16 - Alexandre

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Dimanche 17 novembre

Angleterre

Alexandre

Après avoir pris congé de ma grand-mère — ou, devrai-je dire, d'avoir été congédié — j'étais monté dans la voiture qui m'attendait devant l'entrée de l'hôpital. Après qu'elle eut fini de prendre son déjeuner, grand-mère avait prié Constance d'appeler mon garde du corps. Et me voilà dans la voiture, en direction d'Oxford. Mes pensées étaient toujours là-bas, avec elle et j'aurai bien voulu y rester. Mon cœur, lui, n'avait qu'une hâte : arriver à destination. J'envoyai d'ailleurs un message à Charlie, lui demandant s'il était possible de se voir lorsque j'arriverai. J'avais besoin de savoir ce qui s'était bien passé entre lui et Jade. Lui avait-il donné mon numéro de force ? Une voix me disait non, il m'en avait fait la promesse.

Jade... Je ne lui avais même pas encore répondu, malgré l'empressement de grand-mère à le faire. Mais que lui dire ? J'étais perdu. Je ne voulais pas non plus lui répondre trop précipitamment, ça aurait fait désespéré. Ce n'était pas l'impression que je voulais donner, même si j'avais hâte de lui répondre.

Parfois, un seul message de la bonne personne pouvait illuminer une journée. Il pouvait apaiser un cœur blessé, redonner le sourire, apporter un peu d'espoir dans un brouillard. Ma vie se résumait un peu à ça, à un brouillard très épais... Papa m'avait fait une réflexion sur mon moral durant le repas de samedi soir. J'aurais préféré qu'il le fît entre quatre yeux, pas devant une famille que j'avais dû rassurer. Je leur avais promis que tout allait bien, que je ressentais à nouveau. Que c'était juste un petit coup parce que j'étais triste que cela fut ma dernière année. Je n'étais pas certain d'avoir réussi à les convaincre. À me convaincre aussi d'ailleurs.

Le trajet passa à une vitesse hallucinante. Entre la famille, l'état de santé de grand-mère, ma dernière année, Charlie et Jade, ma tête était suffisamment occupée pour m'arracher à la réalité. Ce ne fut qu'avec la voix de mon garde du corps du week-end que j'arrivais à revenir sur terre. La voiture était déjà arrêtée devant la bâtisse qui abritait ma chambre d'étudiant. Je sortis de la voiture en le remerciant et, à peine fus-je arrivé dans mon couloir, qu'une voix me stoppa net. Je me tournai vers mon interlocuteur, mon chez meilleur ami.

— Je t'ai dit que je t'enverrai un message quand je serai arrivé, dis-je d'une voix surprise. Ne me dis pas que tu m'as attendu ici depuis que je t'ai envoyé ce message ?

— Non, bien sûr que non, j'ai plus ou moins calculé le temps qu'il te faudrait pour arriver et, tadaaaam, me voilà ! Je ne suis pas trop nul pour les mathématiques apparemment.

— Apparemment...

— Comment va la Reine-Mère ?

— Tu sais, tu peux juste dire « ta grand-mère ».

— Ouais, non... « Reine-Mère », ça fait vachement classe. Alors, comment va-t-elle ?

— Le docteur dit qu'elle est tirée d'affaire, mais elle doit être surveillée et prendre des médicaments. Si ça se reproduit, elle pourrait être opérée.

— Je suis sûr que ça ira, ne t'en fais pas.

C'était des phrases bateaux, celles qu'on disait parce qu'il n'y avait rien d'autre à dire, parce qu'on ignorait de quoi le futur serait fait. On voulait rassurer du mieux qu'on le pouvait. Charlie le fit, avec ses mots, mais aussi avec une étreinte. Il n'était pas très tactile avec les hommes, alors ça me surprit. Passé cette émotion, je me laissai faire. J'avais vécu quelques jours émotionnellement compliqués et, en dehors de la famille, je ne pouvais compter que sur lui. C'était lui que j'appelais quand j'avais une bonne tout comme une mauvaise nouvelle. Il avait été le premier au courant de ma décision de rompre avec Charlotte. Il m'avait félicité parce qu'il avait toujours su que je n'avais jamais été heureux avec elle.

La Noblesse du Cœur ▬ Tome ✯ © #Wattys2021Où les histoires vivent. Découvrez maintenant