrant chez vous, vous ne serez peut-être pas là à l'heure du dîner demain, annonça Erwin avec un petit sourire triste.
Et le noiraud se retrouvait dans sa chambre, à suivre le lever du soleil avec regret. Sa main stoppa son avancée dans la chevelure brune qui reposait sur son torse et il expira, vidant tout l'air contenu dans ses poumons. On l'attendait lui et son unité pour neuf heures tapantes. Il lui restait encore deux petites heures avant de prendre le risque de perdre tout ce qui lui était précieux. Il allait peut-être perdre des collègues, peut-être même qu'ils decouvriraient Hanji en décomposition dans une cellule miteuse. Il pensa à son équipe et se mit à espérer que rien ne leur arrive. Il n'était pas prêt à voir mourir ses imbéciles, il ne les avait pas assez torturés pour avoir osé se clamer comme étant ses amis. Ils méritaient encore une bonne centaine de corrections...
Sa main continua son chemin jusqu'à la nuque du plus jeune qui marmonna quelque chose dans son sommeil. Il sourit, attendri. Il pensa soudainement à ce qui lui arriverait si jamais il ne revenait pas de cette descente. Qu'allait-il advenir d'Eren Jaeger ? Lui qui venait à peine de fêter sa majorité ?
Peut-être devrait-il laisser une note signée comme quoi il lui léguait en partie sa bagnole, s'il jurait de la bichonner comme il le fallait pour qu'elle roule encore longtemps ?
Son regard s'arrêta sur les marques qu'il lui avait laissé la veille. Si la situation n'avait pas été aussi merdique et son stress aussi élevé, il l'aurait réveillé pour lui faire l'amour jusqu'à son départ. Il brûlait de désir pour lui mais il préférait partir serein, le sachant endormi. Même si sa conscience lui soufflait qu'il allait sans doute lui en vouloir.
Ils avaient conclus un accord la nuit dernière, après que le plus jeune se soit mit dans tout ses états pour ce qu'il appelait "l'opération suicide". Si jamais le noiraud se faisait abattre, le plus jeune avait le droit de le faire revenir à la vie pour le tuer de ses propres mains. Il lui avait dit qu'il n'était pas prêt à se sentir seul. Eren ne voulait pas être celui qu'on laissait derrière.