Chapitre 7

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Thaïs

Je dévale les escaliers quatre à quatre. Si c'est Zaïna, elle va m'entendre : ça fait une semaine qu'elle n'est pas venue me voir à la librairie ! J'espère que ma meilleure amie a de bonnes raisons de disparaître de la circulation comme ça ! Pourtant, quand j'arrive au rez-de-chaussée, ce n'est pas Zaïna qui me fait face. Au contraire, c'est le garçon qui m'a prise en photo sans mon autorisation la semaine dernière ! Il a un de ces toupets de revenir ici, et pour me voir, qui plus est ! Je n'en reviens pas. Derrière la caisse, ma grand-mère Ornella ne loupe pas une miette de la scène, dissimulée derrière un livre qu'elle a déjà lu cent fois.

Le garçon n'a pas l'air très sûr de lui, et me lance un "Bonjour" hésitant. C'est assez drôle de le voir aussi peu confiant, alors que les garçons comme lui sont toujours si vantards et prétentieux. Grand et d'allure sportive, son teint est hâlé comme après un été entier passé à la plage. Avec ses cheveux noir ébène, on dirait le cliché vivant du garçon qui fait fondre les écervelées qui peuplent Instagram. C'est typiquement le genre de garçon à fréquenter les salles de sport assidûment. Il a l'air affreusement superficiel. Alors pourquoi semble-t-il aussi stressé, s'il passe pour LE garçon parfait ?

Puisque je ne réponds pas à son "bonjour" de convenance, ce paparazzi de cour de récré déglutit et reprend la parole :

— Je m'appelle Axel. Je suis venu pour m'excuser de t'avoir prise en photo la dernière fois sans t'avoir demandé. C'était particulièrement stupide de ma part. Je ne voulais ni te blesser, ni te vexer. Je ne savais pas trop quoi faire pour réparer mon erreur, alors je t'ai fait des cookies. J'espère que ça te plaira.

Je reste statufiée face à l'annonce d'Axel. C'est tellement inattendu ! Je ne sais plus trop quoi penser à son propos. Il n'attend pas de réponse particulière de ma part, et tant mieux parce que je serais incapable de répondre. Avec un grand sourire, il me glisse sa boîte à cookies entre les mains, puis me souhaite une bonne soirée et plie bagage. Je suis complètement déroutée, si bien que je sursaute quand ma grand-mère et Marceau se précipitent vers la fenêtre pour le regarder partir.

— Il est plutôt beau garçon !, s'exclame ma grand-mère, le visage collé à la vitre.

— Il se la pète un peu trop, je trouve, commente mon frère.

— C'est un de tes amis, ma chérie ? Tu l'as rencontré à la fac ?

— Je ne sais pas qui c'est, Nonna, affirmé-je pour couper court à ses questions. Je ne le connais pas.

— Tu mens super mal, Thaïs, rigole mon frère. Il était à la soirée d'intégration de ta fac ?

— Je ne sais pas, je n'y suis pas allée.

— Je n'y crois pas du tout ! Mais va prendre tes affaires en haut, on va bientôt rentrer. Papa m'a envoyé un message pour nous dire que le dîner était bientôt prêt.

Je remonte à l'étage des livres jeunesse où j'ai laissé mon sac et ma veste en jean. Je n'en reviens toujours pas qu'Axel soit venu pour s'excuser. Ce qu'il a fait est particulièrement gentil et attentionné, mais malgré tout je n'arrive pas à le considérer autrement que comme une personne bizarre. Qu'est-ce qui a bien pu le décider à revenir me voir ? Je ne sais pas ce qui me pousse à penser ça, car on dirait qu'il y a quelque chose de pas net à propos d'Axel.

Avant de descendre, je décide d'ouvrir la boîte à cookies. Une bonne dizaine de biscuits sont entreposés dans la boîte, bien alignés, serrés les uns contre les autres. À l'intérieur du couvercle de la boîte, un numéro de portable est griffonné, suivi d'un smiley souriant. Mais quel cliché ! J'en souris malgré moi. Je referme la boîte en vitesse, loge mon sac sur mon épaule et rejoins Marceau pour pouvoir partir. Notre grand-mère nous embrasse, nous enjoint encore une fois d'être prudents sur la route, et nous quittons enfin la librairie.

Entre deux pagesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant