La Noblesse du Cœur ▬ Tome ✯ © #Wattys2021

18 - Alexandre

23 novembre

Oxford

Alexandre

Elle était là, à quelques mètres de moi. J'étais arrivée il y avait presque trente minutes et j'avais tout le loisir de pouvoir l'admirer. Ou, tout de moins, de pouvoir observer la partie d'elle qui était visible, à savoir son profil droit. Je pouvais distinguer quand elle souriait, quand elle réfléchissait. Je me demandais à quoi elle pouvait bien réfléchir et s'il y avait une infime possibilité que je fusse l'une de ses pensées. Son message de dimanche m'avait donné de l'espoir, mais je me refusai à aller de nouveau vers elle le premier. Je ne voulais pas paraître insistant. Si elle avait changé d'avis concernant sa décision de ne pas se lier charnellement avec un anglais, c'était à elle de venir me voir, même si la tentation était grande. Je n'étais pas patient en cet instant, mais peut-être qu'elle regrettait de m'avoir envoyé ce fameux message. J'étais de bonne humeur, je ne voulais pas prendre le risque de me prendre à nouveau à vent et d'être maussade pour le reste de la soirée.

Je ne pouvais pas non plus m'aider de Charlie qui, malgré sa joie en apprenant que Jade s'était servie de mon numéro, ne voulait pas faire tout foirer à cause de sa relation avec Mila. Il l'avait dit lui-même : il n'était pas d'une grande aide dans cette affaire, c'était même tout l'inverse.

— Tu comptes t'y prendre comment ? me questionna-t-il.

Je n'en avais aucune idée, car ce n'était pas à moi de provoquer la rencontre. Je haussai donc des épaules, pas très optimiste. Je la voyais mal s'approcher de ma table où le regard de cinq mecs se braquerait sur elle. Ce n'était pas très confortable.

— Il va quand même falloir que je parle à Mila, m'avoua-t-il d'un soupir.

— Quoi ? Mais pourquoi ?

Sacré virement de situation, je ne l'avais pas vu venir !

— Parce que j'aimerais bien pouvoir tirer au clair une question. Sait-elle ou ne sait-elle pas ? Vraiment, ces Américains me surprendront toujours...

— Honnêtement, j'aimerais qu'elle ne le sache pas. Pour une fois dans ma vie, je voudrais expérimenter une relation sans tout ça pour l'entraver. Pouvoir être normal.

— Attends... Qu'est-ce que tu me dis ? Si elle ne sait vraiment pas, tu ne comptes pas lui dire ?

— Si, mais pas tout de suite. Je lui dirai au bout de quelques jours, quelques semaines. Tout ça en imaginant qu'il se passe quelque chose entre nous et je ne suis pas très optimiste. Regarde, je suis en train de me faire des films, me casser la tête, peut-être pour rien du tout.

— Oh non, je ne dirai pas « pour rien du tout ».

Si je n'avais pas détecté le ton amusé, le sourire de mon meilleur ami me mit sur la piste et je lui lançai un regard interrogateur. Pourquoi disait-il cela ? Quelles étaient les raisons qui le rendaient bien moins pessimiste que moi ?

— Si elle n'était vraiment pas intéressée, elle aurait jeté ton numéro de téléphone. Mais, surtout, elle arrêterait de te lancer des regards furtifs, chose qu'elle n'a pas arrêté de faire depuis que nous sommes entrés il y a de cela... hum, quarante-quatre minutes précisément.

Charlie, après avoir jeté un regard à l'écran de son téléphone, me lança un sourire satisfait. Si j'avais admiré Jade par intermittence depuis que je m'étais assis, Charlie était bien plus observateur que moi et avait vu ce que moi je n'avais pas vu. Ou ce que j'avais peut-être eu peur de voir. Évidemment, cela ne résolvait pas le problème des premiers mots échangés, mais ça me donnait de l'espoir, ça m'exaltait.