Chapitre 12

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Axel

Thaïs fait irruption dans les escaliers et, j'ai beau savoir que c'est pour de faux, il me faut quelques secondes pour reprendre mes esprits. Elle aperçoit mon regard désabusé, et descend les marches en arborant un sourire intimidé qui la rend encore plus belle. Je vois ses mouvements pleins d'hésitation, ses pas mesurés à cause des escarpins qu'elle porte, et l'œillade complice que lance Marceau à sa sœur pour la rassurer me confirme qu'il s'agit d'un moment d'exception. Puis, elle glisse sa main dans celle de son frère, la presse gentiment, la lâche et se tourne vers moi. Alors, Marceau, ou devrais-je dire Sherlock Holmes, nous souhaite une bonne soirée, et nous nous éclipsons vers l'extérieur.

De là où je suis, je vois Valentin, assis sur le siège conducteur de sa voiture, qui nous observe très discrètement du coin de l'œil, tout en pianotant à un rythme effréné sur les touches de son portable, sûrement pour alimenter la conversation Messenger que nous entretenons avec Noé. Thaïs me suit dans sa direction et, quand je tourne la tête vers elle, elle m'offre un sourire crispé, sans doute parce qu'elle n'a pas l'habitude de sortir avec un presque inconnu. Ça pourrait même être risqué, si j'étais un dangereux psychopathe, mais heureusement pour Thaïs, la seule chose que je souhaite lui dérober est le secret qu'elle cache.

J'ouvre la portière arrière et lui demande :

— Tu veux aller devant à côté de Valentin ou tu préfères aller sur la banquette ?

Elle regarde Val' comme s'il allait la dévorer toute crue, puis choisit une option plus raisonnable pour elle, qu'elle ponctue d'un sourire entendu.

— Je vais aller derrière.

Je la laisse s'installer, claque la portière et me place sur le siège voisin de celui de Val', qui range alors son téléphone dans le vide-poches et semble regarder avec attention Thaïs dans son rétroviseur.

— Alors c'est toi la fameuse Thaïs ? Axel n'arrête pas de parler de toi.

Je le foudroie du regard, non seulement parce que ce qu'il affirme est totalement faux, mais aussi parce que Thaïs a l'air assez mal à l'aise comme ça, cependant Valentin démarre, sort de la rue pour rejoindre la route et continue à lui parler, et moi à stresser pour qu'il ne dise pas quelque chose qui la froisse ou la gêne encore plus.

— Tu sais que depuis qu'Axel te connaît, il s'est mis à lire des livres ? Je ne sais pas ce que tu lui as fait pour l'hypnotiser comme ça, parce qu'il rechigne énormément à ouvrir un bouquin qui ne parle pas de photographie.

Thaïs sourit, amusée, lisse les plis de sa jupe du plat de la main, puis réplique :

— Je suis très heureuse de contribuer involontairement à son éducation littéraire, mais je n'ai rien fait de particulier.

— Tu bosses dans une librairie, c'est ça ?

— Oui, je travaille un peu chez ma grand-mère quand je ne suis pas à la fac.

— C'est plutôt cool, approuve mon pote, les yeux fixés sur la route en face de lui.

Un léger tintement signalant l'arrivée d'un message sur le portable de Valentin résonne dans l'habitacle. Ce dernier me demande de le lire à sa place, ce que je m'empresse de faire avant de le lui résumer :

— Noé est arrivé au bar, il le trouve chanmé, il dit que la décoration et les lieux sont incroyables. Il dit qu'il a aussi trouvé ta sœur, et qu'elle boit comme un trou.

— Elle saoule, ma frangine ! C'est encore moi qui vais devoir lui tenir les cheveux quand elle ira vomir !

— Mais pourquoi elle passe la plupart des soirées où on va à boire autant ?

Entre deux pagesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant