Chapitre 13

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Quelques heures de sommeil s'avèrent bénéfique pour la jeune femme. Sa sortie à l'extérieur lui avait tellement fait se dépenser depuis qu'elle était en ce lieu, non pas qu'elle considère avoir fait du sport mais plutôt que ses muscles n'étaient plus habitués à se dégourdir, qu'au retour elle s'était endormie.

Lorsqu'elle se réveille, Lydia arbore un sourire sur son visage. Cette expression ne lui était plus venue depuis un moment, depuis le jour du kidnapping en fait. Elle se souvient rapidement de quoi elle rêvait et est un peu peinée de s'être extirpée de ce si doux songe.

Dans son rêve, Lydia avait réussi à s'échapper par elle ne sait quel stratagème et déambulait dans la forêt, à proximité du lieu de séquestration. Elle marchait jusqu'à ce que le coucher de soleil apparaisse et retrouvait enfin sa mère, dans sa maison d'enfance. Les retrouvailles étaient chaleureuses au point que, il était impensable d'imaginer qu'un quelconque froid entre elles ait pu un jour exister. Les deux femmes se serraient dans leurs bras et finissaient par aller ensemble au restaurant. Elles n'arrêtaient pas de discuter de choses qu'elles avaient faites au temps où elles se voyait, parfois en riant, tantôt en pleurant.

« Je t'aime ». Voilà ce qu'elle aimerait dire à sa mère dès qu'elle la verrait. Ces trois mots qu'elle n'a plus osés lui confier depuis des années.

Lydia sort de ses pensées et étire son dos en poussant une expiration. Hum, ce qu'elle ne donnerait pas pour avoir un massage ! Auparavant, c'était Tao qui s'en occupait. Mais rien que d'imaginer ses sales mains sur sa peau lui fait ressentir du dégout.

Elle sort ensuite le clou de sa chaussure et le regarde avec intensité. Que pourrait-elle bien en faire ?

Elle reste dans cette réflexion quelques minutes avant de se motiver à agir. Depuis combien de temps séjourne-t-elle ici ? Si on peut appeler ça un séjour. Cela doit faire à peu près 6 jours maintenant. Elle ne sait même plus à quand remonte exactement son anniversaire !

Elle doit rester forte. Jusque-là, malgré des moments de tristesse, elle a su conserver au minimum sa tête froide. Lorsqu'elle a eu la possibilité de demander ce qu'elle voulait, le jour de son anniversaire, elle a été suffisamment intelligente pour exprimer le souhait de s'aérer, plutôt que celui de contacter un proche. Si elle avait fait cette requête, elle se doute que Tao n'aurait pas accepté. Au lieu de ça, elle a eu la chance de pouvoir retrouver un minimum d'énergie et d'analyser où elle pouvait se trouver. Non pas qu'elle sait désormais où elle réside, mais ce qu'elle peut dorénavant confirmer, c'est qu'ils sont dans un endroit reculé. Cependant, les forêts sont présentes dans diverses régions des Etats-Unis, y compris dans le Connecticut.

Lydia sent qu'elle s'éparpille à nouveau. Non Lydia, tu recommences. Dans quelle forêt tu te trouves n'est pas la priorité. Ça le sera une fois dehors, pense-t-elle intérieurement.

Soudain, le cliquetis provenant de la serrure retentit. Lydia cache le clou sous son fessier peu de temp avant que Tao n'apparaisse dans l'encadrement de la porte.

- Bonjour. Comment vas-tu aujourd'hui ? La questionne-t-il.

À son ton, la prisonnière a l'impression qu'il s'enquit sincèrement de comment elle va.

- Comme une personne dénuée de sa liberté, rétorque-elle en tenant le regard face à son ravisseur.

- Pour ma part, je vais bien. Je te remercie. Cette nuit m'a fait beaucoup réfléchir sur ton sort, répond Tao en retroussant sa manche pour regarder sa montre. Sais-tu quel jour nous sommes ?

Lydia désapprouve de la tête.

- Le 26 janvier. Et dans trois jours, nous serons le 29. Je parie que cette date ne te dit rien ?

La jeune femme répond de la même manière qu'à sa question précédente.

- Eh bien, ce sera un jour particulier. Celui d'un anniversaire. Comme tu t'en doute, il ne s'agit pas du mien. Non, ce sera celui d'Anteo. Il aurait dû avoir 23 ans. Tout comme toi si tu ne l'avais pas fait souffrir. Bref, de toute façon ton sort arrivera bientôt. Même s'il n'est plus là, je tenais à lui faire un cadeau. À ma manière. Je vais te tuer ce jour-là. D'une certaine façon, je sais qu'il sera triste de là-haut, mais, d'un autre côté, il sera enfin apaisé.

- J'ai l'impression qu'il y a encore quelque chose que tu ne m'as pas dit à propos d'Anteo. J'ai compris que tu étais amoureux de lui et que tu m'en veux de ne rien avoir fait pour lui venir en aide. Mais en même temps, je pense qu'il me manque encore une pièce au puzzle.

- L'humanité est salle. Et les individus qui le sont le plus sont ceux qui n'ont pas le courage de s'affronter face à leurs prétendues amies. Et ces personnes méritent encore moins de vivre lorsqu'elles sont le tyran et en même temps l'amour interdit de la victime.

Lydia n'en croit pas ses yeux. Anteo était amoureux d'elle ?

- Qu'est-ce que tu dis, enfin ?

- Anteo était amoureux de toi depuis la rentrée. J'étais son confident, c'est donc évidement vers moi qu'il est venu en parler. Je me rappelle très bien de ce qu'il m'a dit « Tao, il y a cette fille dans ma classe que je trouve magnifique mais je n'ose pas lui parler. Elle s'appelle Lydia. Ses yeux bleus sont tellement intenses que j'en reste troublé ».

Tao inspire et reprend :

- Depuis cet instant, j'ai compris que son cœur était pris. J'ai alors décidé de ne pas lui dévoiler mes sentiments, du moins jusqu'à qu'il ne ressente plus rien pour toi. J'étais contente pour mon ami et son bonheur était ma priorité. Puis, au fil des mois, je me suis rendu compte qu'il n'était plus le même. Je n'ai jamais su ce qui se passait jusqu'au jour de sa décision finale. Un jour, alors que je me morfondais sur sa disparition, j'ai entendu près du parc de l'école la raison de son acte. Anteo se faisait harceler par un groupe de filles dont une Lydia. Je ne me rappelais pas de ton prénom, mais, dès l'instant où je l'ai perçu, il est revenu dans ma mémoire. C'était celui de la fille qu'il aimait. Et cette fille-là était la responsable de sa mort. Le pire des scénarios. Malgré vos excuses auprès de ses proches, je n'ai jamais oublié ces horreurs. Voilà pourquoi je t'en veux à toi, Lydia.

- Je comprend mieux ton comportement. Mais, je te promets, Tao, que je n'étais nullement au courant qu'il était amoureux de moi.

- De toute façon, ça aurait changé quoi ? Tu aurais enfin ouvert ta gueule ? Ne répond même pas, ça vaut mieux pour toi.

La dernière fois que Tao a parlé avec Lydia, la conversation s'est finie dans le froid. La jeune femme regrette d'en être arrivée là, elle qui souhaitait éviter à tout prix de l'énerver. Elle espère que cela n'aura aucune incidence sur le laps de temps qui lui reste à vivre.

Tout compte fait, son ex petit-ami revient le lendemain matin pour lui donner un maigre quignon de pain. Avant que Lydia n'ait le temps de le remercier, il quitte la pièce sans prononcer un mot. Quelques minutes plus tard, un faible vrombissement de moteur retentit. Le son est à peine perceptible mais la jeune femme arrive à en conclure qu'il appartient à une voiture. Elle ne voit qu'une solution pour l'identité du conducteur : Tao.

Un élan de détermination assaille une nouvelle fois la jeune femme. S'ils sont bien situés dans une forêt, la prochaine habitation ou agglomération doit être à des kilomètres. Ce qui peut laisser du temps à Lydia pour élaborer un plan.

Premièrement, les chaînes. Avec le clou qu'elle a soigneusement conservé, elle pourrait l'insérer dans la serrure de celles-ci et tenter de se libérer. Cet outil s'avèrera peut-etre plus pertinent que la fermeture éclair. Deuxièmement, la porte. Si le clou est encore utilisable, elle pourrait procéder à la même opération que pour les chaînes. Mais, s'il s'avérait que la serrure est plus solide ? Lydia retourne la situation dans sa tête mais le résultat reste le même : elle se retrouverait bloquée. Si tel est le cas et que Tao revenait, elle ne donnerait pas cher de sa peau.

Elle sait très bien que ses chances de vivre sont plus faibles que celles de mourir mais elle ne veut pas abandonner. Pas au point où elle en est.

INCERTAINOù les histoires vivent. Découvrez maintenant